Ce monde est disparu (22)
Holm, Emil - Vue de Palerme v.1861, 139cm. (marché de l'art 2025)
Holm, Emil - Vue de Palerme v.1861, 139cm. (marché de l'art 2025)
Il est rare, et toujours émouvant, de recevoir un courriel de Madame la présidente du musée du Louvre en personne. C’est arrivé ce mois-ci.
Bien sûr elle l’a aussi publié sur son site pour les non abonnés. C'était pour nous réconforter suite au cambriolage cocasse de quelques pierreries historiques. Elle nous assure, après cette épreuve particulièrement difficile et malgré la meurtrissure causée par le drame que la mission du musée est, et sera toujours, de conserver, partager et transmettre les collections.
Inutile de nous le rappeler. Il était évident, à l’aisance du déroulement du vol, en plein jour et par des amateurs, que la mission "partager et transmettre" était pleinement honorée.
Puis la présidente en profite pour nous vanter quelques babioles qui se vendent au Louvre et surtout son exposition Jacques-Louis David. À la présentation austère et minimale qu’elle en fait, on sent monter une envie irrépressible de ne pas y aller.
David, c'est Le Peintre Français. Il n'y a pas plus officiel. Passéiste, théâtral et pompeux, on le dit aujourd'hui "peintre engagé", qualificatif toujours flatteur et qui évite de préciser qu’il a illustré servilement quasiment tous les pouvoirs.
On le ressort pour toute commémoration d’évènement historique. Là, c’est le bicentenaire de sa mort. L’exposer était une sorte d’obligation administrative, et puis c'est le Louvre qui possède ses œuvres majeures, ses immenses tartines insipides et assommantes qui ne passeraient par les portes d’aucun autre musée.
Enfin, dans une période difficile qui réclame la solidarité de tous, elle remercie le Grand mécène de l’exposition, le cabinet d’audit et de conseil Deloitte. Choix pertinent et naturel, la science de l’éthologie nous confirme les profonds liens biologiques de dépendance entre les rémoras, ces poissons-pilotes disposant d’une large ventouse, et les grands requins.
Petit bémol néanmoins, dans sa lettre la présidente oublie de présenter la seule exposition de son musée qui mérite qu’on en parle et qui aura lieu, dans quelques jours du 26 novembre au 31 aout 2026 (9 mois !), salle 831 de l’aile Richelieu au niveau 2 (ne la cherchez pas sur le plan du musée, elle n'est pas citée et il n’est pas certain qu’elle jouxte la 830, mais ça sera certainement dans le coin, et méfiez-vous des jours de fermeture) :
C’est l’exposition tant attendue du triptyque de Jean Hey, le fameux triptyque de Moulins, feuilleton de tant d’épisodes de Ce Blog, bichonné depuis 3 ans aux Coton-tige par le Louvre, dans un arc-en-ciel de couleurs désaccordées par le peintre.
Si vous avez un tempérament joueur, rendez vous sur le site du Louvre et essayez de trouver les informations sur cette exposition. Ne tapez pas "Jean Hey" dans le dialogue de recherche, le musée ne connait pas. Prévoyez des heures d’une découverte qui s’amusera de vos nerfs.
Comme à l’habitude vous ne trouverez pas de bonnes reproductions du triptyque sur le site du musée. Les images en haute définition sont réservées à la presse, qui les paie sans doute, qui se gardera bien de les diffuser sur internet, mais qui vous dira complaisamment ce que le musée lui a dit d'en dire.
Cela dit, les fuites restent possibles. Patientons.
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Mots clefs : Art officiel , Bijoux , Cabinets de conseil , Cambriolage , David , Exposition , Hey (Jean) , Louvre , Mécénat , Reproduction , Restauration , site , Triptyque
© Charles M. Schulz 12.1973 partiellement.
Spoiler (prononcer spoïler) signifie "révéler un élément clé d'une intrigue au point de gâcher à autrui l'effet de surprise et le plaisir de la découverte", avoue depuis peu le dictionnaire Larousse.
Bien sûr, les personnes qui n'auront pas perçu le rôle de la révélation ou n'auront pas été bouleversées vous diront que ça n'est pas bien grave, que ça n'est pas l'essentiel, que le film est fabuleux sans cela.
