Affichage des articles dont le libellé est Blog. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est Blog. Afficher tous les articles

vendredi 10 mars 2023

Mais où sont les 9 Vermeer manquants ?

37 moins 28 font 9 pour la plupart des calculatrices sur internet, même pour la fameuse "intelligence artificielle ChatGPT"(*) qui pourtant aligne les erreurs monumentales (nous y reviendrons un jour, en attendant regardez cette excellente étude par Defakator)
Or l’exposition à guichet fermé consacrée à Vermeer actuellement à Amsterdam déclare montrer 28 tableaux attribués à Vermeer, sur un total de 37 dit-on. 4 ou 5 d’entre eux, s’ils sont réellement de sa main, ont certainement été peints dans un état que la morale ou la clémence nous empêche de préciser ici, mais acceptons ce nombre magique de 37

Mais alors, où se trouvent les 9 absents ?

Eh bien la réponse est simple, trop simple peut-être ! Ils ne peuvent pas être aujourd’hui dans les salles si convoitées du Rijksmuseum d’Amsterdam parce qu’ils sont actuellement exposés ici-même, dans Ce Glob, en très haute qualité, dans des conditions d’exposition autrement plus agréables, et sans aucun risque d’infection pandémique, sous l’œil d'ailleurs bienveillant de l’Organisation Mondiale de la Santé. 
Et si cette offre exceptionnelle ne suffisait pas, les plus perspicaces auront constaté qu’un Vermeer volé il y a 33 ans dans le musée Isabella-Stewart-Gardner à Boston (avec 12 autres œuvres dont la seule marine de Rembrandt), et jamais retrouvé depuis, est également dans notre exposition. Reconnaissons qu’il n’est pas dans un état très présentable après 33 ans d’occultation dans de douteuses conditions.

Alors parlez-en autour de vous, levez haut votre pouce quand vous vous trouvez en groupe, dans la rue ou les transports en commun, abonnez-vous à Ce Glob en toute confiance, vous n’y trouverez que des exclusivités présentées dans le respect des idées les plus progressistes et des dernières rectifications de l’orthographe.

Liste des tableaux exposés ici et provenance de nos aimables prêteurs (les dimensions des images - autour de 5000 pixels - et leur poids variant de 6 à 12 mégaoctets, certains affichages peuvent être un peu lents) :

1 - Art de la peinture (Vienne Kunst Historisches museum) 10,8Mo
2 - Astrologue (ou Astronome, Louvre) 8,1Mo
3 - Femme assoupie (Metropolitan New York) 8Mo
4 - Leçon de musique (Windsor castle, collection royale) 11,8Mo
5 - Portrait de jeune femme (Metropolitan New York) 5,8Mo
6 - Femme au pichet d'eau ou aiguière (Metropolitan New York) 8,7Mo
7 - 2 hommes et une femme au verre de vin et au sourire niais (HAU museum, Brunswick) 6,6Mo
8 - Joueuse de guitare (Kenwood house, collection royale) 3Mo
9 - Le concert (Mafia bostonienne depuis le 18.03.1990) 1,5Mo






(*) Verbatim d'une conversation tendue avec le robot ChatGPT.
Âmes sensibles, surtout ne lisez pas, vous allez être confrontées à votre propre avenir !

Moi : combien font 37 moins 28 ? 
ChatGPT : 37 moins 28 équivaut à 9
Moi : Merci 
ChatGPT : De rien, n'hésitez pas si vous avez d'autres questions ! 
Moi : Alors je vais me permettre, combien font 28 plus 9 ? 
ChatGPT : 28 plus 9 équivaut à 37. 
Moi : Bravo !
ChatGPT : Merci beaucoup ! N'hésitez pas si vous avez d'autres questions.

lundi 26 septembre 2022

Enfin libres !

 

Temps de lecture : 2 minutes (indéterminable si vous lisez les dates, peut-être interminable)

Depuis 16 ans, au moins, Gougueule, développeur, hébergeur, administrateur et censeur du présent blog et de millions d’autres, réduisait automatiquement les dimensions des illustrations publiées par ses administrés à un maximum de 1600 pixels par côté. Les images plus grandes n’étaient pas interdites, mais leur publication demandait des connaissances quasi divines et des manipulations particulières.
Gougueule (Que ses bienfaits ruissellent sur nous comme du miel !) pensait ainsi déjà à l’avenir du climat de la planète en limitant la consommation d’énergie de ses adeptes irresponsables.  

Or depuis quelques semaines, ou quelques mois ou quelques années - qui sait ? Gougueule, n’a pas à informer ses fidèles des miracles qu’il dispense - notre Maitre bien-aimé donc a effacé cette limite à notre liberté et nous laisse aujourd’hui publier des images de plus grande dimension. Nous ne savons pas si cette liberté a encore des limites, car seul notre Prophète peut approcher l’infini. 

Qu’Il en soit néanmoins béni ! 
Profitons-en pour illustrer enfin en haute définition et en deux versions, dans de meilleures conditions qu’au musée même, l’un des deux Vermeer du Louvre, l’Astronome (ou Astrologue).
Signé par l’auteur et daté de MDCLXVIII, au centre derrière la main droite (vous ne déchiffrerez ce nombre ésotérique qu’avec une longue pratique des langues mortes), le tableau, volé par Hitler à une famille milliardaire française en février MCMXLI et retrouvé en mai MCMXLV dans une mine de sel en Autriche, à Altaussee, avec des milliers d’autres objets d’art, a été restitué à la famille puis donné au Louvre en MCMLXXXIII pour payer des droits de succession.

Reproduit ici en deux versions pour s’adapter aux biais courants de colorimétrie des écrans, leur aspect dépendra des qualité et réglage de votre matériel. 
L’œuvre originale mesure 45 par 51 centimètres. Les reproductions sont 3 fois plus grandes (9 fois en surface). C’est dire le cadeau que nous fait Gougueule (Loué soit notre dieu unique !)

N'hésitez pas à faire des remarques, l'auteur ne peut plus protester depuis MDCLXXXVII.

mercredi 4 mai 2022

Mais comment diable m’abonner à ce blog ?

