jeudi 26 mars 2020

Bosch et les extraterrestres

Bosch, Les tentations de saint Antoine, détail (MNAA Lisbonne)

En 1972, la Planète - bon, d’accord, disons les États-Unis d’Amérique - confiait à Linda Salzman la réalisation de l’image que l’Humanité allait envoyer d’elle-même, gravée sur une plaque d’aluminium sur la sonde spatiale Pioneer 10,  à 50 000 kilomètres à l’heure vers Aldébaran, étoile la plus brillante de la constellation du Taureau, un peu à droite d’Orion.

Linda Salzman était la femme du médiatique et regretté Carl Sagan, savant vulgarisateur talentueux et influent, auteur du message codé qui accompagnerait justement le dessin sur la sonde, message critiqué alors parce que certains grands savants de la planète, vexés, n’étaient pas parvenus à le déchiffrer. Il faut admettre qu’il est délicat d’imaginer le niveau d’instruction d’un habitant de la banlieue d’Aldébaran.

Et quand on regarde l’image de l’humanité que Linda avait concoctée pour les extraterrestres, on ne peut se retenir de penser que c’était une erreur, probablement pour sa carrière artistique, mais surtout pour l’avenir de l’humanité.
On y voit deux bestioles en bonne santé, certainement affables, la chose à gauche semble s’exprimer pour les deux, d’un geste accueillant, la chose à droite esquisse un rond-de-jambe qui ne manque pas de grâce.
Mais voilà, pour un extraterrestre itinérant qui est certainement, comme beaucoup sur notre propre planète, sinon affamé, au moins perpétuellement en quête de nourriture, ces deux individus blonds nourris à satiété mériteraient bien un détour.

D’où le danger, en communication comme en science, d’idéaliser, alors qu’il importe d’être réaliste et purement descriptif. Il aurait suffi d’envoyer aux extraterrestres un tableau de Jérôme Bosch, le seul peintre qui ait représenté l’humanité comme elle est, sans fioritures. Ses figurations de l’humain avaient de quoi réfréner les extraterrestres les plus agressifs et les appétits les plus expansionnistes.

À ce propos rappelons aux extraterrestres, même très éloignés de la Terre, et aux Terriens qui sont équipés de l’électricité et d’un abonnement d’accès à l'internet, que quasiment tous les tableaux et dessins de Bosch (et de son « atelier »), sont depuis 2016 - en calendrier terrestre grégorien - en accès libre sur le site définitif du « Projet Bosch », extraordinaire travail d’expertise fait à l’occasion du cinq-centenaire de la mort du peintre. Et encore le mot « définitif » est-il faible, car même quelqu’un d’enfermé plusieurs semaines, jusqu’à plusieurs mois - ce qui ne peut évidemment pas arriver - n’aurait jamais assez de temps pour explorer entièrement, sur ce site à l’interface miraculeuse d’aisance, ce monde de Bosch en gigapixels (14 milliards pour le Jardin des délices, oui, milliards, faites le calcul 156 547 pixels sur 89 116).

Et ce monde est réellement celui que découvriront les extraterrestres. N’écoutez pas les interprétations discordantes sur le sens caché derrière les scènes. Bosch n’avait que notre monde comme modèle et n’a pas peint les métaphores d’un improbable autre monde. Clairvoyant, il a représenté ce qu’il voyait, en regroupant parfois plusieurs espèces sur un seul individu, afin de montrer les phénoménales potentialités de la vie. Sa démarche était pédagogique.

Bulletin de dernière minute : La sonde Pioneer 10 a disparu des écrans de radar terriens depuis 2003. Par chance, les techniciens les plus optimistes pensent, d’après l’encyclopédie Wikipedia, que le dessin de Linda n’atteindra la banlieue d’Aldébaran que dans 2 millions d’années, à peu près.

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Toutes les illustrations de cette chronique sont des détails du triptyque des tentations de saint Antoine, actuellement au musée national d’art antique de Lisbonne (cliquez dessus pour une expérience vraiment extraterrestre !).

samedi 21 mars 2020

Tableaux singuliers (13)

Boilly, Le tableau du Sacre exposé au regard du public dans le Grand Salon du Louvre, 1810 (Metropolitan museum, New York - Cat. Bréton et Zuber : 761P)

Jacques-Louis David (1748-1825) était un grand peintre français extrêmement officiel, courtisan au service de tous les pouvoirs, de la Révolution à l’Empire, et chef de file en France du néo-classicisme, qui était l’imitation, en plus pompeux encore, des œuvres de la Rome antique, elles-mêmes imitées de l’art grec classique. C'est aujourd’hui un des peintres qui occupent le plus de surface sur les murs du Louvre.

Louis-Léopold Boilly (1761-1845) était un petit peintre français, artisan appliqué et virtuose, sans autre idéal artistique que d’être le chroniqueur malicieux de la société bourgeoise de son temps, sans autre ambition que de mener cette vie bourgeoise qu’il aimait dépeindre et obligé pour cela de produire estampes et tableaux, dans des formats modestes et dans des quantités industrielles (1).

En février 1808, puis en 1810, David, premier peintre de l’empereur, exposait à Paris une grande machine de propagande de 10 mètres par 6, commandée et supervisée par Napoléon, et le représentant couronnant Joséphine dans la cathédrale Notre-Dame de Paris, le 2 décembre 1804, en présence de centaines de figurants, dont le pape Pie 7 et de nombreuses personnalités qui n’avaient pas toutes participé à l’évènement (dont David lui-même).
Le succès fut impressionnant. On achetait des copies gravées comportant une légende et des numéros permettant de localiser sur la toile les personnalités à remarquer.
David en exécutera 10 ans plus tard une réplique presque identique aujourd’hui dans le château de Versailles.

À l’époque, Boilly usinait petit portrait sur petit portrait, éblouissait le bourgeois par ses trompe-l’œil de pièces de monnaie éparpillées sur une table et de fausses estampes à la vitre brisée, et se délectait, dans des scènes de genre (2), à modeler les femmes dans les drapés sinueux de robes de style Empire.

Devint-il un moment las de cette vie confinée de peintre de boudoir, de jouer le rôle de la fourmi de la fable quand David, la cigale, triomphait ? Ou plus concrètement pensa-t-il profiter des retombées du succès du peintre de l’empereur.
Il lui demanda l’autorisation de dépeindre la réception de son chef d’œuvre par le public parisien en 1808. David le reçut aimablement dans son atelier et ne lui montra pas la toile car elle était alors roulée, mais nombre de copies gravées circulaient alors.

Humblement, Boilly en fit un tableau de 83 centimètres par 62, son échelle habituelle ; pas un chef d’œuvre, mais un savoureux travail de miniaturiste.
Dans la foule, il distribua des personnalités qu’il appréciait, deux écrivains et un acteur oubliés aujourd’hui, son fils Julien, le peintre Hubert Robert au centre sous le plumeau rouge, le sculpteur Houdon, à sa droite le visage à moitié caché, et son propre autoportrait de profil à l’extrême droite du tableau, derrière sa famille probablement, et devant le docteur Gall (3), qui regarde le spectateur.
Cherchant à inscrire en entier la toile de David dans son tableau, il en a nettement réduit les vraies dimensions, et sérieusement mitigé la grandiloquence en le plaçant dans la pénombre, et en figurant sous la lumière au premier plan, comme à son habitude, des personnages occupés à des activités frivoles, papotages et séduction, et assez indifférents à la toile de David.

