Le paysage de Fitz-Henry Lane
Lane F.H, Coffin's beach, 1862 (Boston MFA)
Les Étasuniens sont bienheureux. ils ont, jalousement consignés dans leurs vastes musées, les plus grands peintres paysagistes du 19ème siècle, A. Bierstadt, A.T. Bricher, F.E Church, S.R. Gifford, W.S. Haseltine, M.J. Heade, W. Homer, G. Inness, J.F. Kensett, F.H. Lane… Arrêtons-nous au L.
Ils les ont classés, après leur décès, dans "l’École de la rivière Hudson" parce qu’ils pratiquaient le paysage essentiellement aux alentours de l’Hudson, entre Boston et New York, mais la plupart ne se connaissaient même pas. Et il ne faut pas la confondre avec "l’École luministe américaine", qui regroupe un sous-ensemble des peintres de l’Hudson river school. À moins que ce soit l’inverse. De toute manière ils ne se fréquentaient pas non plus.
D’ailleurs qui les connait en Europe ? L’Amérique est possessive. La dernière fois qu’elle a montré sérieusement aux Français la richesse de son 19ème siècle (élargi), c’était au Grand palais de Paris en 1984, l’exposition Un nouveau monde, chefs-d’œuvre de la peinture américaine 1760-1910 : 115 parmi ses plus précieuses peintures.
Un beau geste ! Un bouleversement ! Madame X par Sargent, le Renard dans la neige de Homer, les horizons marins de F.H. Lane (alors Fitz Hugh, aujourd’hui Fitz-Henry), épurés, précis, presque naïfs, les paysages de Kensett, aux couleurs si délicates qu’on ne peux même pas les reproduire. La France alors découvrait l’Amérique.
On objectera que leurs paysages sont trop grandioses parfois, au point que, pour ne pas souffrir de la comparaison, leur cinéma inventera dans la foulée le procédé Technicolor.
Mais c’est parce que leur pays est colossal, cascades, geysers, cyclones, concrétions, déserts, tout y est démesuré. Et la vallée de la Mort ! Le soleil peut y cuire une omelette, parait-il ! Tandis que sur la plage de Trouville, on mâchonne nos œufs durs en regardant Eugène Boudin poser ses petites touches rouges et bleues sur un fond gris, les pieds pataugeant dans le sable.
Si elle ne prête pas beaucoup ses paysages peints, l’Amérique en fait des catalogues.
Le musée de Cape Ann à Gloucester dans le Massachusetts, où F.H. Lane a vécu presque toute sa vie, et qui possède une belle série de ses œuvres, vient de rendre public un site consacré à son catalogue raisonné.
Il documente précisément, pathologiquement, l’univers de Lane, le sujet unique de ses tableaux, la côte autour de Gloucester, le port et les navires, l’emplacement exact du peintre quand il a réalisé telle vue, le descriptif technique de la goélette représentée, le plan de sa voilure, et quelques études captivantes, comme ce dossier sur 4 facsimilés peints par Lane et son élève très douée, Mary Blood Mellen.
Tout est en anglais, mais les principaux navigateurs sur internet traduisent aujourd’hui de façon transparente vers le français. Les reproductions des tableaux sont correctes, parfois bonnes.
1 commentaire :
Je dois dire que je suis assez friand de ce genre de traitement du paysage à la limite du naïf et du fantastique (un peu comme chez Martin Johnson Heade, que j'ai dû découvrir probablement ici même ...). Lane a la politesse de simplifier, d'épurer, d'apaiser, quand pas mal de ses confrères rajoutent des quantité d'effets spéciaux alors que c'était pas encore inventé ! On le dit luministe mais c'est surtout la lumière des rêves qui semble l’intéresser (mais c'est bien connu, les bords de mer, l'eau, ont a voir avec l'onirisme, comme dirait Gaston...).
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