Si l’informatique n'est pour vous qu'un brouillard, si vous vous perdez dans ces innombrables systèmes qui font tourner, sur des appareils disparates, des milliers de logiciels difficilement compatibles entre eux, il faut vous en prendre à l’Éternel. Les livres les mieux documentés l'ont dit depuis des siècles : c’est parce que l’humain, qui avait la ferme intention de reprendre ses turpitudes d’avant le Déluge, a construit une tour qui dépassait largement la hauteur d’eau atteinte par la crue biblique, grâce à quoi il pensait pouvoir forniquer, violenter, assassiner et blasphémer à profusion, persuadé que le niveau de la prochaine punition divine ne pourrait pas l’atteindre. L’histoire se passait à Babel. Mais l’Éternel, malin, changea de tactique, et alors qu’à l’époque l’informatique se résumait à un système unique et un seul logiciel sur un seul type d’appareil, on se retrouve aujourd’hui avec des milliers de marques, de normes, de standards, de particularités nationales, de langues, le tout si bien combiné qu’on ne sait même pas comment s’abonner à un simple blog.
(La tour de Babel © Pieter Brueghel l'ancien, musée Boijmans, Rotterdam).

 
Presque chaque année une personne au moins annonce à l’auteur de ce blog, animée d’une feinte confusion « mais comment être prévenue quand vous publiez une chronique ? », pensant ainsi lui faire avaler qu’un petit obstacle technique l’a empêchée de jamais lire sa prose, qui pourtant promettait des sujets si alléchants, dit-elle. L’auteur, bien élevé, se garde de lui rappeler que ses chroniques sont quasiment hebdomadaires.

Naguère Gougueule, à qui Ce Glob est Plat appartient corps donc âme, proposait gratuitement une fonction qui enregistrait les adresses de courriel des volontaires souhaitant recevoir un avertissement dès la parution d’un nouvel article de blog. Ce Glob est Plat n’y a jamais souscrit. Il a bien fait car la firme vient de supprimer cette fonction en 2021, laissant les auteurétrices de blog se dépatouiller avec une liste d’adresses courriel d’abonnés abandonnés désormais sans nouvelles.

Or il a toujours existé une solution idéale à ce problème : un petit logiciel qui prévient quand les sites que vous lui avez demandé de surveiller postent un nouvel article sur internet (*). Ce logiciel existe, en divers modèles, sur toutes les machines, tablettes, téléphones et systèmes d’exploitation, souvent gratuit ou pour quelques euros (éliminez d’emblée ceux qu’on paye par abonnement, vous en devenez le pigeon).  

(*) Certains navigateurs internet remplissent cet office en regroupant dans un menu les nouveautés des sites suivis, mais la solution n’alerte pas l’utilisateur, et semble assez mal maintenue. Par ailleurs, Il existe fort probablement un moyen de créer un lien dynamique vers un blog, quelque part sur la page d’accueil de votre résossossiot préféré. Mais n’ayant aucune science de ces logiciels bouffeurs de cervelle, l’auteur ne vous sera là d’aucun secours. 

Cette solution est si peu connue de l’internaute ordinaire que ce type de logiciel avertisseur n’a pas trouvé de nom simple et évocateur. On l’appelle Lecteur de flux RSS (Really Simple Syndication), parfois Agrégateur de flux, ou Abonnement à des contenus, ou le poétique Lecteur de syndication de contenu au format RSS-XML.
L’encyclopédie Wikipedia en dit "Bref, un moyen idéal de survoler l'actualité lorsqu'on n'a pas le temps de parcourir un site, ou afin de faire un tri parmi les informations qui nous intéressent."

Vous fournissez au logiciel l’adresse des flux d’abonnement (**) des sites que vous souhaitez suivre, et il vous avertira et présentera à tout moment la liste des nouveaux articles. Vous éliminez alors d’un doigt les articles qui vous ennuient et lancez directement la lecture de la dernière chronique de Ce Glob est Plat. Et tout en la cherchant éperdument, parcourant d’un œil distrait les titres récents des médias conventionnels que vous suivez aussi, vous vous serez informés sur le sort de notre planète, et ainsi serez parmi les premiers à savoir si on doit désormais, par rigueur grammaticale, appeler "deuxième" ce qui était hier encore la "seconde" guerre mondiale, ce qui n’est pas un mince avantage.
   
(**) L'adresse du flux RSS n’est pas l’adresse du site. On la trouve en cherchant Flux RSS, ou Feeds sur le site, ou une icône orange ; certains lecteurs de flux la dénichent automatiquement à partir de l’adresse du site. C’est https://ostarc.blogspot.com/feeds/posts/default pour Ce Glob.
 

Mais alors, pensez-vous déjà, pourquoi n’en parle-t-on jamais, si c’est la manière idéale d'être informés seulement de ce qu’on a demandé, sans être pollués par tout ce qui est inutile ?

Vous avez peut-être répondu ! Les médias cherchent à vous vendre tout ce qui vous est inutile, le vent autour des émissions de radio ou de télévision, les publicités surgissantes et les animations qui détournent votre attention sur les pages internet. Or, comme tout système destiné à revoir ou réécouter une émission de télévision ou de radio (replay, podcast), et qui permet d’éviter aisément toutes ces incommodités, les lecteurs de flux RSS savent, soit présenter les articles désinfectés dans leur propre éditeur, soit vous emmener directement à l’article voulu, en esquivant toutes les nuisances et tentations intempestives, comme un service à domicile.  

POUR ALLER PLUS LOIN : Afin de trouver le logiciel avertisseur qui correspondrait à votre idiosyncrasie technique, toutes les questions seront traitées dans les commentaires de la présente page avec les plus parfaites rigueur, objectivité, honnêteté, franchise, et certainement incompétence, car les appareils, systèmes d’exploitation, et logiciels sont nettement plus nombreux qu’à l’époque sacrée de la tour de Babel.

jeudi 14 avril 2022

Les visites de Monsieur G.

Les musées des beaux-arts de province sont bien souvent héritiers des grands "cabinets de curiosités". Ici, dans le musée Unterlinden de Colmar, connu pour héberger l’illustre retable d’Issenheim de Matthias Grünewald, le rayon consacré à la ferblanterie, ustensiles et outillages divers.