Le tableau ne fit pas un triomphe. Exposé lors d’un hommage à David en 1826, il ne trouva acquéreur qu’en 1829, 19 ans après sa réalisation.
De retour sur le marché de l’art à Drouot en 1982, le Louvre se le faisait souffler par le richissime Charles Wrightsman, dont la femme en faisait don en 2012 au Metropolitan Museum de New York, où il n’est pas exposé.
On ne verra peut-être jamais le modèle gigantesque du Louvre escorté de son interprétation par Boilly. Les termes du legs en interdisent le prêt à d’autres musées.


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(1) Le premier catalogue raisonné de Boilly, par Bréton et Zuber, édité chez Arthena en 2019, lui attribue 2853 œuvres dont 1420 peintures. Avant la naissance de la photographie, Boilly était le photomaton de la bourgeoisie parisienne. Il peignait à l’huile en une seule pose de 2 heures un portrait fin et très ressemblant de 15 centimètres par 21. Il aurait dit en avoir peint 4000 à 5000. Les auteurs qui admettent leur travail de recherche incomplet en ont recensé 784.
De nos jours, Boilly n’est pas totalement oublié, essentiellement pour la précision de son témoignage sur les habitudes vestimentaires et sociales à Paris au début du 19ème siècle, et pour ses facétieuses études d’expression caricaturales et têtes de grimaces.
(2) Boilly aurait demandé que soit seulement indiqué « peintre de genre » sur sa tombe. Sa volonté a été respectée. L’épitaphe est encore lisible au cimetière du Père-Lachaise, division 23.
(3) Le docteur Gall, peu apprécié de l’Académie des sciences qui désapprouvait son manque de rigueur, était le célèbre inventeur de la phrénologie. Il savait repérer, à la forme d’un crâne, la bosse des mathématiques ou les protubérances de l’immoralité.

dimanche 15 mars 2020

Le jour où la Terre s’arrêta (flash-info)


Pas d’affolement, ça n’est qu’une image, la Terre tourne encore, mais une grande part des activités humaines a soudainement cessé, comme dans le film, louable mais tellement mal réalisé, de Robert Wise en 1951.
Depuis le 13 ou le 14 mars 2020, tous les musées du monde sont fermés (1), sans date de réouverture, à cause d’un petit animal mesquin mangeur de fourmis et en voie d’extinction que l'homme transforme en bottes, en escalopes et en produits cosmétiques (2).

Raphaël Sanzio, peintre officiel des papes de la Renaissance, qu’on disait au 19ème siècle le plus grand de tous les temps et qu’on juge aujourd’hui bien mièvre, a été le premier artiste à faire les frais de cette vengeance du pangolin.
L’énorme rétrospective que Rome consacrait au cinq-centenaire de sa mort a été interrompue, sans doute définitivement, après trois jours seulement (3).

C’est le moment d’aller se promener dans l’immense parc et les jardins du château de Versailles. Vraisemblablement désertés, ils restent ouverts pendant l’épidémie, contrairement au château, et sont peut-être même gratuits tous les jours (4). La période de protection hivernale des marbres n’est pas terminée et les statues voilées y promènent sans doute encore leur silhouette fantomatique.

Et n’en parlez pas à vos voisins, histoire de ne pas créer une affluence virale exponentielle qui deviendrait rapidement coupable.

Mise à jour le 17.03.2020 à 7h30 : Mais le bonheur est éphémère. L'ensemble du domaine de Versailles vient d'être fermé, et le site internet rouvert. À Londres la National Gallery reste ouverte mais les expositions prévues pour attirer beaucoup de public sont reportées.
Mise à jour le 18.03.2020 à 8h30 : À Londres la National Gallery vient de fermer, comme le British Museum et les autres musées et spectacles.

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(1) Sauf les musées anglais. La National Gallery de Londres, le 15 mars à 15 heures, est encore ouverte et l'affirme fièrement. 
(2) Après la chauve-souris ou le serpent, c’est maintenant le pangolin qui serait peut-être le vecteur du virus SARS‑CoV‑2 responsable de l’épidémie Covid-19. 
(3) Raphaël était mort à 37 ans à Rome, d’un organisme microscopique déjà, probablement le paludisme. 
(4) À vérifier sur place. L’entrée n’est gratuite en principe que les lundis, mercredis et jeudis, et le site internet du château est actuellement dans les choux.

vendredi 13 mars 2020

Le musée de l'avenir

Turner, le lac de Genève vu de Montreux, vers 1810, détail 
(localisation : quelque part dans une caisse dans la région de Los Angeles).

Dans une société moderne menée par l’économie libérale, le rôle des musées, très conservateurs par définition, et peu rentables, fait un peu tache. Ils ont bien du mal à se libérer de leurs habitudes méthodiques et poussiéreuses. L’objectivité, la neutralité scientifique sont de séduisantes mais inaccessibles chimères, alors laissons entrer dans les musées les grands courant populaires et lucratifs du moment, pensent certains.

Certes il y a eu des évolutions, on ne visite plus un musée sans être obligé de passer par la boutique, et la gestion des collections publiques ne peut plus se passer du soutien calculateur des grands mécènes, mais quasiment tous les musées du monde sont encore des endroits où l’on conserve, classe, étudie, apprend (et s’émerveille parfois).
Une mouvance progressiste avait bien tenté, en 2019, une nouvelle définition du musée plus inclusive, polyphonique, participative, critique, égalitaire et transparente. Mais, aurait-elle abouti, on sait bien que ce ne sont que déclarations, et que les sociétés humaines n’ont jamais réellement pratiqué les principes de leurs textes fondateurs.

Pourtant il arrive quelquefois que des Colomb, des Pizarro, des Gengis Khan ou des Napoléon, hantés par un idéal, piétinent toutes les idées reçues.
M. Govan, président du musée des Arts du comté de Los Angeles (LACMA), est de ces aventuriers téméraires sans qui notre monde ne serait pas où il en est. Et il est épaulé par P. Zumthor, architecte fameux dont B. Pitt, acteur à succès et généreux donateur, aurait déclaré qu’il « construit des moments, à partir de l'âme, pour l'âme ! ».

Tout le monde pensait que l’évacuation, à la frustrante surprise des visiteurs étrangers, de la plupart des œuvres du LACMA en 2019, notamment américaines et européennes, ne durerait que le temps, déjà trop long, de la refonte architecturale du musée, mais sous la pression d’une opposition qui s’organise le duo Govan-Zumthor a laissé filtrer un minimum d’information sur le projet muséal.
Et leur objectif est clairement de faire évoluer le musée vers une sorte de forum, de lieu de rencontre multiculturel. L’immeuble devient transparent et les espaces actuellement réservés à l’étude, la recherche et l’éducation disparaissent, ainsi que l’exposition des collections permanentes.
Les expositions, temporaires donc, ne sont plus conçues par les conservateurs du musée et ne se font plus autour de thèmes traditionnels comme les périodes, les civilisations, les matériaux, mais selon de mystérieuses affinités non précisées et par des personnalités invitées.

