dimanche 20 janvier 2008

Encore un grand pas pour l'humanité

Mosaïque pompéienne du 1er siècle,
squelette épicurien aux pichets de vin (Carpe Diem),
Naples, Musée national d'archéologie

Le 14 septembre 1998, le monde entier apprenait dans l'encyclique «Fides et ratio» du pape Jean-Paul II que «La foi et la raison sont deux ailes qui permettent à l'esprit humain de s'élever vers la contemplation de la vérité». En d'autres termes, on ne peut connaître la vérité qu'en conjuguant une réflexion raisonnable (la logique scientifique) et une adhésion irrationnelle (la croyance dans les dogmes de la religion).

On se rappelle peut-être moins que quelques mois auparavant, le 30 janvier 1998, la France avait mis en application la même idée extravagante, par la publication au Journal Officiel d'un décret surréaliste relatif à la mise sur le marché des médicaments homéopathiques. En résumé, les marchands de ces produits sont dispensés de tout essai pharmacologique, toxicologique et clinique (par exemple de tests en double aveugle) s'ils apportent la preuve, par référence à la littérature reconnue dans la tradition de la médecine homéopathique, que le degré de dilution et les composants utilisés en garantissent l'innocuité. Il y a ainsi deux catégories de médicaments : ceux qui devront démontrer leur efficacité, et ceux auxquels il suffira de croire.

Comme le dit Jean Brissonnet dans une étude passionnante sur la «médecine homéopathique *», ce texte de loi permissif et inégalitaire, imposé par l'harmonisation européenne, pouvait être interprété comme une forme de mépris envers les adeptes de l'homéopathie. Les laboratoires spécialisés ont-ils pris conscience d'un risque de perte de crédibilité auprès de leur clientèle, et est-ce pour cela qu'ils semblent avoir organisé des campagnes de tests à grande échelle directement sur leurs fidèles ?

Les récentes expériences des laboratoires Boiron sont à ce sujet éloquentes. Le 10 octobre 2007, un communiqué de l'agence française de sécurité sanitaire (AFSSAPS) informe que deux médicaments homéopathiques Boiron ont été intervertis durant 6 mois et prescrits pour ce qu'ils n'étaient pas, suite à une erreur d'étiquetage. Le communiqué de l'AFSSAPS dont le ton général est très rassurant, insiste sur l'absence de risque particulier pour les patients et l'absence de cas de pharmacovigilance déclaré.

Pareil test en double aveugle, directement sur la population pendant 6 mois, ça n'a pas de prix ! La loi demande la preuve de l'innocuité de ces médicaments.
Y a-t-il jamais eu plus parfaite démonstration ? Et plus que de leur innocuité, certainement de leur inutilité.

C'est pourquoi contrevenant ici à sa légendaire neutralité, Ce Glob Est Plat conseille à ses lecteurs de s'empiffrer de médicaments homéopathiques afin d'aider les laboratoires français à retrouver leur respectabilité qu'une loi inique venue de l'étranger continue de flétrir.

*
Cette étude date un peu (1999). Quelques informations plus récentes (2004) se trouvent sur le site de F. Roussia. Un entretien édifiant d'une heure avec Jean Brissonnet en 2010 est disponible sur le blog de JM. Abrassart (le balado du scepticisme scientifique).

2 commentaires :

Anonyme a dit…

C'est sûr, on ne peut, quand on a un tant soit peu de raison, qu'être convaincu de l'absence de principe actif dans un "médicament" homéopathique. Mais quand même, ça appelle quelques questions : puisque ça marche chez certains, pourquoi ne pas les prendre en charge, cela évitant du coup d'autres soins peut-être plus coûteux ? Et surtout, qu'est-ce qui leur à pris, chez Bois rond, de communiquer sur cette erreur forcément sans conséquences, hein, dis pourquoi ?
signé : un suresnois anneau Nîmes.

Costar a dit…

Tu as raison téméraire suresnois, pourquoi ne pas continuer à faire la fortune des pauvres laboratoires pharmaceutiques qui profitent si sainement de la crédulité des simples d'esprit, et qui par leur traffic d'influence ont réussi à propager leur croyance jusque dans les milieux médicaux?
Et puis sais-tu que les carottes rapées ça marche aussi chez certains. Peut-être suffirait-il qu'elles soient prescrites par un médecin bienveillant.