Tableaux singuliers (16)
Gustave Caillebotte était un riche héritier. Entre autres passions, avec la philatélie, l’horticulture, le nautisme et les régates, il aimait peindre et réalisa, d’après Wikipedia, 475 tableaux (477 était le premier décompte du catalogue raisonné chez Wildenstein en 1978, mais la révision de 1994 en dénombre 565, soit 88 de plus dont le n°80).
Il aida considérablement ses amis impressionnistes, finança certaines des premières expositions du groupe, leur acheta beaucoup de tableaux, et établit leur renommée en mourant jeune et léguant sa collection aux musées nationaux à la condition (à moitié respectée) qu’elle sera exposée au musée du Luxembourg ou au Louvre sans être dispersée (aujourd’hui à Orsay).
Son propre style était d’un impressionnisme modéré et ses sujets et angles de vue étaient souvent recherchés et originaux. Il ne peignait pas pour en vivre.
Son pays l’a longtemps considéré comme un amateur et n’a commencé à prendre sa peinture au sérieux que 100 ans après sa mort, dans une rétrospective de 116 numéros au Grand Palais, en 1994.
Cette longue indifférence a fait la rareté des tableaux de Caillebotte dans les musées français. Ainsi la plus grande part de son œuvre est encore entre des mains privées, essentiellement sa famille, et on découvre chaque année deux ou trois de ses tableaux en ventes publiques, de plus en plus convoités, fréquemment entre 1 et 15 millions de dollars. "Homme de dos à la fenêtre" a même atteint 53 millions en novembre 2021. Gustave Caillebotte entrait, alors en 85ème position, dans la liste mouvante et vaine des 100 tableaux les plus chers.
La toile en illustration ici représente bien la singularité du style de Caillebotte. On y retrouve son penchant vers des sujets quotidiens sans anecdote et la touche légère du premier impressionnisme, mais aussi son passage dans l’atelier du très académique Léon Bonnat, et son gout pour une certaine rigueur classique.
Elle représente, entre 1875 et 1878, deux jardiniers dans le vaste potager de la grande propriété Caillebotte à Yerres (vendue en 1879), 20 km au sud-est de Paris.
Christie’s vient d’en d’obtenir une enchère à 7 millions de dollars le 17 novembre 2022, ce qui nous gratifie d’une très belle reproduction quasiment aux dimensions réelles du tableau (117 centimètres).
2 commentaires :
Sept millions de dollars ? Cela fait cher la laitue, mais justifie sans doute deux jardiniers (qui se caillent sans botte) et quatre arrosoirs.
Comme quoi, il vaut mieux peindre des salades que d’en cultiver ou d’en raconter.
« Son pays l’a longtemps considéré comme un amateur et n’a commencé à prendre sa peinture au sérieux que 100 ans après sa mort… » : cela lui apprendra à ne pas avoir été « maudit », car en France, un artiste sans odeur de scandale ou de casseroles au derrière n’est qu’un peintre du dimanche, non, mais oh !
Merci pour vos excellents (maudits) billets et tous mes bons vœux pour quoi vous savez.
En fait il n'a jamais eu besoin de vendre ses tableaux. Propriétaire du potager il achetait même ses tableaux impressionnistes, alors nettement moins chers, sur les économies faites sur les bottes de ses employés. Fieffé Caillebotte !
C'est moi qui vous remercie de votre fidélité. Je vous souhaite la même punition pour les années à venir.
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