Alors ajoutés à la majorité des 1,5 ou 2 millions de visiteurs annuels qui écoutent les guides internationaux et pensent visiter un grand musée permanent, et aux conservateurs et experts du musée qui n’ont jamais été consultés, les plus contrariés sont les donateurs, fondations, prêteurs, qui ont jusqu’à présent fourni toute la collection du musée, qui ne sera plus exposée qu’épisodiquement et parcimonieusement.
Le plus important d’entre eux, la fondation Ahmanson, se lamente dans la presse de ne pas avoir prévu de clause de visibilité des œuvres dans l’acte de donation, et a décidé de suspendre toute acquisition (on trouve dans sa donation les noms de Chardin, Robert, Rembrandt, Honthorst, de La Tour, et un des bâtiments détruits - ou incessamment - était baptisé de son nom).

Le comté de Los Angeles, qui finance 18% du projet (et en prête 40%) et attribue toutes les autorisations, a donné en 2019 son accord pour les travaux. Dans les faits, ce sont les citoyens de Los Angeles, jamais interrogés sur le sujet, qui paieront.
Le budget du projet, aujourd’hui de 750 millions de dollars, n’est pas encore consolidé. Les travaux préparatoires à la destruction ont néanmoins commencé pour les principaux bâtiments. Tout le musée est fermé à l’exception de quelques salles. Les collections fragiles sont en caisse, probablement loin. Il n’y a presque plus rien à voir (53 œuvres aujourd'hui). Les visiteurs n’en sont pas clairement informés. Le prix du ticket d’entrée est toujours de 25 dollars.

L’avenir de la planète venant souvent de la Californie, tout est en place pour que la nouvelle définition du musée se propage bientôt, tel un virus.

Mise à jour le 21.04.2020 : Malgré le confinement général d'une Planète qui ne s'emploie plus qu'aux urgences vitales, et malgré un budget qui ne tient que par des promesses alors qu'une crise économique s'annonce, à Los Angeles, les travaux de destruction du LACMA continuent de plus belle.

samedi 7 mars 2020

Thyssen, une collection sidérurgique

Quelques détails parmi les plus beaux portraits de la collection Thyssen-Bornemisza. Dans le sens de la lecture : Van Eyck, Schiele, Baldung Grien, Aertgen de Leyde, Juan de Flandes, Titien, Rembrandt, Van Dyck, Nicolas Maes.


En ces temps où un bête virus, dont on prétend même que ça n’est pas un être vivant, a décidé qu’il était temps d’infléchir un peu la courbe démesurée de la population humaine, et où les gouvernements conseillent d’éviter les lieux trop publics, il est bon d’avoir en réserve quelque musée lointain dont la visite à distance, sur internet, est organisée pour le plaisir et le confort du voyageur immobile.
C’est exactement le cas du site du musée national de la fondation Thyssen-Bornemisza, à Madrid.

C’était la collection privée de la famille Thyssen, financée au long du 20ème siècle par les bénéfices extravagants de l’industrie sidérurgique, de l’armement et du financement de l’Allemagne nazie, jusqu’à la sinistre nuit du pogrom du Reich, le 9 novembre 1938, où la famille fuit l’Allemagne pour être dénoncée par le gouvernement de Vichy en juin 1940.

La collection se reconstitua après la guerre, avec l’empire industriel, et le nombre de tableaux épousant la courbe des profits, il advint que l’immense villa suisse au bord du lac de Lugano ne suffit plus. Ils envahissaient les annexes, les dépendances, les garages.
Le baron Thyssen céda alors 575 tableaux (sur 1600) au pays natal de sa cinquième épouse, Carmen, miss Espagne 1961 et ex-femme de Tarzan, contre 338 millions de dollars et quelques conditions autour d’une fondation, en 1993. Ce fut le musée national Thyssen-Bornemisza, situé en face du musée du Prado, à 100 mètres.

La baronne, qui avait attrapé l'addiction du baron, était également devenue collectionneuse pathologique, mais attirée vers d’autres écoles de peinture, et l’est restée après la mort de son mari en 2002.
Tourmentée par le manque de résidences où les exposer, et par des contraintes financières et fiscales plus prosaïques, elle prête aujourd’hui en permanence plusieurs centaines d’œuvres supplémentaires au musée Thyssen, dont beaucoup de toiles du 19ème siècle américain, et réserve sa copieuse collection de peintres espagnols à des musées Carmen-Thyssen-Bornemisza qu’elle a créés à Málaga, à Andorre et à Sant Feliu de Guíxols, ou au musée national d’art de Catalogne, à Barcelone.
Bienfaitrice des Arts et du royaume d’Espagne, elle ne compte plus les honneurs, les croix, les médailles, les prix, diplômes et récompenses, qui justifieraient certainement la création d’un musée qui leur serait consacré.

À Madrid, presque tous les siècles et les écoles de la peinture occidentale sont présents, les chefs d’œuvre et les grands noms pullulent. Tous, y compris les plus modernes, sont visibles sur le site en haute définition (2500 à 5000 pixels) et téléchargeables, et certains sont affichables dans le mode vertigineux dit Gigapixel, si bien qu’une mouche qui aurait choisi de ne pas faire le voyage à Madrid pour voir les originaux aurait tout de même l’impression d’y être en se posant sur votre écran d’ordinateur.
L’ergonomie du site, en anglais et en espagnol, est parfaite.

Mise à jour le 12.06.2020 : La baronne qui a décidément beaucoup de frais annexes, peu de parole et des avocats bien rémunérés, vient d'obtenir du gouvernement espagnol le retrait de 4 tableaux majeurs de la collection qu'elle prête au musée (moyennant arrangement fiscal) et l'autorisation de les exporter et les vendre. Ces 4 chefs-d'œuvre renommés de Gauguin, Degas, Monet et Edward Hopper lui apporteront certainement plus de cent millions de dollars d'argent de poche, voire le double ou le triple.

Quelques détails de scènes d'intérieur dans la collection Thyssen-Bornemisza, Willem Kalf, Jan de Beer, Jacobus Vrel. 
 
Quelques détails de paysages dans la collection Thyssen-Bornemisza, De Stael, Bricher, Church, James Hart. 

samedi 29 février 2020

La vie des cimetières (92)

Luca Signorelli, Fresques de l’Apocalypse, détail de la résurrection de la chair, vers 1500, cathédrale d’Orvieto, Ombrie.


CHRONIQUE FUNÉRAIRE DU 29 FÉVRIER
 
Pour tâcher de ne pas oublier leurs ancêtres disparus, les sociétés humaines ont imaginé des commémorations variées, monuments, statues, lieux sacrés, rituels, jours fériés dédiés aux célébrations. Il arrive que les jours fériés soient chômés, ce qui est bien agréable au travailleur et propice à une saine décroissance de l’économie.

La religion aujourd’hui dominante en France honore théoriquement ses morts le 2 novembre, mais elle les fête en pratique le jour de tous les saints, le 1er novembre, qui est chômé.
Et elle a créé vers le 2ème siècle un jour des ressuscités, le dimanche de Pâques, qui était suivi d’une semaine de festivités. Il n’en reste que le lundi de Pâques, chômé également.

