Dans les salles obscures du musée d'archéologie et des beaux arts de Poitiers, le musée Sainte Croix, vous flânez nonchalamment parmi les œuvres intéressantes, quand, soudain, une bombe blasphématoire et puante vous explose au visage!
Le forfait est signé :
Müller,
Charles Louis (1815-1892) "La fête de la raison le 10.11.1793", peint en 1878. Nous n'en présentons qu'un détail...
Vous êtes prêt à écrire au préfet, au ministre, voire au pape.
Mais vous vous contrôlez et allez aux renseignements sur l'auteur de cette laideur. Vous trouvez très peu de choses sur le peintre, mais néanmoins suffisamment pour tempérer votre premier jugement. Et surtout, entre autres distinctions, il fut fait officier de la légion d'honneur en 1850. Ça fait réfléchir.
Müller était un vrai peintre d'Histoire, un mercenaire de la peinture, qui glorifiait sans distinction les victimes comme les bourreaux.
On lui demandait de peindre la naissance de l'humanité en -4000 avant notre ère (à quelques années près s'entend), il le faisait. Sans aucun style, mais très proprement.
On lui enjoignait de figurer des choses extrêmement difficiles à peindre avec précision : la religion, la patrie (demandez aux amateurs du jeu
Pictionary comme c'est ardu). Il s'exécutait.
Et même La France (illustration ci-dessous : Allégorie de La France, musée du Louvre). Il l'a représentée avec les petits carreaux qu'il est si difficile de faire bien droits.
La peinture d'Histoire doit, parmi ses nobles desseins, montrer aux générations futures que l'homme a connu des moments d'obscurantisme dans son inéluctable progrès vers la lumière des temps modernes.
Müller travaillait sur commande. Il illustra parfois des idées immorales auxquelles il ne croyait pas.
On lui pardonnera.