Peut-être. Essayez vous-même, si vous ne l'avez jamais vu ; lisez Wikipedia avant de regarder le film puis racontez-nous vos impressions sur ce mystère dont vous aurez connu le secret à l'avance, alors que l'auteur ne le divulgue même pas à ses propres personnages, et que le citoyen Kane l'emporte avec lui dans la tombe.
Mais attention, à ce jeu non plus, il n'y a pas de retour en arrière.
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Mots clefs : Améliorons les chefs-d'œuvre , Bandes dessinées , Cinéma , Citizen Kane , Larousse , Peanuts , Rosebud , Schulz , Spoiler , Welles (Orson) , Wikipedia





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Mots clefs : Altdorfer , Bâle (KunstMuseum) , Birmann , Cambriolage , Curiosité , Holbein Hans , Louvre , Musée , Paris , Peinture , Reproduction , Robert (Hubert) , Suisse , Vol , Wolf (Caspar) , Zünd
Les règles de sécurité contre les risques d'incendie et de panique dans les établissements recevant du public obligent à une surface minimale par visiteur de 5 m² dans un musée (parfois moins, avec accord de la Commission de sécurité), ce qui autoriserait seulement 40 visiteurs simultanés dans cette exposition ; environ une personne par tableau, ce qui est très éloigné de la description par les témoins du drame qui se joue actuellement au musée Jacquemart. On imagine que la Commission de sécurité a été particulièrement laxiste, ou que la réglementation n'est pas respectée, hypothèse insoutenable quand on sait l'honnêteté et la rigueur des partenaires de l'exposition.Notez que tous les billets pour visites de luxe par groupes de 15 personnes en semaine de 9h à 10h étaient épuisés dès les premiers jours de l'exposition.
21 toiles (dont 8 exposées) à l'authenticité indiscutée et jugées comme des chefs-d’œuvre de la maturité7 toiles (dont 7 exposées) à l'authenticité peu discutée mais œuvres des débuts, moins considérées12 toiles (dont 9 exposées) à l'authenticité douteuse (de la main du fils Étienne ou d'un soi-disant atelier)35 toiles (dont 6 exposées) à l'authenticité nulle (copies évidentes ou pastiches)
Notons que les 7 mauvaises copies appartenant à l'ensemble du Christ et des apôtres de la cathédrale d’Albi, pressenties, ne sont heureusement pas exposées, non plus que les deux variantes des "Tricheurs", du Louvre et du Kimbell Art Museum de Fort Worth.Le catalogue de l'exposition, aux reproductions correctes sans plus, aux textes sans surprise et aux informations parfois approximatives (prétendant par exemple certains tableaux absents de la rétrospective de 1997 alors qu'ils y étaient), est loin de justifier son prix.
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Mots clefs : Authenticité , Catalogue , Chancelade , De La Tour , Exposition , Honthorst , Jacquemart-André (musée) , Madeleine , Marketing , Médias , Métro , Nouveau-né , Radio , Rennes , Sécurité , Visiteurs
Notre flâneur se dirige vers le site du musée des arts de Bâle (Basel Kunstmuseum), établissement réputé en Suisse, dans l’encoignure de l’Allemagne et la France.
On le voit pousser une porte, et son visage ébauche une grimace ; il se trouve dans un vaste hall accueillant, moderne, fantaisiste, mais incompréhensible, constellé de choses clignotant pour attirer son attention, alors qu'il ne souhaite que se balader paisiblement dans les pages d'exposition de la collection de peintures du musée, dont on lui a dit le plus grand bien.
Pour ne pas perdre trop de temps nous tairons le laborieux épisode de sa recherche du mot Collection (Sammlung). Il aura surtout rencontré, presque à chaque page, des panneaux publicitaires au sigle d'UBS (première banque de gestion de fortune au monde, trempée dans les grandes fraudes bancaires du siècle, mais épongée par des amies), et il aura finalement trouvé la fameuse collection après d’infinis détours ; elle était exactement ici.