Coincés dans l'espace-temps, si en plus, c'est en province... 
(J.M. Gourio, Brèves de comptoir)

À la levée des contraintes sanitaires, on rêvait d’un retour vers les grands musées dans des conditions de visite plus humaines qu’avant la pandémie. Beaucoup d’habitués, notamment les plus âgés et les touristes étrangers, n’ont pas repris leur transhumance culturelle vers Paris, encore terrorisés par la massive campagne d’information sur le virus, disait le discours ambiant. On s’imaginait déjà flânant dans le tranquille Louvre de nos 20 ans, pas à la manière des souvenirs névrotiques d’un Proust dans sa tasse de thé, mais dans la réalité même, en y faisant résonner crânement nos pas dans les longs couloirs vides, pour s’en convaincre.

Mais l’annonce récente de la quantité de visiteurs ayant défilé pendant 6 mois à Paris devant quelques peintures françaises, de peintres qui pullulent déjà dans les musées parisiens, mais provenant ici d’une collection russe exotique - exposition à la mode luxueuse confectionnée par un marchand de sacs à main - cette annonce fait frémir. 9000 visiteurs par jour. Soit une dizaine de personnes agglomérées en permanence devant chaque tableau (*)
Et on nous disait que la reprise était laborieuse ? Pour ces visiteurs, certainement. On a beau savoir ouvertement pipeautés les chiffres de fréquentation des expositions les plus médiatisées, l’ordre de grandeur est tout de même là !
(*) Considérant des journées de 10 heures et des visites de 2 heures par personne (36 secondes par tableau, multipliées par 200)

C’est décidé, on reprendra sagement la route des musées de province. Ils sont souvent déserts (quand ils ne sont pas fermés pour une longue durée). Ils s'efforcent de nous captiver par l'assemblage hétéroclite d'objets résolument inopinés, ils ne regorgent pas de chefs-d’œuvre, mais lorsqu’on en croise un, ils nous laissent le temps d’en savourer sereinement les détails, de s’y fondre le temps qu'il faut. On les aime parce qu'ils classent et rangent pour nous les choses révolues, les souvenirs, et qu'ils nous laissent les visiter au petit bonheur, comme on feuillète un dictionnaire illustré. Bien plus que des musées, ils sont un art de vivre.

Or depuis 2007 Monsieur G., qui a visité pour nous près de 250 de ces musées de province, en a fait modestement mais systématiquement les pages de son blog, devenu indispensable au voyageur sans prétention. Il y détaille, commente et illustre à chaque fois presque tout le contenu du musée. C’est plus agréable, pratique et complet que le site officiel (quand il existe) et beaucoup moins hasardeux que de fouiller la base Joconde du ministère de la Culture (quand elle fonctionne).

Il y manque encore quelques musées, Colmar, Strasbourg, Marseille, Lyon, mais les sites de ces derniers, parfois très estimables, permettront de patienter en attendant que monsieur G. y passe et les scrute.
Il a déjà documenté près du tiers des 768 musées d’art de France. 
3 fois plus que dans l’encyclopédie Wikipedia !  


Mise à jour le 24.01.2025
 
: Monsieur G. ne visitera plus pour nous les musées de Colmar, Strasbourg, Lyon... et tant d'autres villes. Il a disparu 1e 13 aout 2024.



vendredi 25 mars 2022

Ce blog avait deux ans...


Ce blog avait deux ans ! ➊ Et déjà, de la carte,
Faillit être rayé par l’erreur 404 ➋.
Ses liens vers l’extérieur, déjà, en maint endroit
Menaient vers le néant, sans faire ni une ni trois.
Alors pour conjurer cette grippe espagnole
On dut diligenter un contrôle bénévole.
À des juges savants, certes dignes de foi,
On confia la gageüre. Ils restèrent sans voix ;
D’un billet de douze ans, sur dix liens éphémères,
Il n’en restait pas un, conclusion douce-amère,
Pas un pour retrouver sa voie dans le réseau.

Si la neurologie nous dit que le cerveau
Efface le passé pour toujours le revivre,
Permanent palimpseste ➌, d’internet, le grand livre,
Le Ouèbe, quoi ! — 
            Lui aussi, s’oublie, jour après jour,
Se consomme et se chie, tel le topinambour ➍.
Comment ne pas avoir foi en l’instantané
Et sur l’éternité sans fin ratiociner,
Quand l’électricité peut faillir - n’est-ce pas ?
- Et faire passer tout ça de la vie au trépas ? 
 
Hugo Victor, dans Les Pages d'automne


***
 Hugolisme oulipien, Oulipisme Hugolien, ce poème est la reprise presque exacte (pour les rimes, la ponctuation, et si possible le champ lexical et la sublime inspiration) du poème original (reproduit en bas de page)écrit par Hugo en 1831, premier d'un recueil qui s'appelait alors "Les feuilles d'automne". Les spécialistes s’interrogent encore sur l’auteur(e) de la présente version du poème et du changement de titre en "Pages d'automne". Hugo aurait-il, la relisant sur ses vieux jours, trouvé cette rédaction de jeunesse lourde et sentimentale ? C’est plausible
L’illustration est de Carl Spitzweg (c. 1850, version du musée de Milwaukee).
➋ Fichier non trouvé, page inexistante.
➌ Manuscrit effacé et réinscrit plusieurs fois. Les travaux récents sur le cerveau et la conscience montrent que la mémoire ne fonctionne pas comme le pensaient les vieilles conceptions d’il y a 100 ans, voire 50 ans. Ce n’est pas un endroit mystérieux où une conscience irait (ou craindrait d’aller) chercher des choses enfouies.
Le cerveau est plat, sans aucune profondeur dans le temps, n’a qu’un seul état, celui du présent, qu’il constitue à chaque instant et modifie en fonction des sensations du moment. Tout souvenir est une reconstitution complète.
Nick Chater écrit dans Et si le cerveau était bête ? (The Mind is Flat - The Illusion of Mental Depth and the Improvised Mind, 2018) « Croyances, motivations et autres habitants imaginaires de notre subconscient sont de pures inventions. […] L’esprit est, à l’inverse, un improvisateur de talent. Il invente des actions, des croyances et des désirs pour justifier ces mêmes actions avec une facilité déconcertante. Mais ces inventions passagères sont fragiles, fragmentaires et contradictoires. Elles ressemblent à un décor de cinéma qui paraît solide dans un plan de caméra, alors qu’en réalité il ne s’agit que d’une façade en carton
On présente souvent les travaux de Chater comme une approche révolutionnaire, mais c’est pour vendre son livre, car toutes les découvertes scientifiques qui appuient ses idées modifient déjà depuis un moment les conceptions des neurosciences. Évidemment il sera encore controversé - comme l’a été Spinoza - tant que les inventeurs des vieilles lunes vivront encore de leurs fables.
➍ Tubercule nourrissant comme la pomme de terre. 

