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samedi 6 novembre 2021

Il n’y a plus d’Antidote (billet d’humeur)

Distributeur de sodas dans un monde sans dictionnaire (c'est assez terrifiant), Demeure du chaos, 2015.
 
Il est malheureux, pour un blog considéré en moyenne par 100 à 200 visites hebdomadaires (1), de perdre du jour au lendemain sa principale source d’inspiration, un bon dictionnaire, et pour un motif certes classique, mais vulgaire, la cupidité ! 

(1) Les statistiques de Gougueule déclarent 630 visites par chronique, mais étalées sur 15 ans. Et doit-on croire des chiffres fournis par l’entreprise qui en est la première bénéficiaire, et qui envoie systématiquement dans le piège sa cohorte de robots de surveillance et parfois un internaute égaré, qui presse immédiatement, éberlué, le bouton de retour en arrière ?

Un peu de technique pour les profanes. 
Pour être agréable à lire, un texte doit être fluide comme la pensée, mais plus précis qu’elle, qui cahote généralement dans une mare de confusion. Il faut, dans ce but, la figer dans le mot exact, qui aura bien entendu un sens différent à la lecture de chacun, mais on n’y peut rien. 

Le vieux Boileau peut toujours affirmer fièrement, au vers 153 de son art poétique, « Ce que l’on conçoit bien s’énonce clairement », pour l’auteur d’un blog qui ne dispose que d’un cerveau moyen de 1300 grammes tout mouillé et dont la rumeur dit qu’il n’en utilise que 130, les outils informatiques, qui apportent instantanément orthographe, synonymes, antonymes, définition, genre, citations et conseils grammaticaux, sont vitaux. 

Antidote, outil linguistique produit par les Canadiens (2), était le couteau suisse de ce blog depuis presque 10 années. Les adeptes comprendront pourquoi. 

(2) Les Canadiens du Québec, peut-être parce qu’il sont menacés de l’intérieur par l'anglais, défendent mieux la langue française que les grands classiques français, Robert ou Larousse, dont l’offre numérique est indigente (à l’exception du CNRTL, mais qui aurait besoin d’un bon renouvèlement).
  
Or à l’instar de Photoshop, puis de la suite Microsoft, et maintenant de la plupart des logiciels à qui la réussite financière a montré le début d’un orteil, Antidote change aujourd’hui de modèle économique. 
Afin de racler définitivement les phynances du brave blogueur bénévole, il cesse de maintenir le dictionnaire acheté (et qui mourra doucement d’obsolescence en peu d’années, ou quelques mois) et le transforme en un rutilant droit d’utilisation du logiciel (3), payé par un abonnement à prélèvement, renouvellement et résiliation automatiques.

(3) Cette année, Antidote supprime le logiciel sans abonnement sur les téléphones et tablettes seulement, pas encore sur ordinateur (où subsiste l’achat de la mise à jour en option). 
Vous trouverez la description des avantages de ce nouveau modèle économique abusif et totalement déséquilibré dans notre chronique de 2013, Légère retouche au modèle, à propos de Photoshop.  

5 euros par mois ! Un détail, direz-vous. Mais un détail de plus. C’est ainsi qu’on tolère sans le remarquer, jour après jour, le resserrement des chaines de notre propre captivité.
Écoutons plutôt Étienne de la Boétie et abandonnons rondement ce dictionnaire pour un autre, peut-être moins agréable, moins commode, mais notre indépendance vaut bien ce petit effort, sans quoi Ce Glob serait vite contaminé par l’anarchie ; la faute d’orthographe, la pauvreté des épithètes, les clichés de langage, les barbarismes y pulluleraient.

Et à cela, à l’image du sort inéluctable du climat de la Planète, il n’y aurait plus la moindre antidote.

samedi 19 septembre 2020

Un peu de pub

M. Rykner, journaliste éminent et combattif dévoué aux choses de l'art (de certaines époques seulement), laissait libres d'accès, sur son site « La Tribune de l'Art », les articles généralistes importants. Les plus spécialisés étant réservés à ses abonnés payants. Connaisseur pertinent, il a souvent été référencé ici-même (7 fois en 10 ans).
 
