samedi 16 mars 2019

Lyon, 1 - Paris, 0



Si un jour les bigorneaux, grands vainqueurs de l’évolution, parviennent à relire les mémoires numériques abandonnées par les humains, et écrivent leur propre histoire de cette région désormais marécageuse qu’aura été la France, il ne fait pas de doute qu’ils relègueront le musée du Louvre au rang de sous-musée de province, et élèveront celui des beaux-arts de Lyon au niveau des plus grands de la planète.

Car le musée de Lyon vient de mettre en ligne des reproductions gigantesques d’une partie de sa collection (52 peintures et un ivoire sculpté), avec un objectif simple, affiché en exergue « la mission de tout musée est de mettre en valeur les collections et les rendre accessibles au plus grand nombre ».
Rappelons qu’à la grande époque de l’anthropocène, le musée de Lyon recevait 30 fois moins de visiteurs que le musée parisien.

52 numéros sur les 5800 du catalogue en ligne du musée, on notera qu’il manque encore quelques œuvres importantes, Zurbaran, Cagnacci, Stella, Bonnard, Bacon, les sculptures de Houdon, Chinard ou Rosso, et les couleurs sont parfois - rarement - ratées (le Rembrandt n’est pas du tout jaune orangé), mais on espère le succès de l’opération, afin que des tas d’autres musées, asticotés, se lancent dans l’expérience.

En illustrations, quelques détails de tableaux du musée des beaux-arts de Lyon, Miereveld, Monet, Dagnan-Bouveret, Metsys.
 
 
 

9 commentaires :

Anonyme a dit…

Votre blog est une magnifique mine d'informations et un excellent stimulant intellectuel.
Je fouille de temps en temps dans vos archives pour en extraire des pépites. Un régal. Votre générosité, votre hauteur de vue, votre ironie* à l'égard des institutions et, en même temps, votre capacité quasi enfantine à parfois vous émerveiller devant quelques bidules, tout cela force le respect. Félicitations. Et surtout : Merci !


pi

* Ironie se teintant çà et là d'un soupçon d'aigreur ?

Costar a dit…

C'est moi qui vous remercie. Votre enthousiasme, bien que quasi unique, est toujours réconfortant.

Si ce que vous appelez un soupçon d'aigreur envers les institutions vise, je le soupçonne, mes railleries obsessionnelles à l'égard du Louvre, je vous autorise à les qualifier même d'évidente amertume. Leur gestion catastrophique et commerciale à l'extrême de notre patrimoine (et toujours par les abus de pouvoir de quelques individus) me révolte chaque jour un peu plus.
Par exemple, depuis le chaos indescriptible de l'organisation de l'exposition Vermeer, on ne peut plus, venant de province, visiter le musée qu'à la façon d'une visite chez le docteur, et on doit en achetant le billet, préciser à une demi-heure près l'heure exacte de notre visite. Ce qui se comprend, à la limite, pour une exposition "évènement", mais pas pour visiter des salles presque vides comme le sont la plupart des étages du musée.

Allons bon, voilà que je m'emporte encore.

Anonyme a dit…

Je partage votre colère. Je suis même plus extrémiste que vous puisqu'il y a belle lurette que je ne mets plus les pieds dans les grands musées et les "expos-événements", incapable que je suis devenu de faire la queue plus de deux minutes et quatorze secondes et d'avoir plus de zéro personne regardant la même chose que moi au même moment... Ce qui, je vous le concède, restreint considérablement mon horizon culturel.
Quant à votre blog, il est anormal, avec un tel contenu, qu'il soit si confidentiel. Faites-vous connaître, bon sang ! C'est une mine de diamants, ce truc !

pi

Costar a dit…

Heureux mortel ! Vous avez réussi à vous désintoxiquer.
Trop faible, j'étais hier encore à l'étage du 17ème siècle français, entre autre pour préparer une chronique à venir sur Lubin Baugin. Et j'étais, dès l'arrivée, indigné en découvrant que les deux plus belles natures mortes de la peinture française sont aujourd'hui au fond d'une vitrine derrière deux épaisseurs de verres et éclairées par une petite ampoule au tungstène jaunâtre qui noie toutes les nuances de couleur.

Quant à la question de la confidentialité du blog, je pense qu'il n'y a rien à faire. Il est l'expression d'une totale liberté et son style et les sujets traités n'intéressent que quelques centaines de personnes, au mieux.
J'ai fait une petite expérience amusante qui allait dans le sens de votre remarque, voilà deux ans. Au moment du maximum d'incurie du Louvre que représentait la désorganisation de l'exposition Vermeer, j'ai écrit une chronique et dans la foulée un message sur Twitter (je n'y publie habituellement que pour prévenir de la mise en ligne d'un nouveau de mes tableaux - et personne n'y répond jamais), message que j'ai transmis à M. Hasquenoph du site LouvrePourTous, qui avait parfois (rarement maintenant) publié des articles sérieux sur le musée. Il a lu ma chronique, qui l'a probablement intéressé puisqu'il a twitté alors un lien vers elle. En 2 jours, le nombre de lectures de cette chronique est passé de 50 à 2000.
Que croyez-vous qu'il advint par la suite ?
Eh bien rien. Dès la chronique suivante reprenait le ronronnement de mes 30 à 50 lecteurs hebdomadaires.
Alors que faudrait-il faire de plus ?