***
Ce siècle avait deux ans ! Rome remplaçait Sparte,
Déjà Napoléon perçait sous Bonaparte,
Et du premier consul, déjà, par maint endroit,
Le front de l’empereur brisait le masque étroit.
Alors dans Besançon, vieille ville espagnole,
Jeté comme la graine au gré de l’air qui vole,
Naquit d’un sang breton et lorrain à la fois
Un enfant sans couleur, sans regard et sans voix ;
Si débile qu’il fut, ainsi qu’une chimère,
Abandonné de tous, excepté de sa mère,
Et que son cou ployé comme un frêle roseau
Fit faire en même temps sa bière et son berceau.
Cet enfant que la vie effaçait de son livre,
Et qui n’avait pas même un lendemain à vivre,
C’est moi. —
Je vous dirai peut-être quelque jour
Quel lait pur, que de soins, que de vœux, que d’amour,
Prodigués pour ma vie en naissant condamnée,
M’ont fait deux fois l’enfant de ma mère obstinée,
Ange qui sur trois fils attachés à ses pas
Épandait son amour et ne mesurait pas !

samedi 6 novembre 2021

Il n’y a plus d’Antidote (billet d’humeur)

Distributeur de sodas dans un monde sans dictionnaire (c'est assez terrifiant), Demeure du chaos, 2015.
 
Il est malheureux, pour un blog considéré en moyenne par 100 à 200 visites hebdomadaires (1), de perdre du jour au lendemain sa principale source d’inspiration, un bon dictionnaire, et pour un motif certes classique, mais vulgaire, la cupidité ! 

(1) Les statistiques de Gougueule déclarent 630 visites par chronique, mais étalées sur 15 ans. Et doit-on croire des chiffres fournis par l’entreprise qui en est la première bénéficiaire, et qui envoie systématiquement dans le piège sa cohorte de robots de surveillance et parfois un internaute égaré, qui presse immédiatement, éberlué, le bouton de retour en arrière ?

Un peu de technique pour les profanes. 
Pour être agréable à lire, un texte doit être fluide comme la pensée, mais plus précis qu’elle, qui cahote généralement dans une mare de confusion. Il faut, dans ce but, la figer dans le mot exact, qui aura bien entendu un sens différent à la lecture de chacun, mais on n’y peut rien. 

Le vieux Boileau peut toujours affirmer fièrement, au vers 153 de son art poétique, « Ce que l’on conçoit bien s’énonce clairement », pour l’auteur d’un blog qui ne dispose que d’un cerveau moyen de 1300 grammes tout mouillé et dont la rumeur dit qu’il n’en utilise que 130, les outils informatiques, qui apportent instantanément orthographe, synonymes, antonymes, définition, genre, citations et conseils grammaticaux, sont vitaux. 

Antidote, outil linguistique produit par les Canadiens (2), était le couteau suisse de ce blog depuis presque 10 années. Les adeptes comprendront pourquoi. 

(2) Les Canadiens du Québec, peut-être parce qu’il sont menacés de l’intérieur par l'anglais, défendent mieux la langue française que les grands classiques français, Robert ou Larousse, dont l’offre numérique est indigente (à l’exception du CNRTL, mais qui aurait besoin d’un bon renouvèlement).
  
Or à l’instar de Photoshop, puis de la suite Microsoft, et maintenant de la plupart des logiciels à qui la réussite financière a montré le début d’un orteil, Antidote change aujourd’hui de modèle économique. 
Afin de racler définitivement les phynances du brave blogueur bénévole, il cesse de maintenir le dictionnaire acheté (et qui mourra doucement d’obsolescence en peu d’années, ou quelques mois) et le transforme en un rutilant droit d’utilisation du logiciel (3), payé par un abonnement à prélèvement, renouvellement et résiliation automatiques.

(3) Cette année, Antidote supprime le logiciel sans abonnement sur les téléphones et tablettes seulement, pas encore sur ordinateur (où subsiste l’achat de la mise à jour en option). 
Vous trouverez la description des avantages de ce nouveau modèle économique abusif et totalement déséquilibré dans notre chronique de 2013, Légère retouche au modèle, à propos de Photoshop.  

5 euros par mois ! Un détail, direz-vous. Mais un détail de plus. C’est ainsi qu’on tolère sans le remarquer, jour après jour, le resserrement des chaines de notre propre captivité.
Écoutons plutôt Étienne de la Boétie et abandonnons rondement ce dictionnaire pour un autre, peut-être moins agréable, moins commode, mais notre indépendance vaut bien ce petit effort, sans quoi Ce Glob serait vite contaminé par l’anarchie ; la faute d’orthographe, la pauvreté des épithètes, les clichés de langage, les barbarismes y pulluleraient.

Et à cela, à l’image du sort inéluctable du climat de la Planète, il n’y aurait plus la moindre antidote.

mercredi 1 janvier 2020

Billet suisse

En hommage à Étienne Dumont, trois activités sur le lac Léman par François Bocion (1828-1890), vrai peintre suisse. La pêche, la promenade vespérale et le dragage. La pêche vient de changer de main pour 41 000 euros à Niort.


Vous rêviez d’une information à jour, sérieuse et documentée sur les expositions, les musées, le monde de l’art, mais filtrée par un regard critique qui ferait preuve d’une certaine hauteur de vue et d’indépendance d’esprit ?

