Monuments singuliers (6)
Le 27 novembre 1914, dans le nord-est de la France près de la localité de Vingré, dont l’article est vide dans l’encyclopédie Wikipedia, un sous-lieutenant quelconque dans un régiment d’infanterie qui avait perdu en trois mois plus de 60% de ses effectifs, donne l’ordre de repli à 24 fantassins pris sous la pluie d’un bombardement allemand.
Le commandant de la compagnie, contrarié, lui demande alors de ramener les hommes en première ligne.
Informé, le général de corps d’armée décide de fusiller les 24 fantassins, histoire de faire un exemple. Le sous-lieutenant oublie de mentionner son ordre de repli à ses supérieurs. Pour mémoire le mot fantassin a la même origine latine que les mots infanterie, enfant ou fantoche, « infans, celui qui ne parle pas ».
Le 3 décembre, le Conseil de Guerre désigne finalement 6 hommes au hasard parmi les 24, et les condamne à la peine de mort pour abandon de poste en présence de l’ennemi.
Le lendemain se déroule dans un champ la parade d’exécution. Un millier de fantassins atterrés défilent devant six cadavres encore chauds et lestés de treize balles (12 fusils par condamné et le coup de grâce du sous-officier).
Le journal des opérations du régiment fait état ce jour-là de 6 morts et 2 blessés.
Il y aurait eu quelques centaines de ces exécutions pour l’exemple pendant la Grande guerre. 600 ou 700 soldats. 42 seulement ont été reconnus innocents, entre 1920 et 1930. Parmi eux figurent les fusillés de Vingré, dont le « jugement » est annulé par la cour de Cassation, qui déclare en 1921 « décharger leur mémoire de cette condamnation » (Jugement pp. 54-57).
Le monument de l’absolution est inauguré le 5 avril 1925.
Depuis, leur souvenir est commémoré, ils sont devenus citoyens d’honneur du département en 2004, visités régulièrement par les officiels les plus éminents, et désormais flotte en permanence sur leur mémoire, dans le champ d’orge de leur calvaire, en haut d’un mât, immaculé, l’emblème altier de la Patrie.
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