Où étaient les peintres ? (7)
Faisons comme si vous étiez en train de lire cette chronique. Il est possible que ce ne soit pas le cas ; vous êtes peut-être déjà dans cet univers potentiel où la déesse Gougueule l'aura censurée, parce que l'illustration en est au moins trois fois plus osée que ce que les obsessions puritaines de son réseau et son intelligence postiche supportent habituellement. D’ailleurs une des 3 images qui la composent, qui illustre les publications d’un fameux musée danois, aurait été menacée d’interdiction vers 2016 sur un autre réseau social multimilliardaire en adhérents.
La question de savoir où étaient les peintres n’est qu’un prétexte, bien sûr. On devine sans effort qu’ils étaient au même endroit, au même moment.
D’ailleurs ces séances de pose sont bien documentées dans le journal tenu par Eckersberg à l’époque.
Elles se déroulaient, comme d’autres séances depuis le milieu des années 1830, dans une salle de l’Académie royale des beaux-arts danoise, à Copenhague, entre le 9 aout et le 16 septembre 1841. Le professeur, C.W. Eckersberg - on en parlait ici et là - enseignait par l'exemple la peinture d’après un modèle féminin dont l’histoire n’a retenu que le sobriquet, Florentine, à un groupe d’élèves, dont Salomon Henriques et Ludvig Smith.
La version du professeur Eckersberg, une toile de petit format (33cm. x 26), est devenue depuis 1895 où elle trône dans la salle 1 du musée de la collection Hirschsprung à Copenhague, une sorte de Joconde danoise. Eckersberg est souvent qualifié de père de la peinture danoise.
La version de Ludvig Smith, haute de 120 centimètres, achetée aux enchères en 2003, est une des 151 œuvres danoises de l’étonnante collection privée du banquier américain John Loeb Junior, constituée depuis les années 1980 quand il était ambassadeur au Danemark, et dont le catalogue raisonné en ligne est remarquable.
La version de Salomon Henriques, haute de 87 centimètres, aurait pu faire l’objet d’une chronique de la série Ce monde est disparu puisqu’elle devrait disparaitre sous les enchères dans quelques jours, chez Christie’s à New York le 23 mai, contre 20 à 30 000 dollars, pense-t-on.
Quant à la position précise des peintres lors de ces séances, le commentaire du catalogue raisonné de la collection Loeb considère qu’Eckersberg était à gauche, Smith au milieu et Hendriques à droite, comme sur notre illustration. Le modèle ne pouvant pas garder exactement la même attitude au long des multiples séances de pose nécessaires, il semble qu'à certains détails cette affirmation, particulièrement sur la position des deux élèves, pourrait être discutée. Nous ne le ferons pas.
On dit que J.C. Dahl, paysagiste norvégien ami de Friedrich à Dresde, était présent à ces séances de 1841, parmi d'autres artistes. Il n’est pas impossible que des versions perdues du dos de Florentine reparaissent un jour, du fond d’un débarras ou d'une brocante.
2 commentaires :
Ô gracieuse et callipyge
Tous les culs sont de la Saint-Jean
Le tien leur fait vraiment la pige
Déesse aux collines d’argent.
(Guillaume Apollinaire, Poèmes à Lou)
La « Joconde » du Nord à l’air moins pincée que l’autre Florentine du sud (la meuf à Léo, la Mona, la bête du Louvre) dont on ne saura jamais si elle avait d’aussi charmantes collines d’argent devant et derrière — surtout que de très mauvaises langues disent que le modèle fut un garçon.
(Guillaume J.G, poète et peintre raté et colporteur de rumeurs nauséabondes )
Ah pauvre Guillaume ! Je parle de Popol, bien sûr. Il parait qu’il fut finalement déçu de ce popotin de la haute. Je n’ai jamais compris ces poètes qui nous font des fleuves impétueux de leurs petites pollutions énamourées. "L’infini mis à la portée des caniches" disait si justement Bardamu.
Quant à la vraie Joconde, quel qu’ait été son genre, Duchamp qui l’avait approchée de si près qu’il avait vu sa moustache, prétendait qu’elle était plutôt chaude du même endroit. Qui croire ?
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