Ne cherchez plus. On ne trouve ça qu’en Suisse. C’est le blog d’Étienne Dumont, journaliste retraité, hébergé sur le site de Bilan.ch.
Un ou deux billets tous les jours, centrés sur la Suisse, certes, mais avec beaucoup d’actualités françaises, et aussi italiennes, allemandes, anglaises. Dumont voyage beaucoup.

Toujours érudit mais concis, ironique mais limpide. Essayez son billet récent sur la non-vente du panneau de Cimabue, par exemple.

Cimabue [prononcé Tchi ma bouée] est le grand-père de la peinture de la Renaissance en Italie. Alors quand on déniche une des ses œuvres, ce qui est rarissime, c’est dans le grenier ou la cuisine d’une vieille dame qui la prenait pour une icône byzantine sans valeur sur laquelle le petit neveu s’entrainait aux fléchettes.
C’est ce qui vient d’arriver à Compiègne. Disputée aux enchères jusqu’à 24 millions d’euros, la réalisation de la vente est suspendue à une préemption de l’État français qui a deux ans et demi pour réunir la somme ou se désister.
En attendant les héritiers de la vieille dame, modestes, devront régler plus de 100 000 euros d’assurance annuelle et peut-être quelques millions au fisc.

Lire les détails de cette aventure croquignolesque sous la plume d’Étienne Dumont est un plaisir. Il est étonnant qu’un site Suisse qui traite d’économie diffuse ces petits joyaux quotidiens sans les enfermer au fond d’un coffre réservé aux abonnés payants. Ça viendra certainement.

En attendant profitons-en.

Pratique : la Suisse n'a pas encore découvert les flux RSS (Réellement Simple Syndication), et l'abonnement par e-mail aux blogs d'opinion de Bilan.ch incluant les billets de Dumont, Newsletter, ne fonctionne pas, ce qui oblige à visiter cette adresse du blog tous les jours !

vendredi 27 décembre 2019

Passons, passons...

Passons, passons puisque tout passe
Je me retournerai souvent
Guillaume Apollinaire (Cors de chasse, dans Alcools)
Ici s'élève un grand débat entre la science et le vulgaire. La science prétend que les hommes sont répandus sur le pourtour de la terre, qu'ils ont les pieds à l'opposite les uns des autres, que partout le ciel est également sur leurs têtes, et que partout le point de la terre foulé par les pieds de ses habitants est le centre pour chacun. Le vulgaire demande pourquoi les hommes placés à l'opposite ne tombent pas : comme s'il n'était pas facile de répondre qu'eux aussi ont le droit de s'étonner que nous ne tombions pas ! Il y a une opinion intermédiaire, et que la foule si indocile trouve probable : c'est que le globe est inégal, semblable pour la figure à une pomme de pin, et que la terre est habitée tout autour de cette espèce de cône. 
Pline l’ancien, Histoire naturelle, Livre 2, (an 77 de l’ère actuelle)

Visiteur, qui pose pour la première fois ton regard sur ce blog, sache que tu arrives dans un endroit peu fréquentable (et d’ailleurs très peu fréquenté). Sous une apparence austère parfois attrayante, tu constateras qu’il peine à respecter les valeurs dites sacro-saintes, les nations, les drapeaux, les religions, les institutions.
Tu noteras qu’il méprise les souverains affublés d’un numéro, en l’écrivant en chiffres arabes, qu’il ne fête pas les dates anniversaires des grands hommes, ni des grandes femmes, qu’il informe sur les expositions généralement après leur fermeture, et surtout, qu’il escamote l’accent circonflexe sur les mots aout, gout, abime ou maitre.

Bref, tu abordes un blog inconvenant.
Si, en dépit de cet avertissement, tu as décidé de poursuivre, apprends qu’il va faire, sous tes yeux, un pas supplémentaire dans l’ignominie et piétiner ses principes en célébrant son propre anniversaire.


Le 27 décembre 2006, dans un premier billet balourd mais déjà assoiffé de vérités scientifiques et… disons artistiques, le blog réclamait des images, que jamais il n’obtint, du verso d’une admirable statue d’Arsinoë 2, qui venait de sortir des eaux de Canope, ville engloutie près d’Alexandrie dans la baie d’Aboukir. Elle gisait là parmi d’autres débris dans un dépotoir à statues dont la religion était périmée, sauvée d’un recyclage moins noble par l’engloutissement de la cité.
Toutes ses représentations, sur internet et dans la presse, la montraient de face, de trois-quart, très rarement de profil, et jamais de dos. Personne depuis n’a proposé de dévoiler ce secret.

Tu penses certainement, visiteur, que le titre du blog comporte déjà une faute d’orthographe et une ambigüité, soit une inversion de lettres s’il entend écrire le mot blog, et dans ce cas ce serait un anglicisme inélégant, soit une faute d’orthographe s’il veut parler de la Terre, hypothèse plausible à la vue de l’illustration du bandeau de titre.

L’équivoque était délibérée.
À un blog ambitieux, il fallait des lecteurs susceptibles d’accepter n’importe quoi. Et c’est dans les exclus, dont on entendait déjà que l’internet et les réseaux sociaux étaient envahis, chez ceux qui souffrent d’être dévalorisés, socialement, affectivement, et qui sont prêts à adhérer à n’importe quelle explication qui ne serait pas celle de la société qui les ignore, que le blog pensait trouver des lecteurs.

Les adeptes de la Terre plate étaient parmi les mieux inspirés. Leur refus pathologique d’accepter la réalité quand elle ne coïncide pas avec leur vision du monde a quelque chose de Don Quichotte, leur opiniâtreté à réécrire autrement les règles les plus élémentaires de la science a tout de la poésie pataphysique et des prémices d’une grande religion. À n’en pas douter, c’était l’avenir.

