Brueghel aux premières loges
Peut-être vous souvenez-vous que lors de la rétrospective de Pieter Brueghel l’immense, le père de la dynastie des Brueghel (ou Bruegel), au Kunsthistorishes museum de Vienne en 2018, le musée, qui détient 12 chefs-d’œuvre du peintre (parmi 44 œuvres plus ou moins attribuées), avait ouvert un site dédié (insideBruegel) où ces tableaux étaient reproduits en mode gigapixels, apothéose rarissime qui consacre un peintre sur internet.
Mais il y manquait un tableau sur les 12, alors en cours de restauration : le Suicide de Saül, un petit bijou de 55 centimètres de large, un travail de miniaturiste, typique du point de vue cosmique et ironique du peintre sur l’humanité parmi la nature.
7 ans plus tard le site fonctionne toujours, ce qui en soi est déjà exceptionnel. Il a été enrichi de 6 œuvres, des tableaux d’autres musées, notamment de la superbe Tour de Babel du musée Boijmans de Rotterdam, et enfin de ce 12ème tableau de Vienne.
Ainsi peut-on désormais assister des premières loges au fameux suicide sanguinolent du roi Saül, et de son écuyer, pendant la déroute de son armée face aux Philistins, sur le mont Guilboa, comme le raconte le texte biblique.
Ainsi peut-on savoir le nombre de soldats de l’armée de Saül à ce dernier combat - ce que les Écritures omettent de dire - par exemple en comptant le nombre de lances, qui en donne une bonne approximation. Brueghel en a peint 1057 (dénombrement assisté par l’IA).
Allez-y, vérifiez, ou mieux encore, comparez au nombre de casques, qui semble curieusement plus petit. Ce sont des données indispensables à une bonne culture générale et une saine compréhension de notre monde.
Appendice : 3 tableaux majeurs de Bruegel absents du site "Inside Bruegel" sont tout de même visibles en mode gigapixels sur le site "Google Arts & Culture", ce sont les tableaux de Bruxelles, la Chute d'Icare (et son cadavre caché dans les buissons), la fantasmagorique Chute des anges rebelles et le Recensement de Bethléem (sous la neige). On attend toujours du musée du Prado à Madrid la même qualité de reproduction pour le prémonitoire Triomphe de la mort, sinon, comment être certains du nombre de squelettes ? Nous y reviendrons bientôt.























2 commentaires :
Ce qu’il ya de plus intéressant dans le « Suicide de Saül » de Pieter Brueghel, ce n’est pas le Saül pleureur qui se plante sur son épée (quoiqu’enfin un politicien responsable, c’est bien rare, surtout de nos jours), mais c’est plutôt le personnage tout en bas du tableau, à cheval sur une barrière en bois, qui discute (ou qui engueule ?) un chevalier (général ?).
Allons savoir ce qu’ils peuvent se dire ces deux-là… Sans doute encore une histoire de bout de terrain ou de poulailler à la Clochemerle qui pullule dans la Bible comme dans tous les récits guerriers de l’humanité.
…
Je n’ai compté que 1047 casques et 1042,5 lances (il y en a une de cassée), mais mon intelligence n’est que naturelle — bestiale quoi.
Bien à vous.
Oui, en réalité il se tient à la branche d'un arbre abattu et il regarde passer le maelström comme on regarde passer le tour de France. Il doit faire des remarques moqueuses et l'autre le menace, peut-être...
Et en bas à droite, les cavaliers qui se cassent la gueule dans le fossé sont aussi croquignolets, au-dessus on a l'impression qu'ils se battent entre collègues.
En fait on ne sait pas vraiment, à part les archers à gauche sur le promontoire, qui tire sur qui dans la mêlée. Au centre-droit, l'arbalétrier qui tire dans le tas serait un philistin ?
Je pense que Breughel s'en moquait. Il voulait faire un grand spectacle, il a trouvé l'idée graphique géniale de fournir plus de lances que de soldats (même si vous avez trouvé plus de casques que de lances - ce que je conteste vivement, sans en avoir aucune preuve).
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