Hélas le virus ayant fait fuir de son site, annulation après annulation, dit-il, les publicités lucratives, il en profita, dès le début du confinement, pour rendre tous les articles payants, sur abonnement donc.

Il s’en explique dans un article promotionnel où il sollicite des abonnements. On croit comprendre, à la lecture des premières lignes, qu'il se félicite de cette suppression totale de la gratuité (sauf de rares articles polémiques qu'il veut universels) puisqu'il estime que son chiffre d'affaire en 2020 sera supérieur à 2019, ce qui est bien la légitime aspiration de tout bon père de famille.


Peut-être est-il allé un peu loin dans la mise en œuvre de ce raisonnement gagnant puisque l’article, où l'on devine qu'il va justifier et promouvoir les avantages d'un abonnement, est hélas limité à quelques lignes, le reste étant réservé aux abonnés, ce qui est cocasse.

On dira que c'est une erreur due à l'empressement pour faire face à une recrudescence d'activité. Soulignons que cet accroissement n’est pas vraiment sensible pour l’utilisateur qui a plutôt noté dans le pays, à l’inverse, une importante régression et une grande complication d’accès aux évènements artistiques.
 
Ce petit incident met en lumière une question plus générale, l’angoisse devenue quotidienne de l’usager de la Culture. Car il est de bonne composition, l’usager, il aimerait bien s’abonner à tous ces sites passionnants, à tous ces services qui enrichiraient son esprit, mais son banquier l’observe, bienveillant.
 
Et ce modèle économique de prolifération des abonnements, s’il tranquillise les bienheureux bénéficiaires, ne fait qu’embrouiller la vie de l’usager de base. 
C’est l’exemple des logiciels de la société Adobe (Photoshop, etc), et de tant d’autres maintenant. Quand en 2014 elle cessa de vendre ses logiciels qu’elle transmua en « droit d’utilisation par abonnement », le cout et les désagréments pour bon nombre d’usagers furent multipliés par 2 ou 3.
Pour que d’aucuns prospèrent, il faut bien que d’autres y perdent, auraient dit Lavoisier ou carnot, même si d’incurables utopistes pensent que tout le monde pourrait y gagner, les lois de la thermodynamique ne sont plus si optimistes.

Naturellement M. Rykner n’y est pour rien. Il essaie de vivre dans ces circonstances hostiles, comme tous. Et son offre est alléchante, à 5 euros par mois pour les 10 ans à venir, au lieu de bientôt 8 euros. 10 ans ! Quelle curieuse promesse, romanesque.
 
Enfin, l’essentiel est que M. Rykner soit satisfait, visible par moins de lecteurs, certainement, mais content.
Nous suivrons désormais avec intérêt son humeur à la lecture des titres de ses chroniques.
 
***
L'illustration, copyright La Tribune de l'Art, est l'extrait lisible de l'article réservé aux abonnés.

mercredi 1 avril 2020

Améliorons les chefs-d’œuvre (16)


En dépit de la pandémie et de la réclusion planétaire les affaires continuent.
30 mars 2020, l’Agence France Presse signale qu’un tableau de Van Gogh vient d’être dérobé par effraction au musée Singer de Laren aux Pays-Bas.

On demeure surpris qu’il puisse encore exister un marché pour des tableaux documentés, reproduits, estimés en millions d’euros, dont la mise en vente serait immédiatement repérée et qui ne pourraient faire l’objet que d'une rançon. Et encore ! Rappelons que le panneau de gauche du polyptyque de Van Eyck dans l’église saint Bavon de Gand est une copie depuis 1934, parce que le gouvernement Belge a d’abord refusé de payer, et que le rançonneur est mort avant de dévoiler sa cachette.

Le titre courant du tableau volé est « Le jardin du presbytère de Nuenen au printemps ». Il date de 1884, mesure 57 cm par 25, peint à l'huile sur papier collé sur un panneau. Van Gogh passait alors deux ans dans le presbytère familial. Au fond de l’image, la petite église, aujourd’hui entourée d'arbres et de pavillons, porte le nom de Van Goghkerkje (l’église Van Gogh). Une autre vue de cette église, et une vue de la mer à Scheveningen, avaient été volées à Amsterdam en 2002 et retrouvées près de Naples en 2016 dans l’appartement d’un maffieux célèbre.