Un sondage fameux et très respectable, réalisé avec beaucoup de sérieux, de mathématiques, et de biais de toutes sortes par l’Ifop a largement confirmé ce choix depuis.
Il se proposait, souvenons-nous, de mesurer la croyance des Français dans les grands mensonges supposés manipulés par les pouvoirs occultes des sociétés secrètes ou des gouvernements corrompus. Pour donner un exemple de la qualité des questions imaginées par l’Ifop, parmi les complots proposés (liste p.99), étant sous-entendu que tous sont faux, la question suivante était posée « Êtes-vous d’accord ou pas avec l’affirmation que Dieu a créé l’homme et la Terre il y a moins de 10 000 ans ? », et 18% des sondés y répondaient positivement.
Vous noterez que ceux qui pensent qu’un dieu à créé l’ensemble il y a plus de 10 000 ans, hélas nombreux, ne pouvaient pas se prononcer, ni ceux, rares sans doute, qui pensent que tout cela s’est créé sans aide extérieure il y a moins de 10 000 ans. On mesure là toute la finesse de la méthode.

La question qui regarde le blog était plus claire « Êtes-vous d’accord ou pas avec l’affirmation qu’il est possible que la Terre soit plate et non pas ronde comme on nous le dit depuis l’école ? »
9% des sondés ont répondu positivement. Ce qui fait beaucoup de lecteurs potentiels.
Hélas, le sondage lui-même était noyauté par les servants d'un vaste complot mondial, car en 13 ans de chroniques d’une régularité astronomique, aucun adepte de la Terre plate n’a jamais pris contact ni laissé un commentaire sur le blog. Pas un lecteur de plus. Les spécialistes pensent aujourd'hui qu’il n’y a en réalité que quelques milliers de fidèles, et essentiellement aux États-Unis (Flat Earth Society).

Pourtant le blog avait concocté une documentation pointue destinée à soutenir les adeptes de la planéité, et déniché à l’appui de leurs certitudes le témoignage inestimable d’Augustin d’Hippone, le fameux Saint Augustin, lointain héritier des chimères de l’imputrescible Platon, et le plus grand penseur du christianisme. Il écrivait dans La cité de Dieu (16-9) au début du 4ème siècle :
« Quant à leur fabuleuse opinion qu’il y a des antipodes, c’est-à-dire des hommes dont les pieds sont opposés aux nôtres et qui habitent cette partie de la terre où le soleil se lève quand il se couche pour nous, il n’y a aucune raison d’y croire. Aussi ne l’avancent-ils sur le rapport d’aucun témoignage historique, mais sur des conjectures et des raisonnements, parce que, disent-ils, la terre étant ronde, est suspendue entre les deux côtés de la voûte céleste, la partie qui est sous nos pieds, placée dans les mêmes conditions de température, ne peut pas être sans habitants. Mais quand on montrerait que la terre est ronde, il ne s’ensuivrait pas que la partie qui nous est opposée ne fût point couverte d’eau. D’ailleurs, ne le serait-elle pas, quelle nécessité qu’elle fût habitée, puisque, d’un côté, l’Écriture ne peut mentir, et que, de l’autre, il y a trop d’absurdité à dire que les hommes aient traversé une si vaste étendue de mer pour aller peupler cette autre partie du monde. »
On comprend aisément qu'un argumentaire aussi robuste ait pu influencer plus de 1000 ans de science en Occident ! D’ailleurs Augustin mériterait d’être le parrain de ce blog. Car il ne faut pas blâmer les apôtres de la Terre plate. À leur manière, excentrique et malhabile, ils essaient de refaire l’histoire de la science. Les aurait-elle écoutés, l’espèce humaine n’aurait peut-être jamais réussi à transformer ce petit caillou, fut-il plat ou globuleux, en enfer.

Un autre échec de l’histoire du blog, parmi tant d’autres, fut la recherche pathétique du nom d’un sculpteur dont la signature peu lisible est gravée sur la statue d’une fillette assise sur une tombe, dans le cimetière monumental de Milan, en Italie du nord.
Pas la moindre proposition depuis 10 ans. Effrayant silence des espaces infinis de l’internet !

Mais ne nous attardons pas sur ces revers, et réjouissons-nous, puisque cette chronique célèbre un anniversaire. Voici une surprise, en vidéo. Elle dure 4 minutes. Le commentaire n’est qu’en anglais, mais à une minute et 13 secondes, vous verrez qu’on peut se passer de tout commentaire. Elle a été filmée en novembre 2016 au British Museum, à Londres, mais aurait pu l’être à Saint Louis, dans le Missouri, au printemps 2018 (à 15min.20) ou à l’Institut du monde Arabe de Paris, fin 2015 (à 20min.57) ou peut-être de retour au musée des antiquités de la Bibliotheca Alexandrina d’Alexandrie, en Égypte, qui sait ?


Enfin rappelons aux lecteurs de tout genre qu’une petite zone de saisie « Rechercher dans ce blog » permet d’y trouver n’importe quel mot incongru et de flâner parmi 680 chroniques richement illustrées, qui peuvent être lues avec des années de retard sans que la constance de leur futilité encyclopédique n’en pâlisse. Ils y dénicheront des informations insoupçonnées et inactuelles sur la peinture, le droit d'auteur et les cimetières, et sur toutes sortes d’animaux et de végétaux, éléphants, autobus, Tati, Kubrick, et même Mozart (mais que les inconditionnels de la planéité ou de la platitude ne cherchent pas les mots Terre ou globe, ils en ressentiraient sans doute de l’amertume).

mercredi 11 juillet 2018

Un cadeau ducal (1 de 2)

Noël approche (affirmation destinée à éprouver les détecteurs de « fake news »), avec son rituel de cadeaux désintéressés et de bonheur du commerçant. Respectueux des coutumes et de leurs usagers, Ce Glob est Plat a souhaité offrir un présent inestimable à ses lecteurs.
Et qu'y a-t-il de plus inestimable que le manuscrit enluminé sur parchemin des Très riches heures du duc de Berry, œuvre unique réalisée entre 1410 et 1489 et conservée au musée Condé, dans le château de Chantilly ?

À dire vrai, Ce Glob est Plat qui divertit régulièrement, depuis 12 ans et 600 chroniques, pas loin de 30 lecteurs, n’offrira pas l’original, le partage aurait créé des chicaneries, mais une magnifique reproduction électronique en facsimilé du manuscrit complet, quatre fois plus grand que nature, indestructible, aisé à feuilleter, et sans copyright.