Mais ce jour a deux défauts : on n’y fête qu’un seul ressuscité, fameux il est vrai, alors qu’il y en aurait des milliers à célébrer, et en nombre croissant, selon les témoignages de MM. Romero, Fulci et Fleisher, et surtout, cette première résurrection est nettement moins bien documentée que les plus récentes abondamment filmées, si bien que personne n’en connait la date avec précision, ce qui n’est pas commode quand on doit fixer à l’avance un rendez-vous familial pour « le lundi suivant le premier dimanche suivant la pleine lune suivant l’équinoxe de printemps », sachant que l'équinoxe en question n'est pas celui du calendrier astronomique mais un équinoxe fluctuant calculé selon la « méthode ecclésiastique ».

Toutefois, pour éviter de répéter une telle erreur, les sectes modernes ont mis en place des systèmes sophistiqués de surveillance horodatée de la résurrection de leur prophète.

Andy Warhol, prophète du Pop-art, qui avait révélé au monde le pouvoir du markéting promotionnel en reproduisant en série des photographies de Marilyn Monroe ou de boites d’une soupe très populaire, est enterré depuis 1987 auprès de sa famille à Bethel Park, près de Pittsburgh en Pennsylvanie.
Depuis le 6 aout 2013, pour que les médias ne perdent pas une seconde de son éventuel retour, sa tombe est filmée et diffusée sur internet en permanence, avec le son, des mouvements de zoom avant ou arrière réguliers, et de nuit un éclairage avec effet noir et blanc comme dans un film de George A. Romero. On peut rejouer les dernières 24 heures (par un menu surgissant en bas de l'image).

Alt Et comme il ne s’y passe jusqu’à présent pas grand chose, un service à distance d’ornement de la tombe par une boite de soupe ou des tournesols en plastique est proposé pour la distraction du fidèle qui s’ennuie (l’heure de dépôt est précisée au moment du paiement en ligne).
Hier, par exemple, une tempête de neige cinglait les boites rouges dans un spectacle du plus bel effet, et la caméra tressaillant sous le vent donnait l’impression que quelque chose était sur le point de se produire.

Une surveillance identique a été mise en place en décembre 2019 dans le cimetière de Highgate à Londres, avec un système de caméras fixées sur les arbres autour de la tombe de Karl Marx. Attraction principale du cimetière, elle voit passer 100 000 fidèles par an. Régulièrement dégradée, elle l’avait encore été à deux reprises en 2019.
L’entrée du cimetière étant payante, il ne serait pas étonnant que les vidéos de la tombe soient un jour rendues publiques moyennant un abonnement minime (on espère que l’entreprise qui a installé dans l'urgence les caméras sur les arbres en hiver a été informée du retour régulier des saisons, notamment du feuillage au printemps.)

Alors dans l’attente du spectacle grandiose de ces revenants célèbres, il serait particulièrement œcuménique de consacrer un jour férié et chômé à la célébration de tous les ressuscités de toutes les religions. Et quel autre jour des revenants conviendrait mieux qu’aujourd’hui 29 février, qui revient tous les 4 ans, parfois 8 ? (*)
Ce serait l’occasion d’un acte de justice sociale particulièrement écologique puisque le 29 février, quand il est travaillé, est offert malgré eux, par tous les salariés mensualisés, à la croissance débridée de l’économie nationale.
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(*) À propos du retour quadriennal (sauf exception) du 29 février, on apprend d’une chroniqueuse de la radio France-Inter et d’un chroniqueur du Journal du dimanche, qui le regrettent en chœur, que le mot « quadrisannuel » n’existe pas dans la langue française et qu’il n’y aurait donc pas de mot pour exprimer cette fréquence de 4 ans. Signalons-leur que le prix d’un dictionnaire est sans doute à la portée de la rédaction d’une radio ou d'un journal nationaux et modernes.

mercredi 19 février 2020

Dans les coulisses de Machu Picchu

Emanuel de Witte, intérieur de la vieille église (Oude kerk) de Delft vers 1650, détail (Metropolitan museum of art, New York).


Par son incongruité, la question aura peut-être retenu un instant votre attention dans le flux quotidien des informations délébiles : que s’est-il réellement passé ce 11 janvier 2020 sur le site sacré de Machu Picchu ?

Tentons de reconstituer les faits éparpillés dans les médias, mais balayons d’abord un point topologique et grammatical.
On a pu lire en effet, que des touristes désobligeants auraient « déféqué sur le Machu Picchu », ou « déféqué sur le Temple du soleil ». L’information, de l’Agence France Presse, a été reproduite par nombre de journaux sérieux, ici, ou . Et il ne s’agissait pas d’effets de style, ni de métaphores.

Alors précisons qu’une telle action n’est techniquement et grammaticalement réalisable que si on parle de la montagne, le Machu Picchu, qui a donné son nom à la ville en ruine, et qu’on ne voit jamais sur la plupart des photos du site archéologique puisqu’elles sont précisément prises du Machu Picchu même (le pic si pittoresque et systématiquement reproduit derrière les ruines est le Huayna Picchu).
On ne peut donc pas vraiment, dans l’enceinte de la ville, « faire » sur le Machu Picchu, encore moins sur le Temple du soleil, sans d’impensables acrobaties.

Le Temple du soleil est un bâtiment flanqué d’une tour dont le dernier étage était peut-être un observatoire astronomique, et au pied de laquelle une grotte naturelle est aménagée et sculptée en lieu de culte, mausolée où étaient peut-être entreposés les restes des officiels incas, avec éclairement astucieux par le soleil levant autour du solstice d’été, comme il se doit désormais sur tout monument antique.
Pour le protéger, l’accès en est interdit, par une simple ficelle.
Comme illustration de son article, LCI affiche une photo fournie par l’AFP qu’elle sous-titre « Le Temple du soleil… », et qui n’a rien à voir avec ce temple, mais qui est très belle tout de même.

Tout cela est bien approximatif.
On lit aussi que les contrevenants risquent jusqu’à 4 ans de prison, ou au moins 4 ans, selon les sources. Il est vrai que montrer seulement un postérieur déculotté sur le site du Machu Picchu est déjà un blasphème, et l’anecdote est fréquente comme en 2015, ou en 2018, de plaisantins expulsés par la police. « C’est un lieu sacré comme l’église de Lima » disent les autorités. N’en rions pas, on a en France des simagrées plus indignées encore à propos d’un bout de chiffon tricolore.

Alors en croisant les multiples paraphrases du communiqué de l’AFP, et les détails lus sur certains médias étrangers plus rigoureux, on pourrait résumer ainsi ce qu’il s’est passé le soir du 11 janvier 2020 au Machu Picchu : 5 jeunes touristes venant de divers pays d’Amérique du sud, et une de France, ont été surpris peu après la fermeture du site, vers 18h, dans la partie interdite du Temple du soleil. Des traces de souillures ont alors été constatées sur place. Une pierre tombée de 6 mètres était ébréchée sur le sol. L’un des touristes a reconnu l’avoir fait tomber et attend son procès pour atteinte au patrimoine culturel. Les 5 autres ont été expulsés et bannis du pays.

Au Pérou, Machu Picchu, site inca oublié plus de 3 siècles et redécouvert en 1911, est sacré surtout depuis qu’il a été consacré patrimoine mondial par l’UNESCO, en 1983, et qu’il fait l’objet d’efforts remarquables et constants pour augmenter le nombre de visites, mais pas nécessairement le bien-être des visiteurs.