Contrairement au Van Gogh du musée Khalil du Caire volé en 2010 (voler un Van Gogh est décidément un loisir), cette fois, la presse ne s’est pas égarée dans des extrapolations et a tout de suite trouvé la bonne reproduction du tableau. L’adjectif « bonne » est pris ici dans le sens de pertinente, conforme, car elle figure bien le tableau volé.

Mais la reproduction en elle-même n’est pas bonne. D’ailleurs à sa vue les réseaux sociaux ce sont exclamés à l’endroit des malandrins « vous pouvez bien vous garder le tableau tellement il est laid ! »
Il faut reconnaitre que les tableaux peints par Van Gogh aux Pays-Bas au premier tiers de sa courte carrière sont très assombris, au moins autant par le vieillissement des médiocres couleurs et vernis employés que sous l’influence du gris plombé du ciel brabançon. Toutes les reproductions du tableau le confirment (voir notre illustration ci-dessus).

Rappelons que la tradition l’appelle « Le jardin […] au printemps », alors que la première image, du site BFMTV, tronquée, évoque plutôt l’automne, la suivante, du site WGA, presque l’hiver, et la troisième, du site ArtDaily ou du Monde, une fin d’hiver boueuse. Toutes proviennent de la même source plus ou moins manipulée.

Profitons alors de cette discordance pour ajouter, dans la quatrième image, une interprétation plausible en retirant de la troisième sa couche uniforme de vernis fortement jauni, ce que les outils graphiques comme Photoshop savent faire en une simple commande, mieux que les restaurateurs, pour retrouver en moins d’une seconde les couleurs d’un printemps naissant, la saison originale qui explique le titre de l’œuvre, comme Van Gogh l’a certainement peinte il y a 126 ans.

« On se prend à regretter que le tableau ait été chapardé ! » diront les réseaux sociaux.

Mise à jour le 25.09.2021 : L'auteur du vol du Van Gogh et de deux Frans Hals dans la région vient d'être jugé et emprisonné pour des traces d'ADN trouvées sur les lieux des vols. Aucun tableau n'a été jusqu'à présent retrouvé.

mercredi 5 septembre 2018

Histoire sans paroles (30)




Oui, Venise encore.
Oui, crépusculaire, encore.
Et un peu stylisée, en outre.
Et alors ?

vendredi 27 avril 2018

Histoire sans paroles (27)


L'antique serre, le vivant potager et le château de La Bussière, dans le Loiret. 
Pour lire l’heure sur le clocher de la tour d’entrée, ou tenter de déchiffrer l’aphorisme (de comptoir) attribué à un pape et certainement apocryphe, sur l’ardoise devant la serre, cliquez sur l’image panoramique en grand format (9000 x 3045 pixels) et zoomez...

jeudi 21 janvier 2016

Histoire sans paroles (20)

Le Parc des sources est un vaste espace fait d’allées arborées qui relient les établissements de bains et de loisirs du site thermal de la ville de Vichy
C’est un parc au décor suranné, figé dans les années 1900. 
On peut y lire sur des panneaux « Vous êtes les bienvenus dans le Parc des Sources. Ce parc est un lieu privé dont nous vous autorisons l'accès. Cependant nous vous informons que sa fréquentation est placée sous votre entière responsabilité ». 
Car la concession du domaine thermal accordée par l’État à une société privée (aujourd’hui la Compagnie de Vichy, anciennement Compagnie fermière) comprend les sources, les hôtels, mais aussi le parc, son entretien et ses servitudes. 
Or le parc, avec ses essences communes, ses kiosques démodés, libre d’accès et gratuit, n’est pas rentable.

samedi 5 septembre 2015

Histoire sans paroles (19)

Un coin de Ronda, ville d’Andalousie, fameuse pour son édification au bord d’un précipice de 170 mètres et pour ses arènes séculaires, capitale spirituelle des divertissements taurins sanguinaires.

vendredi 21 février 2014

Tranche de vie napolitaine


C'est un restaurant situé sur une petite place touristique de Naples. Une Vierge dans une niche de bois est nimbée, le soir, d'une lumière bleu vif au néon.
Rien de tel, pour s'imprégner du charme du lieu, que de lire les jugements de la clientèle italienne sur l'établissement, et de demander à Gougueule d'en faire une traduction automatique, qui met si bien en valeur les nuances de la langue d'origine. En voici un florilège :

- Allumé, le sanctuaire de Notre-Dame est un animal de compagnie quand vous pouvez dîner à l'extérieur.

