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jeudi 20 juillet 2023

Histoire sans paroles (45)

Vous ne supportez plus l’azur, l’azur encore, les vacances, les foules à l’état pâteux, les loisirs de masse ?
Alors choisissez L’enfer, c’est à Thiers dans le Puy-de-Dôme, en Auvergne.
On se croit avertis, on pense que l’Enfer est une abstraction, une chimère, une hantise de simple d'esprit, alors qu’il est là, près de nous, rafraichi par les cascatelles de la rivière Durolle. 
Vous y serez sans doute seul, mais pas pour longtemps. Bientôt nous y serons tous.

mercredi 8 janvier 2020

Histoire sans paroles (34)


Orcival, en Auvergne, un toponyme qui tinte doucement, comme une clochette, la vallée de la source, peut-être, ou vallée de l’ours, et une histoire somme toute assez commune ; une relique de la Vierge en personne, parait-il, une statue reliquaire de bois, couverte d’argent et d’or, un pèlerinage assez populaire pour construire en écrin une magnifique église à flanc de colline, romane vu l’époque.
Six siècles plus tard, 1789, le grand village traverse l’Histoire sans dommages, mais devient peu à peu un petit bourg, une localité lit-on parfois, un endroit. Restent un pèlerinage annuel au printemps, pour les fêtes de l’Ascension, et une description complète de l’église, savante et surannée, sur un site du ministère de la Culture.


lundi 16 décembre 2019

Souvenir tendancieux du Puy


Pour le voyageur qui voudrait garder en mémoire une image de la belle cathédrale du Puy-en-Velay, mais en effacer l’indécente Vierge rose qui la domine de son promontoire jupitérien, le plus difficile sera de trouver un angle favorable où celle-ci n’apparait pas. Cela demandera un peu d’imagination.
Mais il pourra alors exhiber ses photos sans risquer les quolibets peu charitables que susciterait sinon cette perspective curieuse qui donne l’impression d’un trucage, d'une maquette qui ne respecte aucune proportion, et qui éveillerait les soupçons sur un prétendu voyage lointain, alors que la photo semble prise dans le parc d’attraction de la France miniature, à Élancourt près de Paris.

Cette Vierge inexpressive et sulpicienne était dit-on d’un rouge tuile, délicatement repeint en rouge cuivré en 2013. En fait elle parait le plus souvent rose orangé.

Alt Alt
Au lieu de visiter ce monument vaniteux fait de la fonte des canons de la guerre de Crimée en 1860, et équipé d’un escalier interne de 3 étages et de quelques hublots, le sage gravira de préférence les sombres ruelles pentues de la vieille ville du Puy, jusqu’à la cathédrale.

Essoufflé, il aura l’impression d’y entrer par la cave, croisera un aveugle de bois et sur des bas-reliefs usés des êtres émergeant à peine de la pierre, et il s’arrêtera devant la ténébreuse Vierge noire et l'enfant divin qui surgit de son manteau comme la créature monstrueuse dans le film Alien

La cathédrale est sombre, le beau cloitre, encaissé et oppressant. Le lieu est désert.
Il recevrait cependant plus de 1000 visiteurs par jour, en moyenne !
Des fantômes, peut-être. Ou alors, l’obscurité les dissimule. En 75 ans la ville du Puy a perdu, avec régularité, près d’un tiers de sa population.

dimanche 25 novembre 2018

La vie des cimetières (84)


On pensait le cimetière de Saint Bonnet-Laval au bout du monde. Mais quand, après l’avoir dépassé, puis avoir contourné le lac de barrage sur la Truyère, à peine 100 kilomètres plus loin, au sud de Saint-Flour, on gravit la pente qui mène à l’église Saint-illide, on découvre alors son antique cimetière, et on réalise qu’il y a certainement plusieurs bouts du monde.


Le cimetière surplombe l’église, qui a plus de huit siècles mais dont il n’y a rien d'autre à dire, et le château d’Alleuze, dont les livres disent qu’il a laissé quelques traces dans les récits historiques sur la guerre de 100 ans, incendies, évêques, prison. Depuis 800 ans il se défait lentement sur son promontoire, mais l’Encyclopédie précise qu’il est « maintenu dans cet état de ruine ».