Car ce qu’oublient de dire ces articles psittacistes, c’est qu’on aborde le site en montant déjà un dénivelé de 400 mètres, à pied, ou dans un bus surchargé, qu’arrivé à 2500 mètres d’altitude entre les deux sommets, la visite s’étend sur une surface accidentée et couverte d’escaliers de plus de 100 000 mètres carrés (10 hectares) d’un terrain habituellement humide et glissant, qu’une visite dure en moyenne 4 ou 5 heures, et qu’il est donc conseillé de s’hydrater généreusement (sans parler des désordres dans les habitudes alimentaires et digestives qu’occasionnent souvent ces transhumances de touristes avides de cultiver leur esprit).

Or il n’y a pas de toilettes sur le site de Machu Picchu. Il faut sortir de l’enceinte pour en trouver, et toute sortie est définitive (l’entrée se réserve des mois à l’avance).

On comprend, dans ces conditions, qu’un petit mausolée ombragé au cœur des ruines, à l’abri des regards, protégé par une interdiction d’entrer et garni de sièges accueillants sculptés et polis dans la pierre, a dû attirer plus d’une fois la convoitise de touristes pris d’un émoi impérieux.

Alors avant de punir le sacrilège, peut-être conviendrait-il de s’interroger sur les commodités minimales à mettre en place quand on espère accueillir bientôt 5000 visiteurs par jour et devenir la première des 7 merveilles du monde.
On éludera les balivernes sur les canalisations qu’il faudrait nécessairement installer et qui endommageraient les fondations du site ; les toilettes sèches ou à litière bio-maitrisée fonctionnent sans eau et sans odeur.
Il serait d’ailleurs temps d’installer cette variété de cabinet de soulagement dans tous les sites sacrés, en particulier dans les églises, traditionnels lieux d’asile où ont longtemps divagué même les chiens errants, s’il faut croire les peintres hollandais.

dimanche 9 février 2020

Au royaume du Danemark

Christen Købke, Vue de la citadelle de Copenhague depuis un grenier à grains, 1831, 43 x 51,7cm (SMK Copenhague). Cliquez sur l'image pour un zoom en haute définition.


Y a-t-il invention plus féconde que les frontières, les pays, les folklores, ces particularismes qui enrichissent la culture de l’humanité, parait-il ? Il est bien utile, il est vrai, lorsqu'on cherche les responsables de nos malheurs, de trouver des lignes pointillées imaginaires qui permettent de distinguer le bien du mal. Et puis cela permet de redécouvrir régulièrement, à la fréquence d’une ou deux générations, toute une culture oubliée entre-temps.

La génération de 1985 avait appris, à l’occasion d’une monumentale exposition (192 œuvres) sur « L’Âge d’or de la peinture danoise, 1800-1850 », au Grand palais de Paris, que le Danemark était un petit pays plat et prospère, entouré d’eau de mer, où avait fleuri au début du 19ème siècle une remarquable école de peintres rigoureux et raffinés, dont les plus adroits, malgré l’orthographe barbare de leurs noms, faite de Ø barrés et de Å auréolés, n’avaient rien à envier aux peintres d’histoire, de portrait et de paysage qui rayonnaient alors de la Prusse à la France.

Ils avaient pour nom Eckersberg, Købke, Lundbye, Sødring, Rørbye, Kyhn, Bendz, Skovgaard…

La génération suivante, en France, ne les a jamais connus (à part le sévère Eckersberg, leur professeur, largement exposé, notamment en 2016 par la fondation Custodia).
Il faut reconnaitre que ces lettres voisines mais introuvables dans l’alphabet français, et classées après le Z dans l’alphabet danois, en embrouillent sérieusement le classement et constituent de nos jours paradoxalement un handicap dans les médias numériques.

La génération d’aujourd’hui les découvrira donc, bientôt, du 28 avril au 16 aout 2020, 35 ans et 100 mètres plus loin, au Petit palais cette fois, dans une exposition de 200 œuvres, « L’Âge d’or de la peinture danoise, 1801-1864 ». Notons qu’en 35 ans l’Âge d’or se sera légèrement décalé et allongé de 13 ans, mais les peintres et les œuvres seront sans doute les mêmes.

Elle y découvrira surtout un artiste qui aurait été le plus important des peintres danois s’il avait vécu au-delà de 37 ans, Christen Købke (prononcer à peu près Keub-ké).
La couverture du catalogue de 1985 (illustration ci-dessus), 47 œuvres exposées alors (53 pour Eckersberg), et 3 ou 4 paysages exceptionnels au couleurs d’une subtilité rare révélaient chez Købke une précision et une élégance du regard qui ne se retrouvaient, à son époque, que dans les toiles de Caspar David Friedrich.
Et Købke ne souffrait ni du romantisme à la métaphore parfois trop soulignée de Friedrich, ni du classicisme ingresque un peu empesé d’Eckersberg.

Le Petit palais, clairvoyant, ne s’y trompe pas. Il a fait du détail d’une toile de Købke l’annonce de l’exposition sur son site internet (et peut-être la future affiche), et d’un des plus beaux paysages de Købke (et de l’histoire de la peinture - attendez de l’avoir devant les yeux avant de vous récrier), la première des trois illustrations de son diaporama sur la même page.

Et comme si tant de félicité attendue ne suffisait pas, le SMK, Statens museum for Kunst, musée national d’Art de Copenhague, capitale du pays dont on parle ici, vient d’ouvrir en ligne l'accès à l’ensemble de sa collection de peintures, gravures, dessins, sculptures et installations, et à quantité d’images de très haute qualité et libres de droits.
On y trouvera immanquablement des reproductions d’une partie des œuvres qui se préparent à voyager de Copenhague à Paris.

N’oubliez pas, dans vos recherches sur le site, en particulier parmi les noms d’artistes, que le æ, le ø et le å se trouvent à la fin de l’alphabet danois, après le z, et qu'il n'existe pas de peintre au nom de Kobke.

Mise à jour le 16.07.2020 : Vous aurez noté que l'exposition n'a pas eu lieu à cause d'un parasite planétaire. Néanmoins elle ne semble pas annulée, mais reportée du 22 septembre 2020 au 3 janvier 2021. Tout cela peut encore changer en fonction de l'actualité du virus.

Peter Ilsted, Femme préparant des chanterelles, 1892, détail (SMK Copenhague).
Jens Juel, Main au bord d'une table, c. 1790, détail (SMK Copenhague).
 

samedi 1 février 2020

Examinons les musées parisiens

Détail d’une photo du château de Mme de Provigny à Arcueil, photographes Séeberger frères en 1907, musée Carnavalet PH39154.


Enfin ! Depuis peu, les collections des musées de la ville de Paris sont visibles sur internet, sur un site gratuit ouvert à tous !

Ne vous attendez pas à y trouver les collections du Louvre, du musée d’Orsay ou du centre Pompidou, mais seulement celles des musées de la ville de Paris, c'est à dire du Petit Palais (qui se fait appeler musée des Beaux-Arts, avec des majuscules partout), des musées Carnavalet, Cernuschi, d’Art moderne, Cognacq-Jay et quelques autres. Ce qui est déjà pas mal. 320 817 objets aujourd’hui en ligne.

Malgré des affèteries d’affichage et des animations compulsives qui perturbent un peu la visite, erreurs de jeunesse, les informations disponibles sur chaque œuvre sont particulièrement riches, et l’outil de recherche est très bien conçu, qui place en tête des résultats ceux qui contiennent tous les mots d’une requête multimot, ce qui est plutôt rare.
On y trouve même l’anecdotique, approximatif et ridicule, mais très à la mode, critère de recherche par les couleurs, qui peuvent être combinées.