400 pages qui foisonnent de lettrines historiées, d’illustrations lumineuses, fantastiques (ci-contre la marge du folio 038v), et de 66 enluminures en pleine page minutieusement peintes, au pinceau à 3 poils, d’abord par les trois Frères Limbourg, puis peut-être, disent certains, par Barthélémy d’Eyck (illustrateur de l’autre plus beau manuscrit du monde, Le cœur d’amour épris pour René d’Anjou), et enfin par Jean Colombe.


Pareil présent est-il concevable ? Vous doutez, vous pensez qu’on se joue de votre crédulité, vous préparez déjà les attendus d’une dénonciation circonstanciée aux revues de défense des consommateurs.
Ah méritez-vous pareil cadeau ? Votre méfiance est désobligeante. Vous faut-il des preuves ?

Un détail fripon du folio 002v peut-être ?

Un détail du folio 006v ?

Non, du folio 010v, le plus beau ?

Du folio 064v peut-être ?

Ou du folio 142v ?

Mais, il fait nuit, il est déjà si tard ! Nous continuerons un jour prochain, alors...

dimanche 13 décembre 2015

Illustration cherche auteur


Le pillage des illustrations de sites ou de blogs est devenu la règle sur internet, et les journaux et télévisions sont les premiers à se servir. C’est très bien. Plus une image est diffusée et vue plus elle fera connaitre son auteur.
Et il faut être particulièrement imbécile pour interdire, comme certains musées ou artistes, la reproduction (non commerciale, au moins) d’images de leurs œuvres. D’ailleurs l’interdiction ne sert à rien sur un internet planétaire aujourd’hui incontrôlable.

Mais il est désolant de constater que cette razzia se fait presque systématiquement en omettant de citer le nom de l’auteur de l’image.

Ainsi le dessin anonyme ci-dessus, astucieux, a été abondamment exploité sur internet pour illustrer les vertus de l’esprit critique et les manipulations des médias.
Les moteurs de recherche d’images en trouvent au moins 500 apparitions, Brésil, Turquie, Russie, Japon, dans les blogs, les réseaux sociaux. Mais aucune ne renseigne sur le nom de l’auteur. Il illustre même La couverture d’un livre, « Rethinking Srebrenica », dont l’éditeur new-yorkais avoue en page 3 avoir échoué à retrouver l’auteur du dessin.

La chasse est ouverte (et l’usurpation toujours possible).
 

dimanche 21 avril 2013

Des traces de Fred



Le plus rigoureux journalisme d'investigation, voilà l'objectif éminent que poursuit un blog respectable. Et ce n'est pas dans la relation d'évènements déjà claironnés par l'ensemble de la presse couverte de réclames qu'un blog se distinguera, mais dans l'exposition de faits qu'emportés par la fébrile révolution de la planète personne n'aura remarqués.
Ainsi le reporter de Ce Glob est Plat, de passage dans la capitale, n'a pas hésité à braver les frimas et manipuler son téléphone à tout faire pour prouver, photo à l'appui, que le monde de Frédéric Othon Théodore Aristidès s'insinuait discrètement dans la réalité.

Tout a été dit de Frédéric Othon Théodore Aristidès, appelé couramment Fred, auteur de bandes dessinées, de sa logique de l'absurde, de ses mondes originaux comme celui de Lewis Carroll, de sa vie dépressive. Il est mort le 2 avril dernier.
On pense toujours que l'univers d'un auteur disparait avec lui. Notre illustration démontrera qu'il peut modifier non seulement notre manière de voir la réalité après lui, mais certainement la réalité même.

Comment expliquer sans cela que la Mairie de Paris ait parsemé ses jardins publics (ici le parc André Citroën) d'affichettes priant quelque mystérieux personnage de ne pas enlever des parties d'édifices publics, ici un escalier, là-bas un jet d'eau, plus loin une serre ? Et quelle est cette forme dissimulée au sommet du ballon captif ? Serait-ce le voleur d'édifices publics ?

Les lecteurs plus âgés objecteront que le phénomène s'apparente moins aux facéties du dessinateur Fred qu'aux mémorables méfaits de l'ignoble Furax, qui, au dire de Pierre Dac et Francis Blanche, remplaça voilà plus de 50 ans les grands monuments français par des imitations de carton-pâte.

N'entrons pas dans ce débat d'experts. Le rôle d'un blog est avant tout d'exposer les faits, dussent-ils ne pas coïncider exactement avec la rationalité la plus commune.

vendredi 29 mars 2013

Rebondissements

Tout va trop vite. La météo est si glaciale que l'équinoxe est passé sans se faire remarquer, et le printemps est là, quelque part, incognito. Cependant les évènements, indifférents aux conditions climatiques, continuent de se produire.
Habituellement, lorsqu'un évènement, une péripétie, vient enrichir ou infirmer le contenu d'une chronique passée du blog, un additif est aussitôt apporté, daté, à ladite chronique, sans qu'hélas l'abonné fidèle en soit prévenu autrement que par l'ajout du mot clef « Mise à jour ». (Existe-t-il un moyen de l'alerter ?)

Parfois ces rebondissements se précipitent en giboulée, comme en cette fin de mars.

Les serres d'Auteuil et leur jardin botanique, partiellement classés comme monuments historiques, et que le Maire de Paris cherche à brader au profit de la Fédération Française de Tennis pour agrandir le complexe de Rolland Garros, ont obtenu un sursis.
Le Tribunal Administratif de Paris vient d'annuler la décision de la ville. Le juge a considéré que certains éléments du dossier ont été négligemment dissimulés aux conseillers de la ville, et que le montant de la redevance due par la Fédération en échange de l'occupation du terrain pendant un siècle était curieusement bas.
La convention entre les parties doit être résiliée.

Mise à jour du 10 juin 2015 : après maints rebondissements et péripéties, la Mairesse de la ville de Paris, fortement appuyée par le Premier Ministre du moment et contre l'avis du Conseil de Paris, vient de signer les permis de construire lançant la destruction d'une partie des serres d'Auteuil au profit de la Fédération Française de Tennis et de son projet d'extension du stade de Rolland Garros.