- La qualité de la nourriture a bon goût. 

- Même la pizza était très bon.

- Mais les cheveux sont dans les plats hors-d'œuvre que la mer y Génois sont inacceptables.

- Des plats en plastique, pizza avec les moules de ketchup, pas propre, salade de calmars puante, que du bon pain et de l'eau minérale.

- Dans ma pizza était un point d'agrafeuse indignés que nous avons payé et sommes partis.

- Si l'été puis le soir est susceptible de devenir inoubliable. Un théâtre.

- C'est le réveillon du livre nuit et nous nous sommes placés à l'extérieur avec les champignons. Apéritifs bon cru, le reste du riz, indescriptible morue cuit vin mousseux salée impropre à la consommation. Nous nous sommes levés sans fin, le projet de loi comme la morue.

- Je dis que j'ai pris ma femme est seulement à cause des prix excessifs salade de poulpe.

- Sans aucun doute le chemin de la salle de bain est un peu mal à l'aise.

- La pizza m'a laissé un peu de monde.

- La faille : la structure.

- Alors j'ai dit au revoir et s'en allèrent à jamais.

- Et retour à la maison, nous avons dû nous faire un sandwich !

dimanche 8 septembre 2013

Légère retouche au modèle

Depuis quelques années est apparu un mode de consommation où les biens sont remplacés par des services immatériels. Vous payez un droit d'accès mensuel et ce qui était auparavant un livre, un disque, un objet que vous pouviez donner ou prêter est devenu un droit d'usage non cessible, un usufruit personnel et temporaire.
Si vous cessez un jour le paiement de vos mensualités, si l'entreprise change de politique, de tarifs, de catalogue, ou disparait, vous n'avez plus rien.
C'est le chef d'œuvre des modèles économiques, le mouvement perpétuel, la rente sans fin. C'est ainsi qu'Amazon vend ses livres numériques et Deezer ou Spotify leur musique.
Et le système semble trouver ses clients, ce qui fait des envieux.

En 1987, Thomas Knoll, étudiant à Ann Arbor (Michigan), écrivait un petit programme informatique de création et retouche d'images en noir et blanc. En 1990 il en vendait la licence à la société Adobe, et Apple le distribuait alors sur son ordinateur Macintosh, sous le nom Photoshop.

Aujourd'hui le logiciel est tant prisé pour ses riches fonctionnalités et son interface efficace, notamment pour la retouche photographique, que les écoles d'art graphique ont créé des formations dédiées et que le verbe photoshoper, signifiant retoucher numériquement (participe passé shopped en anglais), est sur le point d'entrer dans les dictionnaires.

Comme le logiciel est vendu très cher, 1000 euros ou 300 la mise à jour, Adobe est très riche. Mais après 20 ans, le logiciel sachant tout faire, il est devenu difficile d'innover assez pour maintenir un niveau de ventes régulières et contenir la concurrence qui s'améliore.

C'est pourquoi Adobe annonçait en mai 2013 que la nouvelle version, la 14ème (CC, pour Creative Cloud), serait disponible uniquement au prix d'une redevance mensuelle de 25 euros (300 par an). Le procédé équivaut, économiquement, à contraindre tous les utilisateurs à acheter la mise à jour annuelle (rarement indispensable), et aussi à bafouer l'acheteur fidèle puisque toute cessation de paiement se soldera par un arrêt immédiat du droit d'utilisation du logiciel.

Depuis lors les noms d'oiseaux les plus délicats ont fleuri sur les sites spécialisés d'Internet à l'encontre du président de la société, et on ne compte plus le nombre de commentaires indignés ou amers.
La campagne de dénigrement a probablement influencé les ventes puisque le brave commerçant vient juste de déclarer que le prix de l'abonnement bas (20$ US, 25€ en Europe) serait bientôt divisé par deux, sous certaines conditions (anciens clients).
Mais ce recul timoré ne fait pour l'instant que susciter des commentaires méfiants ou incrédules. Les utilisateurs ne seront satisfaits qu'au retour d'une version exploitable jusqu'à l'obsolescence, sans avoir à redouter les changements de tarif intempestifs et la menace de la perte instantanée d'un outil de travail.

