L'agonie du domaine public
On a tant parlé du domaine public et du droit d’auteur dans ce blog que le lecteur fatigué pourra s’éviter une perte de temps en ne lisant pas ce qui suit. Il s’évitera ainsi la contrariété d’une très mauvaise nouvelle.
On supposera connus, par le lecteur piégé par la perfidie de la phrase précédente, les méfaits de l’abus mercantile des droits de la propriété intellectuelle, et ainsi l'amenuisement des droits du public à la recherche, l’étude, la critique, l’enseignement, l’admiration des créations humaines.
Le Canada, était jusqu’à présent, un grand fournisseur du domaine public francophone en matière de littérature (grâce à la province du Québec), car sa loi considérait que les droits de la propriété intellectuelle cessent 50 ans après la mort de l’auteur (au lieu de 70 ans dans la plupart des législations). Par exemple, les écrits de Boris Vian sont protégés en France jusqu’en 2030, mais largement disponibles sur les sites canadiens.
Une telle situation ne pouvait pas durer. Pour satisfaire les exigences des États-Unis, une nouvelle mouture de l’accord commercial de libre-échange nord-américain, signée le 1er octobre 2018 par le Canada, l’oblige à prolonger de 20 ans sa durée du droit d’auteur. Ainsi les 20 années à venir seront un désert total pour le domaine public international et une déréliction pour l’amateur de littérature francophone numérisée.
Et comme le passage de 70 à 90 ans est déjà dans la liste des revendications en Europe, et que les États-Unis en sont à 95 ans dans certains domaines (c’est la « loi Mickey Mouse », faite pour que ce chef d’œuvre universel reste à jamais en mains privées), on peut commencer à décompter les jours restant à vivre pour le domaine public.
Relativisons toutefois, on se tuera certainement plus, dans les prochaines décennies, pour la possession d’un air respirable, d’eau courante et d’un coin de potager, que pour élever la musique et la littérature du 3ème millénaire à la béatitude d’un domaine public devenu dérisoire, même si la cause en est la même, la cupidité imbécile de l’espèce humaine.
On supposera connus, par le lecteur piégé par la perfidie de la phrase précédente, les méfaits de l’abus mercantile des droits de la propriété intellectuelle, et ainsi l'amenuisement des droits du public à la recherche, l’étude, la critique, l’enseignement, l’admiration des créations humaines.
Le Canada, était jusqu’à présent, un grand fournisseur du domaine public francophone en matière de littérature (grâce à la province du Québec), car sa loi considérait que les droits de la propriété intellectuelle cessent 50 ans après la mort de l’auteur (au lieu de 70 ans dans la plupart des législations). Par exemple, les écrits de Boris Vian sont protégés en France jusqu’en 2030, mais largement disponibles sur les sites canadiens.
Une telle situation ne pouvait pas durer. Pour satisfaire les exigences des États-Unis, une nouvelle mouture de l’accord commercial de libre-échange nord-américain, signée le 1er octobre 2018 par le Canada, l’oblige à prolonger de 20 ans sa durée du droit d’auteur. Ainsi les 20 années à venir seront un désert total pour le domaine public international et une déréliction pour l’amateur de littérature francophone numérisée.
Et comme le passage de 70 à 90 ans est déjà dans la liste des revendications en Europe, et que les États-Unis en sont à 95 ans dans certains domaines (c’est la « loi Mickey Mouse », faite pour que ce chef d’œuvre universel reste à jamais en mains privées), on peut commencer à décompter les jours restant à vivre pour le domaine public.
Relativisons toutefois, on se tuera certainement plus, dans les prochaines décennies, pour la possession d’un air respirable, d’eau courante et d’un coin de potager, que pour élever la musique et la littérature du 3ème millénaire à la béatitude d’un domaine public devenu dérisoire, même si la cause en est la même, la cupidité imbécile de l’espèce humaine.
Illustrer des abstractions comme le droit d’auteur ou le domaine public relève de la performance, aussi, pour alléger un peu cette chronique sans espoir, avons-nous tiré au hasard une jolie carte postale dans les jardins de l’Alhambra, à Grenade.
Et à propos de vénalité et d’imbécilité, le Parlement européen vient de voter définitivement, le 12 septembre, POUR la directive européenne sur le droit d’auteur, par 438 voix contre 226. Le plus amusant est qu’il avait voté CONTRE, le 5 juillet, par 318 voix contre 278. Ce qui fait 92 retournements de veste et 68 fraichement convaincus, le tout en 69 jours.
Persuader 160 députés européens en pleine période estivale n’est toutefois pas chose si prodigieuse. On a déjà constaté que l’industrie culturelle, qui se lamente continuellement, a de sérieux moyens inavoués de persuasion, jusqu’au monarque de la France qui a diffusé tous azimuts un tweet alarmant au moment décisif du vote.
Rappelons que les deux articles les plus discutés ont en réalité peu de chance de recevoir une mise en application pertinente.
L’article 11, qui instaure un droit rémunérateur sur les articles de presse référencés par d’autres sites, est une nouvelle tentative de faire passer la célèbre taxe Google. Il est probable que Gougueule y répondra encore par la menace d’arrêter le référencement de tous les articles de la presse européenne.
L’article 13, qui préconise le contrôle des droits d’auteur sur tous les contenus (y compris images et textes) avant toute publication sur internet, est aussi peu réaliste, vu le nombre d’erreurs que génèrerait une telle surveillance qui reviendrait alors à une censure préventive automatisée et généralisée, par tous les opérateurs privés qui en auront les moyens, et à la disparition des plus petits. Google et Facebook qui exercent déjà ce type de censure sur la musique et les vidéos commettent des milliers d’erreurs et d’abus de pouvoir chaque jour.
Mais qui sait ? Dans ce domaine, comme pour la survie de la « Civilisation », le pire est peut-être le plus probable.
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