L’endroit est herbu, moussu, rouillé, abandonné, le Christ est crucifié sur un fragment de vieux tuyau, incomplet, la gravure des tombes est illisible.
Autour, il n’y a plus de temps, au point qu’y ont été tournés, quelquefois, des films populaires avec des résistants et des extraterrestres.
Et on sent la réalité nous échapper, et qu’à s'y attarder on perdrait la raison, sans secours possible, car même les réseaux téléphoniques n’y vont plus.




samedi 18 juin 2016

Monuments singuliers (2)



Le monument aux morts pacifiste de Commentry

Parmi les rares monuments aux morts qualifiés de « pacifistes » parce qu’ils n’exaltent pas le sacrifice des vies humaines pour une patrie fictive, celui de Commentry dans l’Allier en Auvergne est certainement le plus discret.
Sculpté par Félix-Alexandre Desruelle et inauguré en 1924, il est érigé à l’écart du centre ville, rue Thivrier près des anciennes forges et de l’usine sidérurgique dont l’activité a continument décliné jusqu’à devenir récemment un centre de recyclage à hauts risques chimiques.

Il représente un paysan appuyé sur sa faux qui vient de découvrir en fauchant les blés une sépulture improvisée, une petite pierre dressée sur laquelle est posé un casque de poilu. La scène est soulignée par une modeste épitaphe effacée par le temps « La ville de Commentry à ses enfants victimes de la guerre ».
La liste des victimes est gravée au dos du monument, face au mur de l’usine.

lundi 16 mai 2016

La vie des cimetières (69)

Léglise de Colamine sous Vodable en Auvergne et son cimetière. 
Le commentaire touristique sur téléphone mobile n'est pas surtaxé.


Isolée au milieu des prés et des champs l’église Saint-Mary de Colamine-sous-Vodable dans le Puy-de-Dôme aura bientôt mille ans.

Il ne s’y dit plus de messe depuis longtemps, ni d’oraison funèbre au cimetière qui l’entoure.
Parfois une animation culturelle agite un peu le silence, et les vaches rousses, somnolentes, tournent mollement la tête en suivant les passants de leurs yeux tristes.






dimanche 20 décembre 2015

Les animaux à carreaux de Gilles Aillaud

Gilles Aillaud, Otarie et jet d'eau, 1971, détail (collection M. & M.B.)


Un peu philosophe, un peu décorateur de théâtre, un peu écrivain, Gilles Aillaud était né à Paris en 1928.

En octobre 1965, avec deux amis agitateurs politiques (1) et l'aide de trois autres peintres (2), il assassinait Marcel Duchamp, l'artiste le plus important du 20ème siècle, le fondateur de l'art conceptuel, en l’étranglant et le précipitant nu et émasculé du haut d'un escalier.
La suite des huit toiles qui narrent l’évènement est aujourd'hui au musée de la reine Sofia, à Madrid. Duchamp mourra trois ans plus tard, cette fois réellement.

À l'époque Aillaud fréquentait déjà la ménagerie du Jardin des plantes et le zoo de Vincennes. Il avait été marqué, enfant, par le décor des jardins zoologiques et ne s’en était jamais remis. Fasciné par les grillages, les carrelages, les mosaïques, les plans d’eau, les barreaux dont les ombres formaient des motifs géométriques obsédants, il s’était mis à les peindre à l’huile sur des toiles de grand format.
De temps en temps apparaissaient une forme vague et molle, des taches indistinctes, des zébrures, des ocelles, c’était un animal.
Il représenta ainsi pendant plus de vingt ans des coins de ce monde en miniature, avec une neutralité distante.

Plus tard, dans les années 1980, apprenant que des animaux se trouvaient encore en liberté dans la nature, il s'envola pour le désert africain où il peignit alors les sables, les maigres herbes, les cailloux, les ondulations du sol et du ciel, et parfois un animal.
« Je peins des choses, je suis absolument incapable de peindre une idée. Je peins des choses parce que la force des choses me parait plus forte que toute idée. Pour nier une chose il faut la détruire, tandis qu’une idée, c’est du vent… » disait-il.

