samedi 26 avril 2014

Détruire, disent-elles

Un collectionneur anglais avait acheté pour une somme importante en 1992 un petit tableau représentant une femme nue attribué à Marc Chagall, peintre aux réalisations colorées et naïves. L'œuvre était alors soutenue par un expert russe ami de Chagall.
Vingt ans après, pour se rassurer sur la valeur de son investissement (probablement avait-il quelques doutes) le brave homme présentait il y a peu le tableau à une émission de la chaine anglaise BBC consacrée aux contrefaçons (Fake or fortune).

Première erreur. Le tableau s'est révélé peint avec des pigments trop récents au regard de sa datation. Par ailleurs il a depuis quelques années disparu des livres d'experts qui discutent de Chagall. C'est donc certainement un pastiche.
Deuxième erreur, la production anglaise, pourtant avertie, choisit de le soumettre au jugement du Comité Chagall, présidé par les deux petites-filles du peintre.

Et depuis, ces dames ne veulent pas rendre le tableau. Elles le confirment faux et souhaitent saisir la justice, aux frais du propriétaire, afin de faire respecter une vieille loi française de 1895 qui autorise à détruire devant huissier une œuvre dont les ayants droit pensent qu'elle pourrait entacher la mémoire de l'artiste (deux œuvres de « Miro » ont ainsi été pulvérisées en 2013).

Quand on sait les incertitudes que soulèvent les questions d'attribution, les avis d'experts qui fluctuent parfois au vent des modes ou des intérêts qui les financent, une décision aussi imprudente et fatale a de quoi effrayer l'amateur de peinture naïve. Hier encore, un tableau du musée de Tessé au Mans, jusqu'alors relégué comme copie ou « école de » Bartolomeo Manfredi, vient d'être attribué au maitre lui-même, après restauration. De plus, on ne voit pas bien en quoi ces destructions pourraient, comme le disent certains, décourager les faussaires. Mais elles découragent certainement les propriétaires de tableaux dans la recherche de leur authenticité.

Et puis franchement, le tableau en cause est tellement médiocre, qui pourra croire qu'on a pu un jour le prendre pour une œuvre de valeur, même de Chagall ?

Mise à jour le 07.07.2022 : la cour d'appel en 2019, en opposition à la rigidité de la loi, mais pas contredite plus tard par la cour de cassation, a considéré que la mention "Reproduction" visible et indélébile au dos de la toile suffirait.  

Faux arbre en bronze de Guiseppe Penone, depuis 1999 dans le jardin des Tuileries à Paris.

samedi 19 avril 2014

La vie des cimetières (54)


Quand on monte les douze marches qui conduisent au cimetière de Louannec, devant l'église Saint Erwan (Saint Yves), on a l'impression de surprendre un rituel, un congrès de christs, tous exposés exactement vers le sud, vers le soleil.

dimanche 13 avril 2014

L'apothéose des carabiniers

On pouvait lire il y a peu dans la presse que les carabiniers italiens exultaient. Ils venaient de retrouver, « après une très longue enquête, deux tableaux d'une importance artistique exceptionnelle et d'une valeur incalculable » de Bonnard et Gauguin, 40 ans après leur disparition.
Et le ministre de la Culture, flanqué du général des Carabiniers, de se féliciter à grand renfort de flashs et d'une ronflante autosatisfaction devant la presse admirative, histoire de faire oublier les casseroles monumentales que traine l'administration italienne, dans sa gestion du site de Pompéi, notamment.

Cette peinture à fresque orne depuis au moins 2000 ans un mur d'une villa de Pompéi. Les graffitis qui la couvrent et bientôt l’effaceront sont plus récents.

En réalité, à regarder attentivement, l'histoire de ces tableaux ne met pas vraiment en valeur l'expertise des gendarmes de la culture.

6 juin 1970, deux hommes de l'art et un policeman installent un système d'alarme dans une riche maison londonienne de Chester Terrace. Quand la domestique qui leur a préparé le thé revient de la cuisine, les trois hommes ont disparu avec deux toiles de maitre découpées au cutter dans leur cadre. Un classique du genre.

Peu de temps après, les deux toiles sont trouvées abandonnées dans le train Paris-Turin. À Turin personne ne fait le lien avec les tableaux volés. Elles sont alors déposées aux objets trouvés de la gare et y resteront cinq ans. Pourtant, le style de Gauguin est nettement reconnaissable sur l'une, et surtout l'autre arbore en bas à gauche une signature rouge où on lit assez nettement « Bonnard ».

Au printemps 1975, elles sont vendues aux enchères par l'administration des chemins de fer parmi un lot d'objets non réclamés. Un peu disputées, elles sont finalement emportées pour l'équivalent d'une semaine de son salaire par un ouvrier des usines Fiat passionné de peinture.
Et il les admirera durant 38 ans, dans sa cuisine à Turin puis à Syracuse en Sicile où il prendra sa retraite.

Aux dires de l'ouvrier, son fils intrigué depuis longtemps par les tableaux, et qui lisait « Bonnato » sur la toile signée, reconnut un jour le jardin qu'elle représentait sur une photo d'une biographie de Bonnard.
Il aurait de même identifié la comtesse dédicataire et le style de Gauguin sur l'autre toile, et transmis récemment des photos à des experts de Syracuse, qui ont informé les carabiniers du Patrimoine.

Finalement, l’administration italienne qui pavoise aujourd'hui dans les médias unanimes n'aura pas fait grand chose dans cette histoire, sinon identifier les anciens propriétaires décédés depuis longtemps. La gigantesque base de données des objets disparus, dont elle est si fière, ne comportait même pas les deux inestimables tableaux dans sa liste de presque 6 millions d'objets.

dimanche 6 avril 2014

Nuages (32)


Tandis que les missions interplanétaires vers Mars n'en finissent pas de s'écraser sur la planète ou au mieux de s'épuiser dans sa poussière ferrugineuse sans qu'un avenir martien pour l'homme ne soit sérieusement envisageable, notre correspondant spécial sur Vénus nous transmet ce cliché qui prouve que la situation météorologique n'y est pas si dramatique que le prétendent certains astronomes défaitistes. (Photo P.B. 22.01.2012-16h)