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dimanche 20 avril 2025

Ce monde est disparu (18)

 

Le Metropolitan Museum of Art de New York a fièrement annoncé qu’il exposait désormais en salle 829 un portrait d’Yvonne Suys à 7 ans, peint par Fernand Khnopff en 1890, acheté* par une fondation étasunienne chez Millon-Belgique le 18 janvier 2024 contre 650 000$, et confié donc récemment au musée en prêt à durée indéterminée.

* cliquer sur "Read more" pour une notice détaillée en français


Un tableau qui disparait aux enchères pour réapparaitre après quelques mois au Metropolitan, ce musée si généreux en belles reproductions, quelle chance, se dit-on. Mais la fondation prêteuse a ses caprices, et le musée a une conception particulièrement floue du droit d’auteur et du domaine public ; un tableau peint après 1880 - la limite est très vague, à 50 ans près en plus ou en moins - ne sera reproduit que par une médiocre vignette, et zoom et téléchargement en seront prohibés.   

Évidemment, la règle nébuleuse s’applique à ce tableau de Khnopff, dont l'huile est pourtant sèche depuis 135 ans (et l’auteur depuis 104 ans).


Heureusement Ce Blog veille et fournit des images de bonne qualité en taille réelle qu’il est conseillé de conserver au frais, ci-dessus avec la photo du modèle et ci-dessous bordée de son beau cadre.


Il va sans dire que vous pouvez choisir d’aller voir l’original, il suffira d’effectuer les 15 000 prochains kilomètres de vos déplacements quotidiens en vélo plutôt qu’en voiture, et économiser ainsi suffisamment de dioxyde de carbone pour vous offrir un aller-retour vers New York en avion.


Note pipole : L’enfant modèle, née dans la haute bourgeoisie, épousera un champion d’escrime issu aussi de la haute bourgeoisie.

Ils exposeront leur riche collection de tableaux dans l’hôtel particulier qu’ils feront construire au cœur de Bruxelles.

Yvonne Suys mourra à 41 ans, 3 ans après son mari.


dimanche 13 novembre 2022

Nouvelles de l’autre monde

NB : Pour un lectorat inaccoutumé aux grands nombres, l’unité de mesure de cette chronique sera le million de dollars noté M$ (aujourd’hui 1M$ égale 1M€)

Vous l’avez certainement lu dans la presse unanime et admirative. Nous rêvions tous d’un monde sans guerre, sans maladies, sans grèves, sans inflation, sans intempéries. Les grandes religions l’avaient promis, et l’Agence France Presse vient de nous l’apporter sur un plateau d’or, agrémenté de chiffres mirobolants : la vente aux enchères par la maison Christie’s à New York des tableaux de la collection Allen, milliardaire regretté, fondateur de la société Microsoft voilà 50 ans avec Gates.

1622987500 de dollars pour 155 œuvres (en 2 journées). Essentiellement des tableaux. Tout est parti. Ah, vous non plus n’arrivez pas à lire ce nombre, vous ne fréquentez pas l’autre monde ? On peut l’écrire 1 622 249 500$, ou 1,622,249,500$, comme font les américains, pour faire croire que ce n’est qu’une suite de petits nombres. Soyons clair, ça fait un milliard et demi de dollars, en gros (ou 15 à 20 Airbus A320)

Détailler les tableaux, les records, comme l'ont fait certains journaux, ne serait que du remplissage. On trouvait dans la collection Allen tout ce que tout milliardaire américain bien élevé doit posséder, surtout des peintres américains, abstraits et contemporains, et des français de l’époque impressionniste et des alentours. Et puis on n’était pas là pour acheter un tableau peint par untel, mais un tableau de la prestigieuse collection du milliardaire Untel. La liste, les prix et les images sont en ligne (journée 1 et journée 2).

Présentons néanmoins pour les connaisseurs quelques remarques et de belles reproductions (n’oubliez pas qu’on ne reverra peut-être plus ces tableaux qu'à l'occasion du décès des milliardaires qui viennent de les acheter).


Tout d'abord, tableau célèbre mais incongru dans cette collection, un beau tondo de Botticelli, la Madone du Magnificat (un détail ci-dessus à gauche) est parti pour un prix dérisoire (49M$), si on le compare à deux Botticelli vendus récemment par Sotheby’s, en 2022 pour le même prix un Christ pleurnichard peint à la chaine par l’atelier, et en 2021, pour le double du prix, un joli portrait fraichement repeint (il faut dire qu'il existe 4 ou 5 versions d'atelier de ce tondo. L'original serait celui du musée des Offices). 

Puis une très belle reproduction du tableau record de cette vente record, le petit (55cm) tableau des Poseuses dans son atelier par Seurat, reproduit ci-dessus à droite et dans tous les journaux, mais pas dans cette qualité (ici deux fois ses dimensions naturelles).

Enfin un Le Sidaner féérique et vénitien (illustré plus haut) et très grand (presque 2 mètres). Le Sidaner, qui n’aura jamais vu autant d’argent (2,1M$), et qui pourtant fait beaucoup baisser la moyenne de la vente (10M$ par œuvre).

Voilà, vous n’avez qu’entraperçu l’entrée du paradis, on raconte dans les couloirs du royaume céleste que la richesse de Paul Allen n’atteignait pas le dixième de la fortune personnelle de Bill Gates. Imaginez la collection !
Après déduction du prélèvement de l’organisateur et des taxes, grossièrement 300M$, le produit de la vente sera consacré à la philanthropie, claironne le même organisateur. On n’en saura pas plus, mais notre monde ici-bas en ira nécessairement beaucoup mieux... 

C’est déjà sensible.