Certains prédisent le rétablissement de l'ancien modèle avant six mois. C'est à espérer, car si le nouveau réussit à s'imposer tous les éditeurs de logiciels un peu originaux se précipiteront dans cette ouverture.
Photoshoper signifiera alors « pigeonner le client », un sens finalement assez commun et qui figure déjà dans les dictionnaires.

Mise à jour du 14 juillet 2015 : il fallait s'y attendre, le modèle scélérat a tenté Microsoft qui loue maintenant l'ensemble de ses logiciels (Excel, Word, etc) pour 69€ par an, mais n'a pas renoncé à les vendre aussi. Adobe, de son côté, a un peu réculé. La location à 143€ par an est aujourd'hui accessible sans conditions. Rappelons cependant que toutes les fonctions de Photoshop utiles aux retoucheurs photographes sont disponibles dans le logiciel Photoshop Elements vendu (et non loué) moins de 100€.

vendredi 31 août 2012

Améliorons les chefs-d'œuvre (3)

Décidément, le mot d'ordre libertaire de Ce Glob est Plat, « Améliorons les chefs-d'œuvre », a fait en quelques mois beaucoup d'émules. Pour preuve cette mésaventure qui fait actuellement scandale à Borja près de Saragosse, dans le nord de l'Espagne, et dans le monde entier.

Vous connaissez certainement l'histoire. Accoutumée aux petits travaux que nécessite régulièrement l'église du Sanctuaire de Notre-Dame de la Miséricorde dans les faubourgs de Borja, une très vieille femme dévote avait décidé de sauver le Christ d'une dégradation déjà bien avancée. C'était un portrait médiocre peint à la fresque par Elias Garcia Martinez, obscur décorateur et professeur à Saragosse, mort en 1934. La vieille dame avait déjà repeint la tunique pourpre du Christ en faisant au passage une grossière erreur de perspective, avec la bénédiction du prêtre de la paroisse.

Forte de cette approbation, elle s'est donc attaquée au visage qui se décomposait. Emportée par une indéfectible foi chrétienne et des limites techniques incontestables, elle transforma la mauvaise croute en un étrange pâté, dans le style d'un Georges Rouault ou Modigliani terminé au chiffon par Francis Bacon.
Plus de 20 000 internautes déjà ont néanmoins trouvé du charme à ce Christ zombi au point de signer une pétition pour sa préservation.


Soyons modestes, Ce Glob est Plat n'est pas l'inventeur de ce concept prometteur d'amélioration des chefs-d'œuvre du passé. L'archétype, le modèle indépassable, c'est le Spéléo-Club albigeois qui le 5 mars 1992, aidé d'un groupe d'Éclaireurs de France adolescents et filmé par la télévision régionale, effaçait soigneusement, à la lessive et la brosse dure, deux bisons maladroitement dessinés par un peintre inconnu il y a au moins 20 000 ans dans la grotte de Mayrière à Bruniquel.
C'était une méprise, l'intention était bonne, la grotte était aussi couverte de graffitis récents. Ils en obtinrent le prix igNobel d'archéologie en 1992.
Ironie, la peinture rupestre avait été découverte par le même club de spéléologie 40 ans plus tôt. Ce qui prouve bien qu'en matière d'art le progrès n'existe pas.

Mise à jour du 20.09.2012 : la suite devient lamentable, naturellement. La Fondation propriétaire de l'église prélève un euro par visiteur. La vieille dame va demander à la Justice sa part des milliers d'euros, en droits d'auteur. 

samedi 24 mars 2012

Améliorons les chefs-d'œuvre (2)


Léonard de Vinci n'a peint que des plus beaux tableaux du monde, et aussi des ultimes chefs-d’œuvre. C'est le Louvre, le plus grand musée du monde qui expose le plus grand nombre de plus beaux tableaux du monde, qui l'affirme. C'est écrit dans la magnifique brochure d'une prochaine exposition incroyablement excitante sur un chef-d’œuvre absolu et mystérieux de Léonard, qui était il y a peu dans un état lamentable (pas Léonard, le tableau évidemment), et que les restaurateurs du musée ont sauvé de l'anéantissement.