Mais sur la page, pas d'image ; une sinistre ligne des lettres de l’alphabet suivie d’une liste nue des 25 noms de peintres qui commencent par A jusqu’à AG…, et un petit compteur ironique qui sous-entend que la présente page est suivie de 142 autres, qu’il faudra faire défiler au moyen d’une petite flèche insaisissable.
Notre promeneur est déçu, mais ne renonce pas ; il sait que le musée possède une riche série de tableaux de Hans Holbein le jeune ; alors il appuie hardiment sur la lettre H et fait défiler 6 pages pour atteindre les noms en Ho…
La première page (sur un total de 20) des œuvres de Holbein fils affiche alors 25 vignettes lilliputiennes de 120 pixels, illisibles. Téméraire, notre explorateur appuie sur la minuscule vignette plate du fameux Christ mort (Der Tote Christus). La page qui s’affiche alors apporte des informations sur l’œuvre et s’orne cette fois d’une petite vignette de 250 pixels. On progresse, se dit notre aventurier, optimiste.
Il pressent que sa quête sera bientôt récompensée, et presse avec fougue la petite vignette. Une fenêtre surgit qui agrandit nettement l'image du tableau ; elle mesure maintenant 600 pixels, à peine. À ce taux d'expansion - se dit notre héros - il faudra 10 ou 15 étapes avant d’obtenir une reproduction acceptable, comme dans les poupées russes.
Alors las il renonce, tourne le dos, sort du musée, constate que sa façade, dans la réalité, est celle d’un coffre-fort, s’assoit sur un banc au bord du Rhin tout proche, et médite sur la malédiction des musées suisses, qui ne peuvent s'empêcher de dissimuler leurs richesses.
Notre promeneur n'était qu'un philosophe. Nous aurions plutôt dû suivre un malfaiteur. Dégourdi, il aurait cherché à passer par les caves de l’établissement. Il aurait remarqué au fond de la page descriptive de chaque œuvre une flèche, comme une indication pour y descendre, et aurait découvert au fond d’une page décourageante, après avoir résolu deux énigmes enfantines (les solutions sont "original" et "download for other usage"), le trésor tant convoité : une magnifique reproduction, d’une dimension insensée (24166 × 3596 pixels et 45 mégaoctets), téléchargée automatiquement dans sa musette. Un butin certes un peu lourd mais aisément monnayable sur n’importe quel site sans moralité, comme Ce Blog est Plat.
Ainsi la chronique d’aujourd’hui présente ci-dessous quelques curiosités, raretés dénichées un peu au hasard dans les souterrains du musée par notre gredin hypothétique. D’autres livraisons suivront, dans quelque temps pour ne pas attirer l’attention des autorités.
Pour d’obscures motifs de secret des affaires les liens vers les pages de chaque tableau ne fonctionnent pas. Pour consulter leur fiche et télécharger une reproduction de qualité il vous faudra remonter à la liste des peintres et exécuter toute la procédure décrite plus haut, ou plus simplement copier le numéro d’inventaire "entre guillemets" et le coller dans la dernière case (Inventar Nr.) de cette page mystérieuse (Suche).
Liste des œuvres reproduites ci-dessus :
Scholz, Georges - Petite ville allemande la nuit, 1923, 100x75cm "G 2010.11"
Steenwyck, Harmen, Nature morte au crâne couvert avec une flute entre les dents, Huile sur bois de chêne, 20x26cm "1373"
Birmann, Samuel - Cascade en montagne, 1829, Crayon, stylo, aquarelle, 53,7x43,5cm "Bi.504.17". Que fait le minuscule personnage au centre ?
Giron, Charles, Jeunes filles valaisannes avant l’église, 1897, 159x89cm "248"
Stükelberg, Ernst, La tombe, 1891, 86x100cm "602". Hommage discret et original peint à la mort de la sœur du peintre. Le commentaire précise que sa plaque funéraire (donc sa tombe) est en réalité sur le mur du cimetière, au fond, près de la plaque de leur mère.
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Mots clefs : Bâle (KunstMuseum) , Banque , Cambriolage , Cimetière , Coffre-fort , Crânes , Curiosité , Ergonomie , Holbein Hans , Musée , Peinture , Reproduction , site , Suisse