Outil idéal pour l’étudiant, le chercheur ou le scientifique, il le sera moins pour le voyageur immobile qui aime à se perdre dans l’admiration des détails d’un tableau ou d’une gravure, car le site souffre d’un défaut dû, peut-être, à une limitation volontaire, par économie : l’affichage des reproductions ne se fait pas, à l’écran, dans la meilleure résolution disponible, même usant du zoom, et quand, un peu désappointé, on décide tout de même de télécharger la reproduction libre de droits, on constate que le dossier obtenu contient, avec le texte détaillé du cartel, toutes les ressources visuelles et notamment des reproductions de haute qualité, jusqu’à 6000 pixels.

En dépit de cette petite contrariété, il convient de s’installer au fond d’un bon fauteuil pour courir voir l’exposition des 320 817 objets de la collection des musées de la ville de Paris, et d’en faire une promotion enthousiaste, car c’est un modèle pour les musées français, et un camouflet à la mesquinerie des grands musées nationaux, Orsay, le Louvre, Beaubourg, qui s’attribuent toujours des droits d’auteur illégaux sur les médiocres reproductions de leur collection.

Et si, bien entendu, la consultation d’une reproduction sur internet ne peut pas remplacer la contemplation de l’original, elle est bien souvent moins décevante et plus enrichissante, notamment quand l’œuvre réelle est exposée dans de mauvaises conditions de lumière, chose courante, ou quand elle n’est même pas montrée au public et s’empoussière dans des réserves, ce qui est le cas de la majorité des collections des musées, sans parler des dessins, aquarelles, gravures, jugés fragiles et qu’on aère seulement quelques jours tous les 10 ou 20 ans, dans la pénombre d’une exposition confidentielle.


Hubert Robert, Chapelle de la Sorbonne avec la voute de la nef effondrée, après 1800, huile sur toile 104 cm x 137 cm. Musée Carnavalet. Le site des musées de la ville de Paris ne précise pas, pour Carnavalet, si les œuvres sont actuellement exposées ou en réserve. La reproduction du site, manifestement anémique, a été un peu améliorée. Cliquer sur l'image l'affichera avec Google Photos et permettra de l'agrandir jusqu'à la dimension disponible de 5000 pixels.

jeudi 23 janvier 2020

Deux garçons avec une vessie



« Deux garçons se disputant un ballon (en vessie de porc) », reproduit ci-dessus, était le numéro 15 d’un ensemble de 108 chefs-d’œuvre du peintre Joseph Wright, de Derby (au nord de Birmingham dans les Midlands anglaises), exposés en 1990 à l’occasion d’une mémorable rétrospective à la Tate gallery de Londres, puis au Grand palais de Paris, et au Metropolitan museum de New York.
D’autres scènes d’enfants avec un ballon éclairées à la bougie, peintes par Wright vers 1769, étaient alors connues, dit le catalogue de l’exposition, mais aucune n’avait la singulière étrangeté de ce numéro 15.

Nombre d’amateurs d’art découvrirent alors Wright of Derby, à peine connu hors d’Angleterre. Sa touche onctueuse, ses paysages nocturnes, ses clairs-obscurs spectaculaires, l’originalité de son inspiration scientifique, les émerveillèrent.

Près de 30 ans plus tard, dans une ferme des Midlands, les propriétaires d’un tableau acheté par leurs ancêtres, qui figure deux enfants dont l'un gonfle un ballon, éclairés par une bougie, décidaient de le faire nettoyer. Le restaurateur, curieux, demandait l’expertise d’une galerie londonienne qui l’achetait illico pour le revendre en mars 2019 à la grande foire d’art européen de Maastricht, attribué sans surprise à Joseph Wright of Derby.

On ne sait pas le montant versé aux propriétaires des Midlands, mais on connait parfaitement la somme faramineuse que déboursera le candidat acquéreur, le musée Getty de Los Angeles, si la vente hors d'Angleterre est autorisée, car le tableau, dorénavant qualifié de trésor national, a fait l’objet d’une interdiction temporaire d’exportation, le temps que les institutions britanniques tentent de réunir 4 millions de livres sterling (5,2 M$), taxes comprises, nécessaires à la préemption.

En octobre 2019 la ministre anglaise des Arts publiait un appel pour trouver un acheteur au Royaume-uni et ainsi garder le tableau dans le pays où il a été peint (et cependant oublié).
Le musée Joseph Wright, à Derby, qui héberge déjà une trentaine de tableaux du peintre, parmi les plus beaux, a regretté que le musée n’ait plus, comme la plupart des musées anglais aujourd'hui, les moyens de tels achats, mais s'est réjoui que l’acheteur soit un musée américain qui promet d’exposer le tableau en public (le musée Getty possède déjà deux tableaux de Wright et n’en expose actuellement qu’un).
  
Le 16 janvier 2020, le délai légal écoulé, l’autorisation d’exportation était délivrée pour le tableau, reproduit ci-dessous, mesurant 73 centimètres par 93, peint vers 1769 par Joseph Wright of Derby, peintre anglais, et intitulé «  Two boys with a bladder (deux garçons avec une vessie) ».

Mise à jour 25.07.2024 : Reproduction en très haute qualité (10 000 pixels) fournie par le musée Getty.



jeudi 16 janvier 2020

2019, 2020, tout augmente

Il y a 500 ans déjà, dans les médias, l’avenir de l’humanité ne se présentait pas sous un jour très favorable. Ci-dessus le témoignage de Jérôme Bosch dans son jardin des délices (Madrid, musée du Prado).


Comme chaque année depuis 1989, le film de l’année 2019, celui qui mériterait d’emporter toutes les récompenses, les césars, les palmes d'or, c’est le zapping de l’année télévisuelle, minutieusement assemblé par Patrick Menais.
C’est sa 30ème édition (2016 manque, c’était l’année de son licenciement de Canal+).
Pour des raisons juridiques, le zapping s’appelle maintenant VU. « VU 2019, le VU de l’année » est diffusé sans frais jusqu’au 3 février 2020 sur le site France.tv. Les années précédentes de VU, 2017 et 2018, sont encore plus ou moins disponibles, ici et (prévoir 4h par année).

On y voit donc ce que la télévision française a montré d’un an de notre vie sur la planète. L’ingénieux Menais en a reclassé des centaines d’extraits à sa manière, et leur confrontation donne aux évènements une perspective singulière. Il en ressort une sorte de farce ironique, grinçante, noire.

Certains diront qu’ils n’y ont rien vu de nouveau, que le scénario et les idées fixes de Menais sont les mêmes depuis 30 ans, et qu’on y serine des sujets qui nous ont été chantés sur tous les tons à longueur d’année. Évidemment. Menais peint une fresque sur l’espèce humaine. Elle n’évolue pas, ou peu, à l’échelle d’une génération, mais il faut être juste, elle se surpasse d’année en année.
Et en 2019, certaines performances ont pulvérisé tous les records.