Ce tableau, inachevé par Léonard mais sauvé par la technologie française, c'est La Vierge et l'Enfant avec sainte Anne. Vous savez, c'est le tableau sur lequel, après l'avoir tourné de 90 degrés vers la droite, le grand Sigmund Freud s'est ridiculisé en imaginant le dessin d'un vautour dans les plis de la robe bleue, et en déduisant, à partir du souvenir d'enfance d'un milan relaté par Léonard, une théorie abracadabrante prouvant indubitablement son homosexualité (pas de Sigmund, de Léonard évidemment).

Dans cette exposition sera également, parait-il, l'extraordinaire et fragile dessin au fusain (sur un thème similaire) de la National Gallery de Londres, ainsi qu'une copie de la Joconde dont la presse vient de beaucoup parler. Nombreuses sont les imitations de la Joconde qui se morfondent dans les caves des musées. Le Prado de Madrid en avait une dans ses réserves, moins médiocre que la plupart, répertoriée depuis longtemps. Une analyse approfondie afin de préparer l'exposition révéla, sous le fond alors noir (repeint de la fin du 18ème siècle), un paysage proche de celui du Louvre, et surtout des détails qui, sur l'original, avaient été recouverts par le lent travail de retouches en glacis de Léonard et que personne (à part les radiographies récentes) n'avait jamais vus depuis. Les experts en ont déduit que la copie a été exécutée en même temps que l'original, dans l'atelier de léonard par un de ses élèves. Ce qui avait été une copie incertaine devenait un témoignage irremplaçable, plus proche de l'original que l'original même.

On se souvient qu'il y a quelques années, devant la timidité des conservateurs du Louvre (dont il est clair qu'ils n'ôteront jamais
la couche de saleté qui enfume et décolore la Joconde), Pascal Cotte avait investi des sommes faramineuses pour la débarbouiller virtuellement et recalculer ses couleurs originelles sur ordinateur. Avec des moyens plus modestes mais à l'aide des découvertes les plus récentes, Ce Glob est Plat ouvre aujourd'hui la fenêtre et vous propose une version oxygénée en appliquant sur l'original les couleurs de la pimpante version du Prado (avec une variante aux manches jaunes, Léonard n'ayant en apparence pas choisi l'option manches rouges de la copie).

Malgré ce courant d'air on notera que la scène reste assez compassée. Il serait peut-être profitable, dans une prochaine amélioration, d'ajouter quelques accessoires, histoire de lui apporter un peu de naturel et de spontanéité.

mardi 7 février 2012

Améliorons les chefs-d'œuvre (1)

Jean-Léon Gérôme, Le marchand de couleurs, 1891, retouché en 2012


On trouve dans le catalogue des œuvres du peintre Jean-Léon Gérôme, au milieu des spectacles pompeux et des portraits de naïades en caoutchouc quelques gemmes au charme inattendu, comme « Deux générations sur le pas de la porte » du musée de Rouen, ou « Le marchand de couleurs », reproduit ci-dessus. Ce dernier était exposé dans la récente rétrospective parisienne, fin 2010. L'étiquette le situait au Museum of Fine Arts de Boston, mais il ne fait curieusement pas partie des cinq tableaux de Gérôme recensés dans les collections du musée.
Il est parfois appelé « Le pileur de couleurs ». En effet, sur le tableau original, un personnage pulvérisait d'un geste ample des pigments roses dans le panier à gauche, mais par un adroit subterfuge inspiré des meilleures méthodes de l'information chinoise et des journaux à sensation, la rédaction de Ce Glob est Plat a préféré le supprimer, le jugeant dissonant dans l'harmonie générale du tableau.

Gérôme avait peint un personnage manifestement posé en studio. L'attitude artificielle, raide comme le Vieil Horace dans le Serment peint par David. Les jambes dans une position indéterminable. Affublé d'une lumière qui se raccordait si peu à l'ambiance de la scène que ce corps qui ne projetait pas d'ombre semblait découpé dans un livre illustré et collé approximativement ici, quelques centimètres au dessus du sol.