Pendant ce temps aux antipodes, le maire de la ville de Namie, sept kilomètres au nord de la centrale nucléaire de Fukushima, dévastée par le tsunami le 11 mars 2011 puis abandonnée pour des siècles, a demandé que Google Street View envoie une voiture sans chauffeur sillonner la zone irradiée.
Ainsi ses 20 000 administrés déportés peuvent-ils se promener virtuellement dans les lieux où ils ont vécu et qu'ils ne reverront sans doute jamais, comme on feuillette des photos de vacances.

Namie, près de la centrale nucléaire de Fukushima, la banlieue de la ville morte est visitée par les voitures sans chauffeur de Google Street View.

Quant au sort de la jeune femme qui avait graffité (sans dommage) un coin du tableau « la Liberté... » de Delacroix, il devient de plus en plus sombre. Son patronyme commence par la lettre K comme le héros malheureux du roman de Kafka, le Procès.
Internée depuis bientôt deux mois dans l'hôpital psychiatrique de Saint-Venant, elle a la malchance de bénéficier d'une loi du 5 juillet 2011, alors très décriée, qui facilite la prolongation des internements arbitraires de personnes sans leur consentement (version démocratique du goulag).
Tous les recours lui ont été refusés. Aucune visite n'est autorisée, même familiale. Pire, malgré cet internement, le procureur de Béthune cherche à la faire déclarer pénalement responsable, ce qui serait un comble et certainement une victoire pour la Liberté.
Un comité de soutien de cette pauvresse s'est constitué. Il faut lire son point de vue qui se distingue par son calme des hurlements de la meute.

Et puis le score en visiteurs de l'exposition Dalí à Beaubourg est tombé. 790 000.
Il bat Edward Hopper d'une moustache. Hopper avait fait 784 000. Mais le Dalí de 2013 ne bat pas le Dalí de 1979 qui avait fait 840 000. Les contraintes de sécurité à l'époque étaient laxistes prétendent les organisateurs. Monet reste au sommet du podium avec ses 913 000.
Rappelons que ces scores ne reflètent pas la qualité des artistes ni des expositions mais sont la conséquence quasi directe du niveau de dépenses affectées au bourrage de crâne médiatique.

Enfin, qui aura aimé l'étrange tableau de Jacob Vrel (ou Vreel, ou Frell) présenté avec la collection Lugt au printemps 2012 aurait tout intérêt à se rendre à l'hôtel des ventes, 9 rue Drouot à Paris, très précisément le 9 avril entre 11h et 18h, ou le 10 entre 11h et 12h.
Le cabinet Fraysse et associés y expose avant la vente aux enchères de 14h, parmi la succession de Monsieur J.L., une rareté de Vrel, voisine du tableau de la collection Lugt.
Une femme en noir lit au centre d'une pièce vide. Au fond, derrière les carreaux sombres de la fenêtre, on distingue le visage fantomatique d'un enfant qui observe l'intérieur.
Estimé autour de 100 000 euros, c'est peut-être l'unique occasion de le voir, s'il est acheté par un particulier. En France, seul le Palais des beaux-arts de Lille expose un tableau de Jacob Vrel.

Mise à jour du 15 avril 2013 : estimé entre 80 000 et 120 000 euros, il a atteint 2 232 000 euros ! (1 800 000 aux enchères, plus la commission de 20% pour le commissaire-priseur qui avait si bien estimé la valeur du tableau et 4% de taxes diverses).

Détail du tableau de Jacob Vrel aux enchères du 10 avril à Drouot.

dimanche 26 août 2012

Schnackenberg, biographie

Walter Schnackenberg, affichiste, décorateur, graphiste

2 mai 1880, Bad Lauterberg, Basse-Saxe, Allemagne 
10 janvier 1961, Rosenheim, Haute-Bavière, Allemagne

La renommée tient à peu de choses. Walter Schnackenberg portait un nom qu'on ne peut écrire sans erreur, ni mémoriser aisément. Il était cependant, de 1910 à la montée du Nazisme, une personnalité connue dans le milieu culturel et mondain de Munich qui irradiait alors toute l'Europe artistique, après les Sécessions de 1892 et de 1900, naissances de l'Art Nouveau (Jugendstil) et de l'abstraction.

Il y a deux périodes dans l'art de Schnackenberg. Avant la 2ème guerre c'est un graphiste brillant, admirateur de Toulouse-Lautrec, qui déploie avec talent un style sinueux et décoratif. Affiches, costumes et décors de théâtre. Il dessine aussi parfois dans des publications comme la célébrissime revue satirique Simplicissimus, où il rencontre certainement George Grosz et Alfred Kubin, sans que leur forte personnalité sombre et sarcastique ne le détourne alors de ses dispositions à la frivolité. 

Après la guerre, Schnackenberg a 65 ans. La Belle Époque est loin. Un miteux aquarelliste autrichien qui s'est métamorphosé en despote bavarois puis en tyran sanguinaire a détruit l'Europe entière. Les dessins de Schnackenberg ne seront plus comme avant. Ses personnages aux lignes souples, dynamiques et équilibrées qui avaient peuplé les affiches et les boulevards se transforment en chimères molles et vaguement humaines, en spectres qui se tortillent dans des décors instables, sur de grandes feuilles peintes à l'encre et à l'aquarelle. On y sent, après tant d'années, l'empreinte irréelle et macabre d'Alfred Kubin

Mosaïque de dessins à la plume et l'aquarelle, faits par Walter Schnackenberg entre 1947 et 1961.

Un descendant de Schnackenberg a créé récemment un site dédié à sa mémoire, en allemand, mal organisé et pauvre en images.
On ne trouve de reproductions acceptables sur internet que dans le blog 50 Watts (anciennement A journey round my skull), alimenté par un fou de littérature, de livres et d'illustrations, fouilleur de brocantes et de sites spécialisés.

Parfois quelques originaux arrivent en salle des ventes, peut-être cinq ou six par an, essentiellement en Allemagne, un peu en Suisse ou à Londres, fréquemment invendus semble-t-il, malgré des estimations de prix relativement modestes (5000 euros en 2006 pour une extraordinaire aquarelle comme celles qui sont assemblées dans l'illustration).
Chacun sait que c'est la renommée de l'artiste, plus que la qualité objective de son œuvre, qui fait sa valeur marchande.
Et Schnackenberg est à peu près inconnu.