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samedi 28 janvier 2017

Manipulons les antiquités

Le lecteur se souvient peut-être de l’amertume de l’auteur de ce blog quand il réalisait, visitant le musée d’archéologie de Saint-Germain-en-Laye, que les objets exposés dans les vitrines étaient souvent de médiocres copies de plâtre. Peut-être se rappelle-t-il alors la rumination sans issue sur l’idée de Vérité que ce constat avait provoquée chez l’auteur. 

Et bien le musée propose depuis peu une solution assez élégante à cette question existentielle. Dans le cadre du projet « France Collections 3D » piloté par la Réunion des Musées Nationaux, qui est une grande campagne de numérisation en trois dimensions des objets des collections nationales, le musée d’archéologie a déjà confié 80 pièces majeures. 

Et elles sont aujourd’hui à la disposition du public sur le site du musée, dans une interface encore un peu rudimentaire et avec une information minimaliste, ou bien, assorties d’une ergonomie plus souple et d’une fiche signalétique plus complète, sur le site de Sketchfab, société qui héberge les données numériques du musée et les outils d’affichage. 

Ainsi la Dame à la capuche de Brassempouy (illustration ci-dessus), extraordinaire portrait préhistorique de quelques centimètres sculpté dans l’ivoire il y a 25 000 ans, peut être agrandie, contournée, basculée, manipulée, scrutée dans une qualité bien plus proche de l’original que la lointaine copie exposée dans le musée. 

On y trouvera aussi la Vénus de Tursac aux formes pures comme modelées par Brancusi, et le Cheval propulseur, et l’Ourson… 

N’oubliez pas d’employer toutes les ressources de la souris (ou sur tablette, des doigts), clic droit, clic gauche avec ou sans touche Alt, molette…

dimanche 19 janvier 2014

Des vérités intemporelles

Ce Glob est Plat affirmait jadis des vérités définitives sur la notion de vérité. Il était temps après de longues années et une visite instructive au musée d'Archéologie nationale du château de Saint-Germain-en-Laye, de faire le point sur cette question essentielle.

Entre 1850 et 1860, alors que les plus hautes autorités ecclésiastiques et les livres d'histoire les mieux documentés affirmaient que la création de la Terre et donc des hommes datait de 6000 ans (doctrine partagée par une bonne part des Américains ou des Turcs encore aujourd'hui), une sorte d'illuminé français, Jacques Boucher de Perthes, inventait la Préhistoire, prétendant preuves à l'appui que des hommes et des animaux étranges, exhumés des couches géologiques, avaient vécu des dizaines ou centaines de milliers d'années avant le Déluge.

La création du musée de Saint-Germain-en-Laye en 1866 consacra, peu avant sa mort, la reconnaissance des magistrales déductions de Boucher de Perthes, en exposant sa collection d'antiquités antédiluviennes.
Et l'esprit curieux qui cherche aujourd'hui les traces de son propre passé ne sera pas déçu de sa visite. Il remontera, au long des vitrines et des couloirs, les âges du fer, du bronze, de l'agriculture et des pierres polies, et atteindra l'époque lointaine et mystérieuse des pierres taillées, des premières traces d'humanité.

Étreint par tant de millénaires, touché par tant d'antiquité, ému par les réalisations de son ancêtre comme devant un enfant qui fait ses premiers pas, il s'assiéra, pensif.
Fatale erreur ! Laissant errer sans but son regard désœuvré, il examinera machinalement les légendes des cartouches qui commentent les objets exposés. Mal lui en prendra ! On ne devrait jamais lire les étiquettes dans les vitrines des musées. Combien de rêves brisés par la connaissance des terribles informations qu'elles recèlent ?
Car il découvrira alors qu'un grand nombre de pièces exposées, notamment les plus émouvantes, sont des reproductions moulées et peintes. Et il aura soudain la sensation que le musée est un vaste facsimilé, un Disneyland de la préhistoire, une boutique du Louvre pleine de répliques pour cadeaux de Noël, et que ce troublant voyage dans le temps n'était en fait qu'une mystification.

Un fidèle lecteur de Sénèque ou d'Épicure lui dirait certainement « Pourquoi te tourmenter ainsi pour un fait révolu, tu aurais pu ne jamais connaitre ce qui maintenant te peine ? », car le docte ami des philosophes tutoie toujours son interlocuteur.
L'impertinent visiteur pourrait bien sûr lui rétorquer « Vous précipiteriez-vous pour admirer une exposition de photographies, même fidèles, des tableaux d'un peintre que vous vénérez ? »

Et si le sage métaphysicien, pour avoir le dernier mot, lui répliquait « Ce moment était agréable quand tu l'as vécu, il est gravé ainsi dans ta mémoire », le touriste déçu pourrait encore lui objecter quelque chose comme ...

Le concept de vérité ne s'en trouverait pas vraiment éclairci.


La Dame à la capuche, provenant de la grotte de Brassempouy (Landes), premier portrait connu, ivoire sculpté il y a 25 000 ans, haute de 3,65 cm. Laquelle, à gauche ou à droite, est la copie exposée à Saint-Germain-en-Laye ? (certaines différences de forme peuvent être dues aux déformations de l'objectif photographique).