samedi 10 août 2024

Orsay, un espoir ?

Détails de 4 tableaux du musée d’Orsay reproduits en haute définition sur le site "Google Arts & Culture" : 
Ingres, La source (lien sur le site d’Orsay, sur Arts&Culture)
Degas, Répétition de ballet (lien sur le site d’Orsay, sur Arts&Culture)
Monet, Coin d’appartement (lien sur le site d’Orsay, sur Arts&Culture)
Vuillard, Comtesse de Polignac (lien sur le site d’Orsay, sur Arts&Culture)

On devra s’y habituer, les musées français, comme les italiens, ne nous dévoileront jamais leurs collections et leurs réserves avec des reproductions de haute qualité, gratuites et d’une définition suffisante pour en explorer les détails et la matière. Les grands musées anglais, américains, hollandais, nordiques, le font, pour certains depuis 20 ans.
On en a déjà parlé ici-même, c'est comme si une ligne séparait sur le globe les pays qui partagent leurs biens culturels avec générosité (jusqu’à rendre souvent gratuite l’entrée de leurs musées) et ceux qui les cachent jalousement. Des penseurs appointés l’expliqueront par l’influence de la réforme protestante, des philosophies utilitaristes, du libéralisme juridique qui en a découlé. Admettons. Le résultat est que les images et les idées anglo-saxonnes ont envahi les médias, les télévisions et tous les téléphones de la planète, pour le pire comme pour le meilleur, sans que les principes juridiques et l’esprit des institutions n’aient suivi. 

Et les grands musées français se situent du mauvais côté de cette ligne.
Rappelons qu’ils n’exposent au public qu’un centième, voire un millième de ce qu’ils détiennent (le Louvre conserve 250 000 dessins et n’en expose qu’une poignée par an), et que seule une fraction réduite et privilégiée du public a réellement accès à cette portion insignifiante de ces collections, qui appartiennent pourtant à tous. 
Hélas, si on se rappelle cette absurde polémique en 2021, quand un musée français décidait, pour être compris par un plus grand nombre, d’écrire les numéros des siècles ou des monarques en chiffres arabes sur ses cartels, en remplacement des absurdes chiffres romains, causant de virulentes critiques des médias notamment italiens le forçant à se justifier voire à renoncer, on réalise que le partage des biens culturels n’est pas près d’évoluer de ce côté de la ligne. 

Fidèle donc à ces principes arriérés et mercantiles, le musée d’Orsay, gardien des choses créées strictement entre 1848 et 1914, qui avait déjà interdit toute photographie dans son enceinte, nous inflige encore aujourd'hui, sur son site si poussif, des photos tellement médiocres des collections publiques que leur téléchargement, pourtant récemment autorisé, ne tentera jamais personne.  

Conscient peut-être de cette indigence, mais surtout sous la pression (probablement rémunérée) de Google et son impérialisme culturel, le musée a prodigalement accordé que le maitre d’internet publie 157 peintures de ses collections sur le site "Google Arts & Culture". Les reproductions sont d’une bonne qualité, pas toujours exceptionnelle, mais incomparables à celles du site du musée d’Orsay dont le catalogue se garde bien de signaler les œuvres qui sont reproduites sur Arts & Culture. Elles y sont évidemment protégées contre tout téléchargement (petit cadeau au fidèle lectorat, les 4 tableaux en haute définition ayant fourni les détails de notre illustration sont copiables ici).

Ce billet s’achèvera donc sur une note d’espoir : sur 5137 tableaux conservés par le musée d’Orsay en 2022 (sans parler des 48 000 photos, des dessins, pastels, sculptures…), 3% sont déjà reproduits et diffusés en haute qualité, pas sur le site du musée mais quelque part en ligne. Quand on sait que la photo numérique et internet n’existent que depuis 34 ans, à peine, ça fait réfléchir.

4 commentaires :

GJG a dit…

Auriez-vous un peu plus d’informations que moi sur cette (à priori sympathique) comtesse de Polignac de Vuillard (la femme et le tableau) ? Ce sera d’autant plus facile pour vous de répondre (ô érudit bienfaisant) que je n’ai pas cherché bien loin ou bien longtemps (en vain) par ce dimanche chaleureux de siestes estivales.

Costar a dit…

Hélas mon ami, je n’ai pas eu une seule nouvelle de cette chère Marie-Blanche depuis 1958, rien, même pas un coup de fil ou un texto ! Le succès a dû lui monter à la tête, celle-là. Vous me direz, même Francis Poulenc n’écrit plus, je ne sais pas ce qu’il se passe.

Quant au tableau, je ne sais pas depuis quand Orsay l’expose, je ne me souviens pas l’avoir jamais vu, mais il y a 13 ans que je n’y ai mis les pieds, et le reste.
Cependant vous avez un historique et une bibliographie fournies sur le site du musée (voir le lien sous l’illustration).

GJG a dit…

Merci beaucoup cher Costar pour ce courtois rappel à vos liens…
Vous auriez pu me signifier (à bon droit et sans trop me vexer) : « ta ka kliker sur mais lien pov kon ». Mais non.
A vrai dire ce nom de « Polignac » me disait vaguement quelque chose en tant que relation mentionnée dans le journal d’une de mes arrières (arrières ?, arrières ?) grand-mères. Il faut que je me replonge dans mes archives…
Cela étant, cette « Marie-Blanche »(1897-1958), née di Pietro, pianiste et cantatrice, est totalement méprisée par mademoiselle de Wikipédia (pourtant pas trop snob cette virtuelle gamine).
Elle est la fille de Jeanne Lanvin (la couturière et la marque LVMH & Co, pas les chocolats de Dali) et a épousé en première noce un mécecin nommé René Jacquemaire, (petit-fils de Clémenceau), lequel décèdera à seulement 37 ans, victime d'une exposition trop importante et prolongée aux rayons X. (retour à votre terrifiant « monde disparu n° 14 »)…
Tout ça, c’était la France (et l’Europe) d’avant 14-18, mon pov’ môssieur…
Ce Glob est plat, mais aussi très petit (et donc très grand) finalement.

Costar a dit…

Le monde est si petit que notre sangsue de Vuillard a aussi fait dans la foulée le portrait de la maman Lanvin, et que ce portrait est exposé parait-il aujourd’hui dans la même salle que celui de sa fille, avec plein de jolis meubles autour. Un tableau très ennuyeux mais avec un joli vert.
Vous avez raison, le grand monde est bien petit.