À commencer par un record dont tout le monde scientifique admet maintenant qu’il est un résultat des actions humaines, le record absolu de température en France, le 28 juin à 16h20.
45,9°C, presque 2 degrés de plus que le précédent record de 2003, couronnement d’une année riche en catastrophes climatiques, déluges, inondations et gigantesques incendies de forêt. Toutes choses si spectaculaires et hypnotiques qui font de l’actualité une superproduction hollywoodienne, avec une différence appréciable néanmoins, car dans les « films catastrophe » quelque héros désintéressé parvient toujours à sauver l’espèce humaine.
Sur ce point, l’inaction des gouvernements a atteint en 2019 des hauteurs inégalées.

Autre record presque absolu, les dividendes distribués aux spéculateurs actionnaires des grandes multinationales ont dépassé cette année ceux d’avant la crise financière de 2008, et la concentration de la richesse et donc du pouvoir s’en trouve renforcée et déshinibée, à l’image de cette dérisoire secrétaire d’État qui joue de sa position pour participer à des émissions populistes et populaires, et bénéficier de ce vedettariat pour promouvoir ses livres.

Et puis, prouesse sans précédent, la police n’avait jamais arraché impunément autant de mains ni crevé autant d’yeux de manifestants et de grévistes depuis longtemps, et c’est stupéfiant de voir sur ces vidéos trop furtives ce métier exercé avec un plaisir si manifeste à détruire anonymement ses congénères et avec la bénédiction des éditorialistes, des ministres et du président.

Finalement, une année plutôt réussie pour la télévision.
Que lui manque-t-il ? Le tir à balle réelle de la police sur des manifestants pacifiques, un accident nucléaire catastrophique qui contamine irrémédiablement tout une région dans le parfait silence des autorités ?
N’oublions pas qu'une attraction extraordinaire au cœur de Paris en avril, cette cathédrale qui s’effondrait sous les flammes, a diffusé sur la capitale, en même temps que les images d’un spectacle exceptionnel comme un don du ciel médiatique, environ 400 tonnes de plomb en fumée, soit 4 fois les émissions françaises d’une année en quelques heures seulement.

Alors ne soyons pas impatients, tout est prêt pour que le pire survienne.
Et il est bon d’en garder un peu en réserve pour que soit encore plus palpitant le zapping de 2020, et des années suivantes tant que la télévision fonctionnera.

mercredi 8 janvier 2020

Histoire sans paroles (34)


Orcival, en Auvergne, un toponyme qui tinte doucement, comme une clochette, la vallée de la source, peut-être, ou vallée de l’ours, et une histoire somme toute assez commune ; une relique de la Vierge en personne, parait-il, une statue reliquaire de bois, couverte d’argent et d’or, un pèlerinage assez populaire pour construire en écrin une magnifique église à flanc de colline, romane vu l’époque.
Six siècles plus tard, 1789, le grand village traverse l’Histoire sans dommages, mais devient peu à peu un petit bourg, une localité lit-on parfois, un endroit. Restent un pèlerinage annuel au printemps, pour les fêtes de l’Ascension, et une description complète de l’église, savante et surannée, sur un site du ministère de la Culture.


mercredi 1 janvier 2020

Billet suisse

En hommage à Étienne Dumont, trois activités sur le lac Léman par François Bocion (1828-1890), vrai peintre suisse. La pêche, la promenade vespérale et le dragage. La pêche vient de changer de main pour 41 000 euros à Niort.


Vous rêviez d’une information à jour, sérieuse et documentée sur les expositions, les musées, le monde de l’art, mais filtrée par un regard critique qui ferait preuve d’une certaine hauteur de vue et d’indépendance d’esprit ?

Ne cherchez plus. On ne trouve ça qu’en Suisse. C’est le blog d’Étienne Dumont, journaliste retraité, hébergé sur le site de Bilan.ch.
Un ou deux billets tous les jours, centrés sur la Suisse, certes, mais avec beaucoup d’actualités françaises, et aussi italiennes, allemandes, anglaises. Dumont voyage beaucoup.

Toujours érudit mais concis, ironique mais limpide. Essayez son billet récent sur la non-vente du panneau de Cimabue, par exemple.

Cimabue [prononcé Tchi ma bouée] est le grand-père de la peinture de la Renaissance en Italie. Alors quand on déniche une des ses œuvres, ce qui est rarissime, c’est dans le grenier ou la cuisine d’une vieille dame qui la prenait pour une icône byzantine sans valeur sur laquelle le petit neveu s’entrainait aux fléchettes.
C’est ce qui vient d’arriver à Compiègne. Disputée aux enchères jusqu’à 24 millions d’euros, la réalisation de la vente est suspendue à une préemption de l’État français qui a deux ans et demi pour réunir la somme ou se désister.
En attendant les héritiers de la vieille dame, modestes, devront régler plus de 100 000 euros d’assurance annuelle et peut-être quelques millions au fisc.

Lire les détails de cette aventure croquignolesque sous la plume d’Étienne Dumont est un plaisir. Il est étonnant qu’un site Suisse qui traite d’économie diffuse ces petits joyaux quotidiens sans les enfermer au fond d’un coffre réservé aux abonnés payants. Ça viendra certainement.

En attendant profitons-en.

Pratique : la Suisse n'a pas encore découvert les flux RSS (Réellement Simple Syndication), et l'abonnement par e-mail aux blogs d'opinion de Bilan.ch incluant les billets de Dumont, Newsletter, ne fonctionne pas, ce qui oblige à visiter cette adresse du blog tous les jours !

vendredi 27 décembre 2019

Passons, passons...

Passons, passons puisque tout passe
Je me retournerai souvent
Guillaume Apollinaire (Cors de chasse, dans Alcools)
Ici s'élève un grand débat entre la science et le vulgaire. La science prétend que les hommes sont répandus sur le pourtour de la terre, qu'ils ont les pieds à l'opposite les uns des autres, que partout le ciel est également sur leurs têtes, et que partout le point de la terre foulé par les pieds de ses habitants est le centre pour chacun. Le vulgaire demande pourquoi les hommes placés à l'opposite ne tombent pas : comme s'il n'était pas facile de répondre qu'eux aussi ont le droit de s'étonner que nous ne tombions pas ! Il y a une opinion intermédiaire, et que la foule si indocile trouve probable : c'est que le globe est inégal, semblable pour la figure à une pomme de pin, et que la terre est habitée tout autour de cette espèce de cône. 
Pline l’ancien, Histoire naturelle, Livre 2, (an 77 de l’ère actuelle)

Visiteur, qui pose pour la première fois ton regard sur ce blog, sache que tu arrives dans un endroit peu fréquentable (et d’ailleurs très peu fréquenté). Sous une apparence austère parfois attrayante, tu constateras qu’il peine à respecter les valeurs dites sacro-saintes, les nations, les drapeaux, les religions, les institutions.
Tu noteras qu’il méprise les souverains affublés d’un numéro, en l’écrivant en chiffres arabes, qu’il ne fête pas les dates anniversaires des grands hommes, ni des grandes femmes, qu’il informe sur les expositions généralement après leur fermeture, et surtout, qu’il escamote l’accent circonflexe sur les mots aout, gout, abime ou maitre.

Bref, tu abordes un blog inconvenant.
Si, en dépit de cet avertissement, tu as décidé de poursuivre, apprends qu’il va faire, sous tes yeux, un pas supplémentaire dans l’ignominie et piétiner ses principes en célébrant son propre anniversaire.


