dimanche 28 août 2016

Les saisons de Houdon

Ce n’est peut-être pas un hasard si les deux grands portraitistes de la fin du 18ème siècle, les sculpteurs Houdon et Pajou membres de la très respectueuse Académie royale, après avoir réalisé de magnifiques bustes de l’aristocratie de l’Ancien Régime, ont traversé sains et saufs les tempêtes de la Révolution française et de l’Empire.
Ils étaient tous deux membres de la progressiste et influente loge maçonnique des « Neuf Sœurs », qui joua un rôle important dans la lutte des colons américains pour l’indépendance et la propagation des idéaux républicains, et ils y côtoyèrent Lalande, Helvetius, Benjamin Franklin, Thomas Jefferson, et même Voltaire et Joseph Ignace Guillotin.

Le musée Fabre de Montpellier expose une exceptionnelle collection permanente de très beaux bustes de Pajou, et de chefs d’œuvres de Houdon, dont les marbres originaux de l’Hiver, superbe espièglerie callipyge réalisée en 1783, et de l’Été sculpté en 1785, remarquable par son naturel (notamment dans le traitement du regard), naturalisme avant l’heure qui émerveillera bien plus tard Carpeaux et Rodin.

Houdon Jean-Antoine, l'Hiver (Montpellier musée Fabre)

Houdon Jean-Antoine, l'Été - détail (Montpellier musée Fabre)

mardi 16 août 2016

La vie des cimetières (71)

Voici la suite des épisodes (ici et ) de l’invasion des légumes verts venus de l’espace.
Aujourd’hui la scène se passe à Paris dans le cimetière Montparnasse.



samedi 13 août 2016

Un peu de réclame cocardière

Paris ne manque pas de lieux accueillants, comme ce quartier du quai d’Orsay et de l’Assemblée nationale, près des Invalides. Son architecture faite de lignes pures et austères pourrait certainement attirer le touriste. 
Or on lit partout qu’il boude la France, et on accuse le terrorisme. 
Pourtant, où pourrait-on se sentir plus en sécurité que dans ce quartier chargé d’histoire, farci de caméras de surveillance et sillonné par des bataillons de militaires et de policiers couverts d’armes ?

Une touche de couleur, tout devient tout de suite plus gai, et le touriste apparait. 

lundi 8 août 2016

Eckersberg et la réalité

En 1984, dans une ample exposition sur « l’âge d’or de la peinture danoise », le public français découvrait 54 œuvres de Christoffer Wilhelm Eckersberg. Au fil du temps il revoyait parfois quelques tableaux, comme au Grand palais à Paris en 2001, qui illustraient le thème des paysages d’Italie peints en plein air.
Aujourd’hui jusqu’au 14 aout 2016, la Fondation Custodia à Paris lui consacre une grandiose rétrospective de 80 peintures et une quarantaine de dessins.

Très marqué par ses années passées à Paris de 1810 à 1813, notamment dans l’atelier de David, Eckersberg manifestera toute sa vie une rigueur (voire une rigidité) des formes et des volumes dans sa peinture d’un monde limpide et léger, comme minéralisé, un monde voisin de celui d’Ingres (ancien élève de David) sans en maitriser autant les raffinements dans ses portraits de la bourgeoisie mais excellant dans ses petits paysages esquissés sur le motif et terminés en atelier.

Eckersberg, la villa Raphaël dans les jardins Borghese à Rome, 1815. Détail (Hambourg Kunsthalle)

Comme Ingres également Eckersberg aurait voulu être reconnu comme peintre d’histoire, genre le plus noble de l’époque. Mais comme Ingres il n’avait aucun sens du drame ni du pathétique, et pas un gramme de romantisme non plus. Il était fait pour les points de vue détachés, équilibrés, sobres.

On en voit l’évidence dans la salle de l’exposition consacrée à onze paysages romains. Eckersberg n’y montre jamais les vues les plus courues, ou alors sous des angles banals ou inhabituels et garnies de détails réalistes qui leur ôtent toute grandeur. Dans ses vues des ruines de Rome la profondeur des siècles s’évapore, l’histoire s’arrête l'instant d’une peinture.

On a jugés cruels ses portraits de la bourgeoisie. Ils étaient foncièrement réalistes. Professeur, devenu une célébrité au Danemark, directeur de l’Académie royale des beaux-arts, Eckersberg enseignait qu’il ne fallait pas chercher l’inspiration dans les tourments de l’esprit mais dans l'observation du monde comme il advient « Ne peignez que ce que vous voyez, mais dans les moindres détails ».

Et son petit tableau de 1836 (n°68 de l’exposition) intitulé « Figures courant sur le pont de Langebro au clair de lune » en est l’exemple abouti. L’eau est calme, l’atmosphère est paisible. Dans l'ombre du clair de lune on n’aperçoit pas tout de suite l’agitation des personnages qui courent ou s’exclament sur le pont. Le peintre ne montre pas le motif de leur alarme, et on ne le saura jamais.
L’histoire s’est arrêtée le temps d’une peinture.


Eckersberg, femme sur une balançoire en forêt, plume et lavis d'encre, 1810. Détail (Copenhague SMfK)