Absolument conscient du sacrilège que constitue cette atteinte à l'intégrité du patrimoine de la France, Ce Glob est Plat proposera dans cette nouvelle série de massacrer également des tableaux italiens, par exemple en redonnant un peu de vie au sourire inanimé et enfumé de la Joconde, ou des tableaux espagnols, en effaçant certains angelots grotesques.

samedi 30 juillet 2011

La vie des cimetières (38)

Dans la série « Célébrons les libérateurs de l'humanité souffrante », nous saluerons aujourd'hui un prophète méconnu, Samuel Hahnemann, fondateur de l'homéopathie.
Parmi les croyances populaires en de fausses sciences, celle qu'il ensemença est une des plus tenaces, et elle est promise, comme l'astrologie ou la prévision météorologique, à un avenir rayonnant dans les siècles des siècles.
Le principe est simple, c'est la justice primitive du talion appliquée à la médecine « traiter les malades par des remèdes produisant des symptômes semblables à leurs maladies ». Pas trop fort, de manière infiniment diluée, sinon ils tomberaient encore plus malades. Disons-le tout de suite aux crédules, cette pénétrante innovation scientifique n'est pas applicable à toutes les affections, surtout si le patient souffre d'un membre arraché ou d'un éventrement intempestif. Mais on raconte que le procédé fonctionne quelquefois, sur des fidèles et dans les limites de l'effet placebo.

S'il ne soigna pas plus de malades que le mythomane « docteur » Freud, que les eaux douteuses des piscines sanctifiées de Lourdes, ou que la concierge du 23 rue de l'adjudant Siegfried Jambon, Hahnemann est toutefois devenu de nos jours un des plus fructueux bienfaiteurs de l'industrie pharmaceutique française. Quand on pense qu'il fut un temps persécuté par les pharmaciens dont il aurait alors mis le commerce en péril !

Le tombeau d'Hahnemann, quelque part dans le cimetière du Père-Lachaise.

En 1843 Hahnemann, pourtant prospère et reconnu, était enterré discrètement au cimetière Montmartre. En 1898, à la fin imminente de la concession et devant l'état d'abandon de la sépulture et le risque d'expulsion sans ménagement vers la fosse commune, les homéopathes internationaux organisèrent une souscription et le transfert de leur bienfaiteur vers le cimetière du Père-Lachaise, jugé plus chic.
Le récit de l'exhumation est délicieux. Dans le cercueil, conséquence des infiltrations d'eau, ne restait pour tête qu'une vague éponge dans laquelle ce qu'avait peut-être été jadis le docteur Samuel Hahnemann était dilué à dose tellement homéopathique qu'il en était méconnaissable. On le reconnut à quelques objets près de lui.
En 1900 était inauguré au Père-Lachaise le pesant monument actuel, surmonté d'un buste du prophète sculpté en son temps par l'excellent et onéreux David d'Angers, portraitiste des célébrités. On peut lire, sous le buste « Non inutilis vixi - je n'ai pas vécu en vain ». Et ce ne sont pas les laboratoires Boiron qui le démentiront.
Le tombeau fait depuis l'objet de soins attentionnés.

samedi 26 septembre 2009

Ghirlandaio

Durant la seconde moitié du 15ème siècle à Florence, l'atelier du peintre Domenico Ghirlandaio et de ses frères était aussi productif et réputé que celui de Sandro Botticelli. Ses jeunes femmes qui s'ennuient avec dignité dans d'étranges scénographies géométriques décorent encore aujourd'hui d'immenses surfaces des plus belles églises florentines. Quelques tableaux de chevalet admirables subsistent, notamment ce portrait de jeune femme actuellement au musée de la collection Gulbenkian à Lisbonne, au Portugal.

Il est difficile d'en trouver une reproduction satisfaisante. En 2005, J.B. est allé sur place et en a fait une photographie, déformée et mal exposée. Il la partage sur le site Flickr. Les outils graphiques numériques modernes permettent de corriger les défauts de la photo et de la transformer en une reproduction idéalisée, rêvée, du merveilleux tableau de Ghirlandaio.