Il avait une passion pour Vermeer et pour Spinoza.
Puis il mourut à Paris en 2005.

Le Fonds régional d’art contemporain d'Auvergne à Clermont-Ferrand, après Rennes et Saint-Rémy-de-Provence, lui consacre une modeste et fascinante rétrospective jusqu’au 17 janvier 2016.
Vous regretterez un jour de ne pas y être allé.

***
1. Eduardo Arroyo et Antonio Recalcati (avec Aillaud) ont peint et figuré sur 5 toiles.
2. Fromanger, Biras et Rieti ont exécuté les copies des 3 œuvres de Duchamp.

 


FRAC de Clermont-Ferrand, exposition Gilles Aillaud, décembre 2015.
 

vendredi 13 novembre 2015

La vie des cimetières (67)

Quelques cimetières croisés sur les routes d’Auvergne...

Au sujet de l'Auvergne, Alexandre Vialatte disait qu’elle est pleine « de proverbes et de grand-mères qui enseignent dès la tendre enfance à faire du quelque chose avec du je ne sais quoi, en l'économisant sans cesse. Il n'est pas rare - poursuivait-il - d’y voir des gens partis de rien qui arrivent au même endroit au bout de leur existence. D'autres qui arrivent à du je ne sais quoi avec beaucoup de persévérance. D'autres qui partent de tout et qui n'arrivent à rien. Mais, plus généralement, avec du presque rien ils arrivent à du quelque chose. »

C’est dire sa profonde connaissance de l’être humain, et de l’Auvergne. C’était dans « Chronique du rien et même du presque rien » le 20 mars 1962 dans le journal La Montagne de Clermont-Ferrand.

Ça commence bien, Saint-Bonnet-de-Montauroux dont voici le cimetière n'est pas vraiment en Auvergne, mais dans le département de la Lozère, à 3 kilomètres de la frontière de la Haute-Loire.

Cimetière de Polignac, dans le département de la Haute-Loire (tout de même !).

Minuscule cimetière de La Godivelle, dans le Puy-de-Dôme.

Entrée du cimetière de La Godivelle.

samedi 10 octobre 2015

Le Maitre de Moulins

Jean Hey ou Hay (alias le Maitre de Moulins) : trois anges du panneau central du triptyque de la Vierge de l'apocalypse, vers 1500. On ne trouve pas de bonne reproduction du triptyque sur internet.


Il ne fait pas de doute que si le triptyque de Jean Hey, la Vierge de l'Apocalypse, était exposé au Louvre de Paris, sur un mur normalement fréquenté et sous une honnête lumière zénithale, il éclipserait rapidement les plus grands chefs-d'œuvre du musée.
On viendrait des antipodes admirer ses fines nuances colorées, la suavité de ses volumes, la grâce naturelle des visages, notamment des douze anges du panneau central, douze fois le même modèle, qui mime avec application les poses et les sentiments demandés par le peintre sans parvenir à vraiment masquer, à l'égard de la scène qu'il simule, son orgueilleuse indifférence.

Mais en réalité le triptyque est conservé depuis cinq cents ans dans la cathédrale de Moulins-sur-Allier, en Auvergne, aujourd'hui rassemblé dans la Chapelle des évêques, sur le flanc nord.

Un guide obligatoire muni d'antiques clefs vous conduit dans la salle d'exposition, derrière une vieille porte sonore.
Sur le mur de gauche, deux répliques en grandeur réelle reproduisent le revers des deux panneaux latéraux du triptyque, peints en grisaille, et que des précautions de conservation empêchent de manipuler. Ce sont des photographies fantomatiques délavées par les années.
Et à droite, sur une estrade élevée de quelques marches trône le triptyque, le trésor de la ville de Moulins, cinq mètres au-delà d’un cordon infranchissable.