Anonyme a dit…

J'aime énormément Baugin, dont je vais souvent admirer le petit "Saint Jérôme" du MBA de Caen... où l'on n'est guère bousculé, croyez-moi ! J'attends donc votre chronique avec gourmandise.
D'ailleurs, auriez-vous le moyen de me dégotter une bonne reproduction de la Nature morte à l'échiquier du Louvre ? La seule que j'aie pu trouver semble scannée dans un livre. C'est tout juste si l'on ne voit pas la trame !
Et puisque vous m'avez à la bonne, j'en profite sans vergogne : Je recherche tout aussi avidement une bonne reproduction du Philosophe en méditation de Rembrandt (toujours au Louvre). Si vous avez un tuyau, je suis preneur. Merci d'avance.

Pour revenir à vos chroniques, je pense que vous devriez les proposer à la publication dans des magazines. Pas forcément des magazines d'art, d'ailleurs. Je vous verrai bien aussi dans Les Inrocks, Marianne, Le Point, Politis, Fakir, Causette ou même Rock'n Folk, pour en citer quelques-uns pas trop honteux. Votre style et votre forme d'érudition devraient plaire.
Bon, je suis peut-être complètement à côté de la plaque. Il faut me le dire, ce n'est pas grave. Je le sais et je l'assume. Par exemple, vous évoquiez Twitter tout à l'heure. Eh bien, figurez-vous que j'en entends souvent parler, mais que je ne sais même pas en quoi ça consiste ! Et je m'en fiche.

Bien à vous,

pi

Costar a dit…

Allez, voici 3 Baugin et 3 Rembrandt du Louvre en HQ, de ma collection personnelle.

Pour les magazines que vous me conseillez, s'ils sont probablement très honorables, ils ne sont très certainement pas concernés par mon genre de littérature, même gratuitement, quand chacun de leurs articles intéressent sans doute des milliers de personnes. Et puis les démarches et sollicitations me fatiguent, prennent du temps, et une réussite éventuelle ne ferait que m'imposer des contraintes.

Costar a dit…

Vous trouverez peut-être les images un peu décevantes. Il faut savoir que le Louvre n'a jamais publié de bonnes reproductions de ses tableaux. De plus ils ont une politique de restauration tellement timorée qu'ils vous sembleront tous sales, poussiéreux et "mal entretenus", ce qui est le cas. C'est pourquoi ils exposent les plus sales dans la pénombre.
Je ne comprends même pas comment j'ai pu obtenir ces images malgré tout en haute définition (en fait je m'en explique dans une ancienne chronique, le 24.08.2014).

Anonyme a dit…

Merci ! Votre image de la Nature morte à l'échiquier m'a été très utile. Le Rembrandt, en revanche, n'était pas mieux que ce que je possédais. C'est rageant de ne pouvoir s'abîmer correctement dans cette béance obscure de l'escalier, ce trou noir troublant (jeu de mots !), où, le saviez-vous ?, se distinguait jadis la silhouette d'une femme.

Quant à vos chroniques, je persiste à croire qu'elles valent mieux que cette diffusion confidentielle que vous semblez d'ailleurs déplorer. Il en est de même pour vos peintures, qui témoignent d'un savoir-faire irréprochable et d'un imaginaire très singulier. Je suis très mal placé, croyez-moi, pour donner des conseils de "coaching", mais je pense que vous sous-estimez vos talents. J'ai en effet quelques compétences dans le domaine de l'histoire de l'art et j'apprécie vraiment votre travail. L'esprit, la culture et la sensibilité, quand ils se combinent (ce qui est rare), donnent vraiment d'excellent résultats. Votre blog est un îlot d'intelligence dans ce qui me semble être un océan de bêtise. Voilà.
Cordialement,

pi

Costar a dit…

Je ne savais pas qu'il y avait un 3ème personnage dans ce tableau. Et même en traitant la photo avec des outils qui font ressortir les détails dans les ombres, elle n'apparait pas. Wikipedia dit effectivement qu'elle existe dans des gravures des 17 et 18ème siècles, comme ici par exemple. Il faudrait avoir une photo aux rayons X, mais comme le musée ne fournit même pas de bonne photo à la lumière normale...

D'ailleurs l'article est très érudit et complet, notamment l'histoire de la dés-attribution et de la réattribution rappelle celle de quelques autres tableaux célèbres comme le sublime David et saül de La haye que j'ai bien fait de toujours considérer comme un Rembrandt puisqu'il lui a été réattribué en 2015.
Et je considère toujours l'Homme au casque d'or et l'Homme lisant dans une pièce comme parmi les plus beaux des Rembrandt.

Quant à mes "talents", ne croyez pas que je les sous-estime. mais je n'ai seulement aucun savoir-faire auto-promotionnel, et même peut-être aucune pulsion de ce genre.
Mais je ne vous interdit pas, bien au contraire, d'en parler sans retenue autour de vous. Vous vous apercevrez, sans doute, que les sujets qui nous passionnent, vous et moi, intéressent finalement très peu de monde.
Rappelez-vous mon anecdote relative à l'exposition Vermeer. 2000 personnes ont lu ma chronique, et sont immédiatement retournées à d'autres préoccupations.