Le 27 décembre 2006, dans un premier billet balourd mais déjà assoiffé de vérités scientifiques et… disons artistiques, le blog réclamait des images, que jamais il n’obtint, du verso d’une admirable statue d’Arsinoë 2, qui venait de sortir des eaux de Canope, ville engloutie près d’Alexandrie dans la baie d’Aboukir. Elle gisait là parmi d’autres débris dans un dépotoir à statues dont la religion était périmée, sauvée d’un recyclage moins noble par l’engloutissement de la cité.
Toutes ses représentations, sur internet et dans la presse, la montraient de face, de trois-quart, très rarement de profil, et jamais de dos. Personne depuis n’a proposé de dévoiler ce secret.

Tu penses certainement, visiteur, que le titre du blog comporte déjà une faute d’orthographe et une ambigüité, soit une inversion de lettres s’il entend écrire le mot blog, et dans ce cas ce serait un anglicisme inélégant, soit une faute d’orthographe s’il veut parler de la Terre, hypothèse plausible à la vue de l’illustration du bandeau de titre.

L’équivoque était délibérée.
À un blog ambitieux, il fallait des lecteurs susceptibles d’accepter n’importe quoi. Et c’est dans les exclus, dont on entendait déjà que l’internet et les réseaux sociaux étaient envahis, chez ceux qui souffrent d’être dévalorisés, socialement, affectivement, et qui sont prêts à adhérer à n’importe quelle explication qui ne serait pas celle de la société qui les ignore, que le blog pensait trouver des lecteurs.

Les adeptes de la Terre plate étaient parmi les mieux inspirés. Leur refus pathologique d’accepter la réalité quand elle ne coïncide pas avec leur vision du monde a quelque chose de Don Quichotte, leur opiniâtreté à réécrire autrement les règles les plus élémentaires de la science a tout de la poésie pataphysique et des prémices d’une grande religion. À n’en pas douter, c’était l’avenir.

Un sondage fameux et très respectable, réalisé avec beaucoup de sérieux, de mathématiques, et de biais de toutes sortes par l’Ifop a largement confirmé ce choix depuis.
Il se proposait, souvenons-nous, de mesurer la croyance des Français dans les grands mensonges supposés manipulés par les pouvoirs occultes des sociétés secrètes ou des gouvernements corrompus. Pour donner un exemple de la qualité des questions imaginées par l’Ifop, parmi les complots proposés (liste p.99), étant sous-entendu que tous sont faux, la question suivante était posée « Êtes-vous d’accord ou pas avec l’affirmation que Dieu a créé l’homme et la Terre il y a moins de 10 000 ans ? », et 18% des sondés y répondaient positivement.
Vous noterez que ceux qui pensent qu’un dieu à créé l’ensemble il y a plus de 10 000 ans, hélas nombreux, ne pouvaient pas se prononcer, ni ceux, rares sans doute, qui pensent que tout cela s’est créé sans aide extérieure il y a moins de 10 000 ans. On mesure là toute la finesse de la méthode.

La question qui regarde le blog était plus claire « Êtes-vous d’accord ou pas avec l’affirmation qu’il est possible que la Terre soit plate et non pas ronde comme on nous le dit depuis l’école ? »
9% des sondés ont répondu positivement. Ce qui fait beaucoup de lecteurs potentiels.
Hélas, le sondage lui-même était noyauté par les servants d'un vaste complot mondial, car en 13 ans de chroniques d’une régularité astronomique, aucun adepte de la Terre plate n’a jamais pris contact ni laissé un commentaire sur le blog. Pas un lecteur de plus. Les spécialistes pensent aujourd'hui qu’il n’y a en réalité que quelques milliers de fidèles, et essentiellement aux États-Unis (Flat Earth Society).

Pourtant le blog avait concocté une documentation pointue destinée à soutenir les adeptes de la planéité, et déniché à l’appui de leurs certitudes le témoignage inestimable d’Augustin d’Hippone, le fameux Saint Augustin, lointain héritier des chimères de l’imputrescible Platon, et le plus grand penseur du christianisme. Il écrivait dans La cité de Dieu (16-9) au début du 4ème siècle :
« Quant à leur fabuleuse opinion qu’il y a des antipodes, c’est-à-dire des hommes dont les pieds sont opposés aux nôtres et qui habitent cette partie de la terre où le soleil se lève quand il se couche pour nous, il n’y a aucune raison d’y croire. Aussi ne l’avancent-ils sur le rapport d’aucun témoignage historique, mais sur des conjectures et des raisonnements, parce que, disent-ils, la terre étant ronde, est suspendue entre les deux côtés de la voûte céleste, la partie qui est sous nos pieds, placée dans les mêmes conditions de température, ne peut pas être sans habitants. Mais quand on montrerait que la terre est ronde, il ne s’ensuivrait pas que la partie qui nous est opposée ne fût point couverte d’eau. D’ailleurs, ne le serait-elle pas, quelle nécessité qu’elle fût habitée, puisque, d’un côté, l’Écriture ne peut mentir, et que, de l’autre, il y a trop d’absurdité à dire que les hommes aient traversé une si vaste étendue de mer pour aller peupler cette autre partie du monde. »
On comprend aisément qu'un argumentaire aussi robuste ait pu influencer plus de 1000 ans de science en Occident ! D’ailleurs Augustin mériterait d’être le parrain de ce blog. Car il ne faut pas blâmer les apôtres de la Terre plate. À leur manière, excentrique et malhabile, ils essaient de refaire l’histoire de la science. Les aurait-elle écoutés, l’espèce humaine n’aurait peut-être jamais réussi à transformer ce petit caillou, fut-il plat ou globuleux, en enfer.

Un autre échec de l’histoire du blog, parmi tant d’autres, fut la recherche pathétique du nom d’un sculpteur dont la signature peu lisible est gravée sur la statue d’une fillette assise sur une tombe, dans le cimetière monumental de Milan, en Italie du nord.
Pas la moindre proposition depuis 10 ans. Effrayant silence des espaces infinis de l’internet !

Mais ne nous attardons pas sur ces revers, et réjouissons-nous, puisque cette chronique célèbre un anniversaire. Voici une surprise, en vidéo. Elle dure 4 minutes. Le commentaire n’est qu’en anglais, mais à une minute et 13 secondes, vous verrez qu’on peut se passer de tout commentaire. Elle a été filmée en novembre 2016 au British Museum, à Londres, mais aurait pu l’être à Saint Louis, dans le Missouri, au printemps 2018 (à 15min.20) ou à l’Institut du monde Arabe de Paris, fin 2015 (à 20min.57) ou peut-être de retour au musée des antiquités de la Bibliotheca Alexandrina d’Alexandrie, en Égypte, qui sait ?


Enfin rappelons aux lecteurs de tout genre qu’une petite zone de saisie « Rechercher dans ce blog » permet d’y trouver n’importe quel mot incongru et de flâner parmi 680 chroniques richement illustrées, qui peuvent être lues avec des années de retard sans que la constance de leur futilité encyclopédique n’en pâlisse. Ils y dénicheront des informations insoupçonnées et inactuelles sur la peinture, le droit d'auteur et les cimetières, et sur toutes sortes d’animaux et de végétaux, éléphants, autobus, Tati, Kubrick, et même Mozart (mais que les inconditionnels de la planéité ou de la platitude ne cherchent pas les mots Terre ou globe, ils en ressentiraient sans doute de l’amertume).