N'imaginez pas que vous pouvez alors contempler sereinement le joyau de Jean Hey. Car une malédiction poursuit les plus beaux chefs-d'œuvre de la peinture conservés dans les édifices religieux, l'ignorance (et peut-être l'économie). On croit qu'il est plus convenable de les exposer dans la pénombre, alors qu'en vérité la peinture à l'huile jaunit dans l'obscurité et revit à la lumière indirecte du jour.
L'amateur qui a visité dans la cathédrale Saint Bavon de Gand le polyptyque de l'Agneau mystique de Van Eyck, avant qu'il soit démembré et lessivé dans la longue phase de restauration actuelle, se rappellera la déception d'avoir peiné à distinguer quelques vagues formes dans l'ombre, alors que le peintre s'est ingénié à couvrir chaque centimètre carré de son immense œuvre de détails d'une merveilleuse perfection naturaliste, peints pour être admirés.

Le triptyque de Moulins subit la même punition. L'éclairage est déficient, la distance trop respectueuse, la récitation du guide sans répit et l'exhibition minutée.
On devra donc le vénérer plutôt que le contempler.
Le photographier est également interdit. L'ordre en viendrait de Paris. On peut excuser le mensonge, parce que les conditions de prise de vue seraient de toute manière trop difficiles, et qu'il faut bien additionner quelques ventes de cartes postales aux maigres recettes des billets d'entrée, pour payer la femme de ménage qui l'époussète de temps en temps.

Le sort du triptyque ne serait d'ailleurs pas meilleur s'il était hébergé à quelques pas de la cathédrale, dans le Musée des beaux-arts Anne de Beaujeu, car la collection de peintures, exclusivement du 19ème siècle, y est entassée comme dans un cabinet des siècles passés, en couches successives jusqu'au plafond, et dans une obscurité presque complète.

Cependant la renommée de l'œuvre est maintenant planétaire et il ne serait pas étonnant que quelque édile en quête de visibilité électorale fomente un jour un plan machiavélique pour soustraire le joyau aux griffes du clergé moulinois.
Le rêve d'un triptyque baigné de lumière sur les cimaises d'un grand musée régional, voire du Louvre, se réaliserait alors.

Et puis, après quelques années, sa trop grande notoriété obligerait les conservateurs à le confiner, comme la Joconde, dans une cage de verre blindé à l'abri des touristes fanatisés, cinq mètres au-delà d'un cordon infranchissable.
 

Charles Guilloux, lever de lune sur un canal, détail, vers 1900 
Moulins, musée Anne de Beaujeu.

mardi 29 septembre 2015

La vie des cimetières (66)

 Le cimetière de Ronesque-le-Roc (suite et fin) en couleurs


Du cimetière on aperçoit, au nord, fierté de l'Auvergne, la pyramide parfaite du Puy Griou, qui du haut de ses 1690 mètres éclipse celle du Louvre à Paris et celles du plateau de Gizeh en Égypte.

 
 
 
 

La vie des cimetières (65)

Topographie de Ronesque-le-Roc

35 kilomètres à l'est d'Aurillac, on arrivera par le nord, sur la route D459, on traversera Cros-de-Ronesque, et après 5 kilomètres, avant le hameau de Ronesque on prendra à gauche au panneau marron « Site de Ronesque ».
Dans les hauteurs, derrière quelques toits épars, on verra alors apparaitre la pointe d'un modeste clocher, la chapelle de Ronesque, érigée sur « le roc ».

C’est un plateau de basalte qui a résisté à l'érosion tandis que les monts du Cantal alentour s'arrondissaient lentement, comme une larme figée et aplanie de 300 mètres sur 200 à 770 mètres d’altitude.
La roche est si dure qu'on n'y a posé qu'un minuscule cimetière d'une trentaine de places, complet depuis longtemps, et une chapelle bâtie en 1888 sur les restes d'un édifice religieux installé là au quinzième siècle, dit-on.

Le hameau est en contrebas de 100 mètres. On ne sait pas très bien si des êtres y vivent. On ne les voit pas, peut-être plus rares encore que les habitants du cimetière sur le roc.


 Le cimetière de Ronesque-le-Roc en gris