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mardi 11 avril 2023

L'étalon de Vitruve (épisode 2 de 2)

Avant de tenter d’éclaicir ou au moins d’illustrer le succès de ce dessin de Léonard, précisons que ce ne sont ni lui, ni Taccola, ni Vitruve, pas même Polyclète ni Protagoras, qui ont inventé que "l’Homme est la mesure de toute chose". Les plus anciennes civilisations savaient bien qu’il était plus utile de fabriquer des vêtements, des lits, des chaises, des portes, adaptées à la taille des populations. 
Depuis des millénaires chaque ville, chaque région, avait créé ses propres unités de mesure anatomiques, sa coudée, son aune, son pied, sa paume, son pouce et leurs multiples. Sans ces unités locales les monumentales réalisations antiques que nous admirons toujours, des pyramides aux cathédrales, auraient depuis longtemps succombé à leurs malfaçons.
Aujourd’hui encore, malgré la mondialisation des échanges, nombre de pays parmi les plus influents utilisent quotidiennement leurs propres unités anatomiques, ce qui produit régulièrement des situations cocasses (voir un excellent et court article de S. Stevenson sur le système métrique).
On se rappellera l’aventure de la sonde américaine Mars Climate Orbiter en 1999 qui s’est explosée au sol en arrivant sur la planète Mars parce que la NASA l’avait équipée d’appareils de mesure de l'altitude fabriqués avec des unités disparates, à la fois métriques et anglo-saxonnes.    
Semblablement, qui n’a été confronté au choix d’un écran de télévision, d’ordinateur, ou de téléphone et incapable de se faire sur catalogue la moindre idée des dimensions de la chose, exprimées en pouces, en inch(es) voire avec le symbole des secondes (") ?

Ces situations font sourire, néanmoins elles nous préservent encore un peu de cet avenir idéal dont rêve l’Homme de Vitruve et que décrivait Aldous Huxley en 1931 dans Le meilleur des mondes, d’une civilisation d’humains mesurés, formatés, unanimes, drogués au divertissement, presque notre civilisation moderne, pourtant.

L’être humain n’aura jamais qu’un seul point de vue, celui de sa propre perception, à sa mesure, et c’est peut-être cet égocentrisme fondamental qui fait le succès du dessin de l’Homme de Vitruve, pourtant dérisoire avec ses deux centres, et inquiétant pour ceux dont les mensurations s’éloigneront de cet idéal.
En 2006, jugeant qu'il évoquait un peu trop ce monde d’humains standardisés, interchangeables, et virils, la société Manpower l’a abandonné pour un logo moins explicite, en forme d’acronyme presque abstrait.  


Mais l’Italie est désormais tellement attachée à cette image, déclarée parfois "emblème de l’identité nationale", qu’un tribunal italien suspendait en 2019, à la demande d’une association, le prêt du dessin à la grande rétrospective Léonard de Vinci du musée du Louvre, pour infraction aux articles 65-67 du code italien des biens culturels. Le gouvernement italien accorda finalement le prêt pour éviter l’incident diplomatique.

Ce fameux code italien, en contradiction manifeste avec les conventions internationales relatives au domaine public, notamment son article 108, continue cependant de sévir, surtout depuis les succès (au moins juridiques) des musées de Florence dans les affaires Michel-Ange ou Botticelli (relatées ici).
À son tour, depuis 2019, l’Académie de Venise, gardienne du dessin de Léonard, réclame des droits de reproduction à la société Ravensburger qui en vend internationalement un puzzle de 1000 pièces depuis 2009. Revendication illégale et illégitime, on l’a vu, mais c’est l'état propriétaire actuel du dessin, en l’occurrence l'état italien, qui écrit sa propre loi, au moins sur son territoire, et ces infractions aux principes humanitaires du domaine public arrangent aussi dans leurs propres affaires les autres états (voir le décret Chambord en France) qui ne s’empressent pas au secours des entreprises rançonnées.
La presse ne se pose pas de question et adopte le point de vue du puissant, celui qui réclame ce qu’elle appelle des "royalties impayées". La marque de puzzles, qui refuse de payer, va probablement le retirer de son catalogue pour s’épargner un imbroglio juridique et diplomatique.

illustration : La société créatrice de ces puzzles devrait rester sur ses gardes… Il n’est pas normal qu’elle n’ait pas reçu de réclamation de redevance de la part des musées de Florence pourtant bien rodés sur la question d’abuser du domaine public. Quant à la Joconde, il est étonnant que le Louvre, prêt à toutes les complaisances et compromissions pour quelques dollars, n’ait pas encore trouvé une place pour son égérie sur le même trottoir que la Vénus ou le David italiens.

Les états ont les icônes, les emblèmes qu'ils méritent, la France et sa Lisa italienne qui jaunit depuis 5 siècles au fond de sa loggia, impotente au point qu’on n’ose plus lui demander de bouger un peu pour analyser la source de sa couleur douteuse, l’Italie et sa Vénus sirupeuse, son David simiesque, et son étalon de Vitruve.
Gougueule, à qui on demande quelles sont les dimensions de ce dernier, répond sans hésiter "hauteur 35 cm et largeur 26 cm", ce qui donne une idée précise de la grandeur de l’Homme. Elle ne dit rien de son épaisseur, sa profondeur, qui est trop insignifiante.

lundi 26 septembre 2022

Enfin libres !

 

Temps de lecture : 2 minutes (indéterminable si vous lisez les dates, peut-être interminable)

Depuis 16 ans, au moins, Gougueule, développeur, hébergeur, administrateur et censeur du présent blog et de millions d’autres, réduisait automatiquement les dimensions des illustrations publiées par ses administrés à un maximum de 1600 pixels par côté. Les images plus grandes n’étaient pas interdites, mais leur publication demandait des connaissances quasi divines et des manipulations particulières.
Gougueule (Que ses bienfaits ruissellent sur nous comme du miel !) pensait ainsi déjà à l’avenir du climat de la planète en limitant la consommation d’énergie de ses adeptes irresponsables.  

Or depuis quelques semaines, ou quelques mois ou quelques années - qui sait ? Gougueule, n’a pas à informer ses fidèles des miracles qu’il dispense - notre Maitre bien-aimé donc a effacé cette limite à notre liberté et nous laisse aujourd’hui publier des images de plus grande dimension. Nous ne savons pas si cette liberté a encore des limites, car seul notre Prophète peut approcher l’infini. 

Qu’Il en soit néanmoins béni ! 
Profitons-en pour illustrer enfin en haute définition et en deux versions, dans de meilleures conditions qu’au musée même, l’un des deux Vermeer du Louvre, l’Astronome (ou Astrologue).
Signé par l’auteur et daté de MDCLXVIII, au centre derrière la main droite (vous ne déchiffrerez ce nombre ésotérique qu’avec une longue pratique des langues mortes), le tableau, volé par Hitler à une famille milliardaire française en février MCMXLI et retrouvé en mai MCMXLV dans une mine de sel en Autriche, à Altaussee, avec des milliers d’autres objets d’art, a été restitué à la famille puis donné au Louvre en MCMLXXXIII pour payer des droits de succession.

Reproduit ici en deux versions pour s’adapter aux biais courants de colorimétrie des écrans, leur aspect dépendra des qualité et réglage de votre matériel. 
L’œuvre originale mesure 45 par 51 centimètres. Les reproductions sont 3 fois plus grandes (9 fois en surface). C’est dire le cadeau que nous fait Gougueule (Loué soit notre dieu unique !)

N'hésitez pas à faire des remarques, l'auteur ne peut plus protester depuis MDCLXXXVII.